« Il y a des marchés hebdomadaires dans lesquels on vend des filles en tant qu'aides ménagères », a affirmé, devant le parlement, Neziha Laâbidi, ministre de la Femme, de la Famille et de l'Enfance, ce mercredi 1er mars 2017. La ministre a précisé que dans de nombreuses régions du pays, ce « commerce », de jeunes filles « qu'on a sorti des écoles », se fait sur des marchés, souvent en faisant appel à des intermédiaires. « La loi interdit clairement le travail des enfants de moins de 16 ans et si l'adolescent de plus de 16 ans est appelé à travailler, alors il faudra lui garantir une couverture sociale et justifier l'utilité de son travail » a-t-elle expliqué.
Le travail des mineurs est un phénomène bien réel en Tunisie. Nombreuses jeunes filles sont exploitées en tant que « domestiques », « vendues » par leurs familles, obligées à quitter l'école pour aller s'installer chez des inconnus, très loin de chez elles.
Par ailleurs, la Tunisie tient une place peu honorable sur la liste des pays pratiquant la traite transnationale des personnes, selon le rapport 2016 du Bureau de contrôle et de lutte contre la traite des personnes du Département d'Etat des USA paru en juillet 2016. Le rapport met en cause la Tunisie qui, pour la 4ème fois consécutive, se trouve sur la liste de surveillance du département américain en matière de traite transnationale des personnes. Le rapport indique en outre que depuis le 1er janvier 2016, l'Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) a repéré, puis assisté 21 victimes, toutes originaires de Côte-d'Ivoire qui ont été exploitées pour des travaux domestiques, inhumain à la limite.
Le protocole de Palerme contre la traite des personnes de 2000, que la Tunisie a ratifié en 2003, définit la traite comme : « le recrutement, le transport, le transfert, l'hébergement ou l'accueil de personnes, par la menace ou le recours à la force ou à d'autres formes de contrainte, par enlèvement, fraude, tromperie, abus d'autorité ou d'une situation de vulnérabilité, ou par l'offre ou l'acceptation de paiements (…) pour obtenir le consentement d'une personne ayant autorité sur une autre aux fins d'exploitation ». Depuis 2012, l'OIM a ainsi dénombré 78 victimes d'esclavage moderne en Tunisie dont 57 de nationalité ivoirienne exploitées dans le travail domestique et le travail forcé notamment dans l'agriculture. Toujours selon l'étude, la Tunisie est un pays source de destination et de transit pour les victimes de la traite. Un pays où le phénomène est aussi bien local, pire encore, culturellement toléré, bien que juridiquement interdit.