Le poète Sghaier Ouled Ahmed est mort hier, 5 avril 2016. Après s'être longtemps battu contre la maladie, l'artiste a fini par rendre les armes, comme bien d'autres l'avaient fait avant lui. Dès cette funeste annonce, les hommages ont plu de toutes parts, y compris de celles qui l'insultaient il n'y a pas si longtemps. Il est vrai que les positions du poète étaient tranchées et il pouvait profiter de ce luxe donné aux artistes. Celui d'exprimer leurs opinions sans qu'on leur en veuille.
Ils se bousculeront tous à ses obsèques prévues aujourd'hui au Jellaz. Depuis hier déjà, beaucoup de politiciens ont raclé les fonds de leurs albums photos pour en trouver une avec Sghaier Ouled Ahmed. Mais il faut cependant rappeler certaines choses.
Sghaier Ouled Ahmed n'a pas toujours été autant aimé. A une époque pas si lointaine, ses prises de position lui on valu la vindicte d'ignorants qui ne concevaient pas que l'on puisse donner une certaine largesse aux artistes. Il était menacé de mort, insulté, traité de tous les noms.
Michel Audiard disait : « Les cons ça ose tout, c'est même à ça qu'on les reconnait ». Et des cons il y en a. Plusieurs personnes ne se sont pas privées d'insulter le poète à l'annonce de sa mort. Principalement via les réseaux sociaux, ces anonymes, dont le plus cultivé a lu « Oui-oui à la plage », se sont transformés en critiques d'art. Ils se sont évertués à critiquer l'œuvre de l'artiste. Mais pas la critique bienveillante purement artistique, qui serait, de toute façon, malvenue en ces circonstances. Mais plutôt la critique malintentionnée, vile et basse du genre qui dit que Ouled Ahmed n'était qu'un « petit » poète, dans une référence négative et dégueulasse à son prénom. Après avoir trainé son nom dans la boue, puisque son art leur est inaccessible, ils sortent l'insulte suprême : il était athée ! Ils confirment ainsi, si besoin était, leur complète ignorance et la sombre bêtise dans laquelle ils pataugent.
Sghaier Ouled Ahmed, malgré tout, malgré tout le monde, rejoint le firmament des grands artistes tunisiens. Le poète n'est pas mort, il est devenu éternel, incontournable. Il fait désormais partie de ces noms qui respirent la Tunisie.
Il n'est pas besoin ici de rappeler l'œuvre de Ouled Ahmed. Je me contenterais de rappeler comment il était. Un homme simple, pétri à l'amour de ce pays, proche des plus vulnérables. Certains lui avaient reproché le fait qu'un artiste comme lui prenne des positions politiques et se positionne dans une lutte pour le pouvoir. Mais lui ne voyait pas les choses comme ça. Il voulait simplement apporter quelque chose au pays, ou plutôt participer à le prémunir d'un danger.
Outre que par ses écrits, Sghaier Ouled Ahmed avait le souci de la Tunisie. Cette espèce d'inquiétude permanente qui fait tressaillir les vrais patriotes. Par tous les moyens il a essayé d'ajouter sa pierre à l'édifice.
Pour finir, je ne me hasarderais pas à tenter de traduire n'importe lequel de ses vers, de peur de le mutiler tant son écriture est fine. Par contre, on peut conclure en disant : puissions-nous avoir la chance, avant de mourir, de donner un tant soi peu de ce que lui aura donné à la Tunisie. Paix à son âme !