A force de s'endetter à tout va, le pays s'est retrouvé en quelques années avec un encours d'endettement colossal, de 40% du PIB en 2010 à 62% du PIB en 2016. Il faut remonter à la crise du milieu des années 1980 pour retrouver un pareil taux d'endettement. Et cela ne semble pas s'arrêter puisque le taux d'endettement prévu en 2017 serait de l'ordre de 64%. Cela donne la mesure, à terme, de l'envolée du remboursement du service de la dette, particulièrement des emprunts obligataires contractés ces dernières années sur les marchés internationaux. Leurs maturités ne cessent de se réduire et leurs coupons d'augmenter. Les statistiques de l'endettement donnent vraiment froid dans le dos. Celles qui concernent l'endettement extérieur peuvent glacer d'effroi. L'encours de la dette extérieure a pris une préoccupante ampleur. Il est passé de 15,6 milliards de dinars en 2010 à 36,4 milliards de dinars en 2016 et une estimation de 42,4 milliards en 2017. Par contre coup, on en paie le prix. Le service de la dette extérieure qui évoluait autour de 2 milliards de dinars depuis le début de cette décennie va dépasser les 3 milliards de dinars à partir 2017 selon les estimations établies par le ministère des Finances. L'intérêt de la dette extérieure va presque doubler à partir de cette année, passant de 600 MD à 1100 MD à partir de 2017.
Et ce n'est pas tout. En effet, il convient de savoir que non seulement le pays s'endette de plus en plus, mais le remboursement de cette dette évolue en fonction du taux de change. Selon les données du ministère des Finances, un accroissement de 10 millimes de l'euro impliquerait une surcharge de 67 MD de l'encours de la dette et 2,3 MD du service de la dette. Un accroissement de 10 millimes du dollar US entrainerait une hausse de l'encours de 50 MD et du service de la dette de 3 MD. S'agissant du yen, une variation de 100 millimes à la hausse du cours de cette monnaie induirait une augmentation de 25 MD de l'encours et 2,5 MD du service de la dette. Sachant que notre dette extérieure est libellée, respectivement, à hauteur de 40% en euro, 32% en dollars et 14% en yen, à vos calculatrices.
Emprunt Samouraï : 270 MD de commissions, hors taux d'intérêt ! Le risque que le pays entre dans une spirale infernale d'endettement est devenu réel. A cet égard, le recours du pays aux marchés financiers internationaux est symptomatique du risque. 75% des emprunts levés sur le marché yankee durant ces 20 dernières années ont été opérés au cours de ces 3 dernières années. Sur 2,2 milliards d'euro empruntés sur le marché européen durant la même période, 38% environ ont été levés durant la seule année 2017 (850 millions d'euros). Le quart des emprunts obtenus du marché Samouraï en 23 ans a été acquis entre 2012 et 2014.
Le plus grave, c'est que tous les emprunts opérés sur ces marchés ont soulevé des polémiques. L'émission obligataire sur le marché européen effectuée en début d'année 2017 n'a pas été satisfaisante en termes de montant par rapport à ce qui était escompté et en termes de taux. Il faut rappeler également la controverse provoquée lors de l'emprunt de 1 milliard de dollar en 2015 ayant amené la Banque centrale à s'expliquer sur les raisons d'un tel montant, alors qu'initialement, l'émission obligataire sur le marché yankee était fixée à un plafond de 750 millions de dinars.
Quant aux émissions obligataires effectuées sur le marché Samouraï, en 2012, 2013 et 2014, elles fleurent un étrange parfum de détournement. Car, sur un total d'emprunt, qui plus est garanti par la Banque japonaise pour la coopération internationale (JBIC) d'un montant de plus de 1670 MD, seuls un peu plus de 1400 MD sont rentrés dans les caisses de l'Etat. Les 270 MD restant sont passés à la trappe des « frais de garantie et autres dépenses ». Cela représente près de 18% du total de l'emprunt. Pire, on constate que le taux de la commission sur l'emprunt dépasse le taux d'intérêt de l'emprunt (Voir document-joint).
Il faudrait bien que la Banque centrale s'explique sur cette « curiosité » qui tend à accréditer l'idée d'une dette odieuse. D'autant plus que le pays devra rembourser en 2022,2023 et 2024 respectivement 25, 22,4 et 50 milliards de yen avec un taux de change dont je laisse le lecteur imaginer le niveau compte tenu de l'évolution actuelle du taux de change du yen.