Les gesticulations et les acrobaties auxquelles s'est adonné le député Imed Daïmi hier, 22 janvier 2019, devant Myriam Belkadhi auraient été amusantes si ce n'était la gravité de l'affaire qui l'a amené sur une chaîne de télévision qu'il avait pourtant dénigré. Imed Daïmi est venu à la télévision plaider sa cause, à une heure de grande écoute et dans une émission réputée. Si seulement tout ceux qu'on accuse ou que l'on a accusé de corruption et de détournement pouvaient avoir cette fabuleuse tribune pour manipuler l'opinion publique ! Quoi qu'il en soit, Imed Daïmi s'est vu offrir cette opportunité, pour défendre ses frères et sa famille car il faut préciser que Imed n'est accusé de rien dans le rapport élaboré par la Ctaf (Commission tunisienne des analyses financières). Mettez-vous à sa place, Myriam Belkadhi vous donne une magnifique tribune et vous profitez de votre immunité parlementaire, ce serait bête de ne pas profiter de l'occasion pour défendre la fratrie et aligner les contre-vérités.
Evidemment, et comme cela était prévisible, Imed Daïmi s'estime victime d'un sombre complot ourdi par des forces occultes avec la complicité de Mabrouk Korchid et de Business News. En bon CPR qui se respecte, Imed Daïmi souffre de complotite aigüe. Un truc assez pratique pour pouvoir dire que c'est toujours la faute aux autres et qu'il est blanc comme neige. D'ailleurs, c'est un complot d'une exceptionnelle efficacité qui lui avait fait faire entrer un faux député à l'ARP lors de la toute première séance plénière d'après les élections. D'ailleurs, on ne sait toujours pas grand-chose sur cette affaire qui avait pourtant été transférée à la justice…
Bref, revenons à l'affaire du fameux rapport de la Ctaf qui adresse certains soupçons aux frères Daïmi dans la gestion de certaines associations en relation avec d'autres organismes agissant d'outre-mer. Imed Daïmi, qui n'est pas incriminé pour quoi que ce soit, faut-il le rappeler, dit tout simplement que le rapport n'existe pas. Donc, il aurait été fomenté de toutes pièces pour attaquer l'élu intègre et honnête à travers sa famille et ses frères. Mais comme dirait Galilée, « Et pourtant, elle tourne ! », car le rapport est tout à fait authentique puisque même la Ctaf a démenti catégoriquement « la publication par ses services d'un document ou informations au sujet d'une quelconque association active en Tunisie ». La publication M. Daïmi, pas l'existence. Cela fait quand même une nuance de taille. Chose qu'il confirme lui-même puisque le fameux rapport qui n'existe pas aurait été fuité par la présidence du gouvernement. Le morceau est un peu trop gros. Et puis, en bonne logique, si toutes les forces occultes qui complotent contre Imed Daïmi avaient voulu lui porter atteinte en se lançant dans un crime de faux et usage de faux, la moindre des choses auraient été de l'incriminer lui ou de grossir les montants.
Imed Daïmi et ses semblables adorent quand les gens qu'ils détestent sont soupçonnés de corruption mais ne supportent pas quand les yeux de l'Etat et de la justice se tournent vers eux. C'est un phénomène que l'on observe chez tous les chantres de la transparence. Moncef Marzouki est mis en cause pour des dépenses indues à la présidence ? Une rumeur produite par la fameuse « chambre des opérations » qui le poursuit depuis des années. Salim Ben Hamidène est mis en cause dans l'affaire de la BFT ? C'est un complot qui vise à salir les vrais révolutionnaires. Sihem Ben Sedrine gère mal l'IVD et a fait capoter le processus de justice transitionnelle ? C'est la contre-révolution qui a peur que les vérités soient révélées et donc s'attaque à l'icône Ben Sedrine. Donc, grosso modo, de la pleurniche et du pathos pour échapper à la justice et pour jouer à fond la victimisation. Par contre, quand il s'agit des Mabrouk ou de Kamel Letaïef ou de n'importe quel homme d'affaires, là la justice se doit d'être aveugle et de faire son travail quoi qu'il en coûte. Là ils commencent à philosopher sur les apparitions télé des avocats et sur le fait que les procès ne doivent pas avoir lieu dans les médias. Faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais. Le plus douloureux là-dedans c'est qu'il existe encore des gens, particulièrement actifs sur Facebook pour insulter et dénigrer, qui croient à ces balivernes et qui se laissent manipuler comme de vulgaires marionnettes.
Devant la polémique soulevée par cette affaire, c'est au procureur de la République de bouger et de faire la lumière sur les soupçons mentionnés dans le rapport de la Ctaf. Reste à savoir si cette dernière l'a transmis à la justice ou pas. De toutes manières, il serait judicieux de la part de Imed Daïmi, qui s'estime lésé par ce rapport, de porter plainte devant la justice afin de déterminer les responsabilités. A condition, bien sûr, que celui-ci ne se cache pas derrière son immunité parlementaire si le vent de la justice ne va pas dans sa direction.