En Tunisie, la problématique du laminage de la classe moyenne se pose, aujourd'hui, avec acuité. Estimée à 84% en 1984 et à 70% de la population en 2010, la classe moyenne tunisienne serait en régression. Elle ne représenterait aujourd'hui que 53% de la population. Nidhal Ben Cheikh, directeur du Centre de recherches et d'études sociales, a, récemment, déclaré qu'en voyant la hausse de l'inflation, celle de l'endettement des ménages et la prolifération de l'emploi informel, qui prive une partie de la classe moyenne de son droit à la couverture sociale, on constate que cette catégorie est aujourd'hui « sérieusement menacée ». Pour sa part, le ministre des Finances, Elyes Fakhfakh, a annoncé que la classe moyenne tunisienne regroupe 1,9 million de travailleurs. 60% d'entre eux perçoivent un salaire inférieur à 800 dinars par mois, et 33% touchent un salaire mensuel de moins de 400 dinars. Auditionné mardi dernier au Bardo par la commission des finances, M. Fakhfakh a par ailleurs souligné que le nombre de chômeurs s'élève à 630,000, affirmant que ce nombre serait égal à celui des travailleurs exerçant dans le secteur informel. Quant aux personnes actives dans les professions libérales, leur nombre s'élève à 700,000 agents. La difficulté à déterminer précisément le périmètre de la classe moyenne provient, selon l'universitaire tunisien Baccar Gherib, du fait que cette appellation non contrôlée évoque plus souvent une catégorie fourre-tout ou un slogan politique qu'un concept socio-économique répondant à un minimum de rigueur scientifique. On ajoute à cela que le salaire par individu n'est pas le meilleur indicateur pour déterminer la classe moyenne. Le revenu pour un célibataire est différent de celui d'un couple, ou d'une famille. A cet effet, le pouvoir d'achat serait un indicateur plus pertinent. Selon la Banque mondiale, la Tunisie affichait en 2012 le meilleur indice de parité du pouvoir d'achat au Maghreb. Avec 9.360 dollars, elle devance l'Algérie avec 7.550 dollars, le Maroc avec 5.040 dollars et la Mauritanie avec 2.520 dollars. Les données concernant la Libye ne sont pas disponibles pour cette année. Mais avec un taux d'inflation en hausse et des indicateurs économiques dans le rouge, le pouvoir d'achat en peine.