L'ancien chef du gouvernement, Hichem Mechichi, a réagi à la récente rencontre entre Kaïs Saïed et le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT), Fethi Zouhaier Ennouri, mercredi 20 août. Dans un statut publié sur son compte Facebook, ce vendredi 22 août 2025, il a estimé que cette image « l'a renvoyé à une réalité plus dérangeante » : celle d'institutions autrefois fières de leur indépendance se soumettant aujourd'hui sans résistance aux diktats du pouvoir. Il a rappelé qu'au plus fort de la crise du Covid-19, en 2020, son gouvernement avait proposé que la BCT participe directement au financement du déficit, ce qui avait suscité un rejet catégorique. « Les gardiens du temple crièrent alors à l'hérésie », a-t-il écrit, avant de souligner que les arguments liés à la situation exceptionnelle, ainsi que les exemples étrangers comme la Banque d'Angleterre ou la BCE, n'avaient pas suffi à convaincre. L'ARP avait fini par voter, en décembre 2020, une dérogation strictement encadrée permettant à la BCT d'accorder jusqu'à 2,8 milliards de dinars, sans intérêts, remboursables sur cinq ans.
Hichem Mechichi a ensuite relevé qu'après le 25 juillet 2021, « le concept de l'indépendance de la BCT, hier sacralisé comme un dogme, a été requalifié (…) en une menace contre l'unité nationale ». Il a critiqué directement le président Kaïs Saïed, estimant que ce dernier affectionnait « les petites phrases et multipliait les jeux de mots » pour justifier la confusion entre indépendance et autonomie de la banque centrale. Selon Mechichi, cette approche relevait d'un « régime folklorique » qui transformait les institutions en instruments au service du pouvoir et de ses « prétendues solutions pour l'humanité ».
Il a rappelé qu'en décembre 2024, l'ARP mise en place par Kaïs Saïed avait adopté un texte autorisant la BCT à octroyer au Trésor jusqu'à sept milliards de dinars, sans intérêts, remboursables sur quinze ans, une décision qu'il a qualifiée de « cadeau plus de deux fois supérieur en montant et trois fois plus étalé en termes de durée ». Il a dénoncé la bienveillance militante accordée par la nouvelle élite à ces entorses à l'indépendance de la BCT. En conclusion, Hichem Mechichi a appelé à tirer les leçons de ces épisodes, affirmant que « l'indépendance de la banque centrale et de la justice, la démocratie, le respect des droits fondamentaux, la liberté de la presse, le vivre-ensemble…, doivent tous être au cœur du débat ». Il a estimé que « la page de l'absurde sera tôt ou tard tournée » et qu'il viendra ensuite « le temps de la vraie reconstruction ».