L'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) a un rôle politique majeur qui dépasse son rôle de syndicat, et s'illustre par deux exemples: l'UGTT a joué un rôle primordial dans le Dialogue national en 2013, et est consultée pour l'élaboration du gouvernement d'union nationale. La centrale syndicale a convenu d'ailleurs avec ce gouvernement d'arrêter les grèves pour une période de deux ans, ce qui devrait, d'après eux, aider le gouvernement à avancer rapidement et sans obstacles. Mais cette image angélique du syndicat, pourtant couronné par un prix Nobel de la Paix en 2015, a été écornée par le prestigieux journal Foreign Policy, dans un article publié le 20 juillet 2016 intitulé « Tunisia's Celebrated Labor Union Is Holding the Country Back ». Lecture. Il y a plusieurs choses à blâmer: une élite corrompue, une zone euro morose sur laquelle repose une majorité du secteur export du pays, ainsi qu'une série d'attaques terroristes qui ont détruit l'industrie du tourisme, une source vitale de devises pour le pays. Mais l'économie est d'autant plus tirée vers le bas par l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT), d'après Foreign Policy. Les employés du secteur public, les employés municipaux, les enseignants, les employés des mines forment une véritable « armée de fonctionnaires » au nombre de 800 000 personnes (chiffres de 2014), dans un pays où la population active représente 4 millions de personnes. Cette « armée de fonctionnaires » est largement contrôlée par l'UGTT pour entreprendre toute sorte de mouvements sociaux.
L'UGTT était partie intégrante du mouvement anti-colonialiste et indépendantiste de la Tunisie. En 2011, le syndicat a aidé à l'organisation des manifestations contre le régime de Ben Ali, et a connu son apogée avec le prix Nobel de la Paix reçu en 2015 pour sa participation à la négociation afin de stopper la crise politique. Outre son poids historique, l'UGTT s'est fait connaitre par l'utilisation des grèves comme une arme politique, parfois au détriment de l'économie tunisienne. Les secteurs clés de la Tunisie, comme le phosphate, sont ceux qui ont le plus subi de dégâts à cause des grèves de la centrale syndicale depuis la révolution. Les grèves à répétition ont touché plusieurs secteurs et conduit à la fermeture de certaines sociétés. La société de câblerie Lear, dernier exemple en date, a fermé ses portes à cause de la répétition des grèves, même si cette entreprise était rentable et en bonne santé. Cette fermeture a laissé derrière elle plus de 600 chômeurs. De même, la société Petrofac, basée à Kerkennah, est en situation de chômage technique du fait que des chômeurs ont bloqué la production dans un premier temps, puis bloqué le transport des produits hors de l'île de Kerkennah.
La dette publique est passée de 40% avant la révolution à 52% l'année dernière. Ceci ne devrait pas être nécessairement un problème si cet argent allait dans les investissements comme les routes ou l'équipement, mais à cause des pressions de l'UGTT, tout cet argent va de plus en plus aux salaires et de moins en moins à l'expansion des capitaux, explique Foreign Policy. Avec les demandes croissantes de travail et d'augmentation des salaires, l'UGTT a montré sa volonté d'utiliser les grèves comme un moyen de pression qui lui est propre. La grève de la Poste par exemple, la grève notable la plus récente, est considérée comme une démonstration de force. Une grève sous forme d'indignation qui commence lorsque l'agent de poste Ahmed Ben Othman reçoit un coursier mandaté par le procureur de la République près du Tribunal de Tozeur pour récupérer du courrier. A défaut de présenter une procuration spécifique, et conformément à la loi, l'agent postal refuse de remettre le courrier. Le procureur furieux, le fait alors convoquer puis le fait traduire devant le juge cantonal qui émet immédiatement un mandat de dépôt. Sachant que la Poste tunisienne propose des comptes de dépôts, souvent prisés par la classe pauvre du pays, ces gens, «pris en otage » n'avaient plus accès à leur fonds pendant 3 jours. Même si dans ce cas précis, le postier, et derrière lui l'UGTT, étaient dans leur bon droit, il est à noter que les grèves de ce type demeurent une arme redoutable particulièrement dans des secteurs comme La Poste, le transport ou encore, les activités d'extraction.
L'article pointe aussi le problème du secteur public et des fonctionnaires en Tunisie. Un sureffectif qui a un poids financier non négligeable sur le budget de l'Etat. L'UGTT justifie ses revendications par le fait qu'elle joue un rôle social en faveur de ses affiliés.