Partout dans le monde, des trains déraillent ou entrent en collision mais cela reste rare. En Tunisie, en revanche, les choses sont différentes. A force d'accidents et d'incidents successifs, nombreux sont ceux qui évitent aujourd'hui de prendre le train lui préférant des moyens alternatifs dont le co-voiturage qui fait fureur surtout auprès des jeunes … Hier à Dahmani, au niveau de la station Zouarine, un train a déraillé. 29 passagers ont dû être transportés à l'hôpital. Bilan de l'accident : des blessures légères, aucune grave. Quelques jours plus tôt, un train fou, sans conducteur, est parti à la dérive seul sur une des lignes desservant la banlieue sud. Le train N°117 de 7h du matin desservant la banlieue sud qui va de Tunis à Erriadh à eu un problème technique au niveau des portes, près de la station Ezzahra. Le chauffeur est descendu pour tenter de réparer la panne et c'est là que le train a redémarré sans chauffeur. Informée de l'incident, la salle des opérations centrale a décidé de faire dévier le train, qui devait entrer dans le hangar vers la ligne 5 qui va à Sousse, et demandé à tous les agents des stations de protéger les croisements tout au long de la ligne en question. Privé d'électricité, le train s'est arrêté seul après la station de Fondok Jedid. Là encore, le pire a été évité de justesse. Plus de peur que de mal…jusque-là, mais jusqu'à quand ?
Commentant l'incident du train sans chauffeur, le ministre du Transport, Radhouane Ayara, a admis la responsabilité de l'agent de la SNCFT et l'erreur manifeste, présentant ses excuses «sincères» aux passagers. M. Ayara a spécifié qu'un rapport préliminaire a été élaboré le jour même de l'incident et qui pointe une erreur humaine isolée du conducteur. Il a ajouté que les locomotives sont récentes et acquises en 2012 et qu'elles répondent à toutes les normes de sécurité, précisant que le conducteur a non seulement ignoré les consignes de ne pas quitter sa cabine mais avait aussi manipulé des systèmes de sécurité qui auraient dû arrêter net le train.
Etrangement, Issameddine Fitati le conducteur de train licencié par la SNCFT en 2016 pour avoir dénoncé des dossiers de corruption, puis réhabilité par le ministre du transport, avait également dénoncé des défaillances dans les cabines mettant en danger la sécurité des passagers. Dans une vidéo qu'il a enregistrée et qui a été dévoilée dans l'émission de Hamza Belloumi, El Hak Maak, Issameddine Fitati avait particulièrement pointé l'absence de « veille automatique », un mécanisme qui permet au train de s'arrêter automatiquement si le chauffeur lève le pied de la pédale. Sur la vidéo filmée par le conducteur, en 2014, la pédale elle-même n'existe pas, alors que le conducteur doit alterner les secondes où il appuie dessus et les secondes où il peut reposer son pied. Quoi de plus normal donc qu'un train continue de rouler si le chauffeur dort, est pris d'un malaise ou quitte carrément sa cabine. Issameddine Fitati avait alors affirmé que la pédale en question n'existe pas sur certains trains et ne fonctionne pas sur d'autres, accusant directement la direction d'avoir permis cette aberration. «Un enquête judiciaire, administrative et technique a été ouverte. C'est la première fois que ce genre d'incident arrive en Tunisie et il est le résultat d'un chevauchement d'erreur», a précisé, pour sa part le ministre du Transport, Radhouane Ayara soulignant que «l'incident a été traité avec tout le professionnalisme nécessaire avec déviation du train de sa ligne initiale, coupure de l'alimentation électrique et sécurisation des intersections». Avait-on besoin de recourir à de telles mesures si le train « tout neuf et répondant aux normes de sécurité », l'était vraiment ? M. Ayara s'est voulu rassurant, expliquant qu'il ne s'agit que d'un incident isolé, que les mesures de sécurité seront renforcées, qu'une note officielle sera transmise aux chauffeurs leur interdisant de quitter le poste de pilotage et que des agents seront mis sur les quais pour vérifier la fermeture des portes… Dans des trains « neufs », si un conducteur quitte sa cabine la machine continue à rouler et les portes ne se ferment plus… cherchez l'erreur…
Suite à l'incident du train fou, le service de sûreté ferroviaire a démarré officiellement ses activités, le 3 août 2018. Les agents, au nombre de 60, ont pris lors postes dans tous les trains et toutes les gares. Un effectif qui sera renforcé par 40 agents, indique la SNCFT. Une mesure qui a pour objectif de renforcer le dispositif de sécurité dans les trains et gares, après les multiples agressions et incidents survenus. Radhouane Ayara, ayant promis aux citoyens plus de sécurité dans les trains et les gares. Suite aux incidents successifs Les employés de la Société nationale des chemins de fer tunisiens (SNCFT) avaient annoncé, via leur syndicat, une grève prévue le 2 août 2018, avant de décider de la reporter. En cause, la situation dramatique de la société depuis la suspension de la ligne 13 et « des tentatives pour porter atteinte aux chemins de fer tunisiens ».
Déraillement, erreur humaine, traficotage de matériel, tous ces incidents nous revoient à la situation dénoncée par les cheminots tunisiens et par les passagers. Des problèmes de matériel, des trains non conformes, des transactions douteuses, corruption, excès de vitesse et rails non entretenus. Il y a sans doute des mesures qui seront prises et annoncées pour remédier à la situation, toutefois le mal commence à imprégner irrémédiablement l'inconscient des usagers de trains. Déjà que les conditions à bord se détériorent de jour en jour, que les passagers avec leurs tickets se retrouvent souvent debout dans des wagons aussi froids qu'un congélateur ou aussi chauds qu'un four, ou encore sales au point de faire de leur voyage un vrai calvaire. Ils sont, ainsi, de plus en plus nombreux à bouder les trains pourtant moyen de transport qui fût très apprécié à une certaine époque….