«Les balles qui ont atteint les victimes de l'attentat de Sousse proviennent de la même arme», affirme le médecin légiste Moncef Hamdoune Au départ, M. Saïd Aïdi, ministre de la Santé, épaulé par ses lieutenants-administrateurs, a voulu faire valoir la grande mobilisation médicale et logistique qui a eu lieu suite à l'attentat terroriste de Sousse dont le bilan définitif est de 38 morts et 39 blessés parmi des touristes de différentes nationalités. Deux semaines après ce drame, le ministre semble intéressé d'y revenir, afin de mettre les points sur les i et répondre, par-là même, aux critiques lancées à son encontre et à son département pour avoir tardé à identifier les victimes et finaliser les analyses génétiques propres aux cadavres concernés. Voulant défendre sa cote et l'image de son staff, M. Aïdi n'a pas tari d'éloges sur les efforts déployés pour le transport des victimes et la prestation des soins nécessaires aux blessés tout au long des opérations de secours. En fait, rappelle-t-il, urgentistes et ambulanciers ont été au rendez-vous sur le théâtre du crime, où tous les moyens ont été, alors, mis à la disposition dès les premières minutes qui ont suivi l'attentat. Et l'admission des sinistrés dans les hôpitaux publics et les cliniques privées de la place a été accompagnée d'un élan de soutien et de solidarité citoyenne, souligne M. Riadh Boukef, chef du service d'urgence au CHU « Sahloul » de Sousse. Là où une cellule de soutien et de prise en charge psycho-thérapeutique a été mobilisée à leur chevet. « Quoi qu'on en dise, nous sommes parvenus à bien gérer la crise en ces circonstances exceptionnelles», affirme le ministre, sans pour autant relever que toutes les dépouilles ont été rapatriées, sauf une de nationalité russe qui ne l'est pas encore. Sinon, toutes les procédures d'autopsie et de prélèvements faits pour vérification d'identités ont été accomplies contrairement à ce qui a été dit, dans les délais, indique Pr Moncef Hamdoune, chef du service de médecine légale à Charles Nicolle de Tunis. Selon lui, ce sont des actes médicaux qui ne tolèrent aucune erreur. De même que les études balistiques ont montré que les coups de feu ont été uniquement tirés à la kalachnicov, à balles de même calibre. Un fonds d'appui de la médecine de spécialité Toutefois, personne ne peut nier que les deux attaques sanglantes de Sousse et du Bardo ont levé le voile sur la vérité d'un secteur de santé en mal de restructuration. Le ministre le reconnaît bien depuis qu'il est arrivé au ministère. Et c'est pourquoi il a accordé une priorité à la couverture sanitaire, à travers la création d'un fonds d'appui à la médecine de spécialité dans la Tunisie profonde. Ce sont déjà des mesures d'urgence dont la concrétisation sera décidée dans le cadre de la stratégie nationale de réforme du secteur. Dans les semaines à venir, promet-il, une consultation élargie dans ce sens aura lieu auprès du public. Sur cette lancée, le PDG de l'Office national de la famille et de la population (Onfp), Dr Ridha Gatâ, s'est étalé sur la nature de ce fonds, son financement et ses modes de fonctionnement. Il s'inscrit dans la case des « fonds spéciaux » dont le financement est soumis à la loi de finances, seul cadre légal lui favorisant la couverture de ses interventions. Son objectif est de doter tous les hôpitaux régionaux dans le pays de 287 médecins spécialistes répartis sur les zones dites prioritaires. L'ultime but étant de réduire, un tant soit peu, les inégalités sociales en matière de santé de base, notamment les prestations fournies à la mère et l'enfant, à même de limiter le taux de mortalité à la naissance. La présence des médecins spécialistes de manière permanente jour et nuit pendant toute la semaine sera de nature à combler le vide enregistré à ce niveau. Et Dr Gatâ, à qui revient la charge de gestion de ce fonds, n'a pas manqué de faire montre d'un hiatus démographique, si large soit-il, fort remarqué en termes de couverture sanitaire. A l'échelle des régions, certes, il y a un déficit profond. Et les chiffres sont frappants: le Grand-Tunis rafle, ainsi, le gros lot, avec 186 médecins spécialistes pour 100 mille habitants, suivi par le gouvernorat de Sfax avec 115 couvrant le même périmètre démographique. Et le fossé se creuse de plus en plus à l'intérieur du pays, où l'on recense à Tataouine seulement 12 spécialistes/100 mille habitants, 14 à Sidi Bouzid, 15 à Siliana et 87 à Bizerte. Statistiques à l'appui, 56 % de nos médecins sont des spécialistes, soit un taux jugé élevé par rapport au staff opérant dans le secteur privé. Et environ 3000 placés dans les hôpitaux publics. Reste qu'un millier de médecins spécialistes sont répartis sur les régions intérieures et frontalières. 35 mille visites d'inspection Le décalage en services médicaux n'est plus à démontrer. Donc, il fallait attendre ledit fonds pour que cette situation soit révisée. Il y a là un besoin pressant dans les spécialités de gynécologie, pédiatrie, chirurgie générale, anesthésie et réanimation, radiologie et bien d'autres absentes de la carte des régions. Ainsi, Tabarka, Kasserine, Metlaoui, Kébili, Nafta, Tatouine, Médenine, Béja, Siliana, Kairouan, Zarzis et Kerkennah sont les régions concernées par les interventions de ce fonds avec des investissements estimés à 26 millions de dinars. Mais, la généralisation de la médecine de spécialité pourrait, en soi, poser problème, faute d'infrastructure de bonne facture. D'autant plus que l'affectation de certains d'entre eux pour aller travailler dans ces régions avait, à un certain moment, fait déborder le vase et susciter la colère des spécialistes. Pour s'en sortir, M. Gatâ a relevé que l'adhésion à ce fonds sera facultative, de manière à donner la priorité à ceux qui travaillent dans leurs régions, et en second lieu les médecins spécialistes dans les CHU exerçant en dehors des zones prioritaires. Et ainsi de suite, pourvu qu'il y ait vraiment volonté de s'y impliquer. Volet contrôle sanitaire des produits agroalimentaires, M. Mohamed Rabhi, de la direction d'hygiène et protection du milieu, a recensé qu'au total, 35 mille visites d'inspection ont été, jusque-là, effectuées. Les interventions de plus de 300 équipes de contrôle ont touché tout le territoire national, dans les locaux commerciaux ouverts au public. Bilan d'infractions : fermeture de 78 locaux, 552 PV rédigés et saisie de 47 tonnes de produits classés périssables et censés être de grande consommation en ce mois saint (pâtisserie, formage, fruits secs..). Les sanctions des contrevenants sont dues essentiellement au manque d'hygiène, dépassement de la date limite de fabrication ou non-conformité aux normes de réfrigération. Santé : grève annulée De son côté, le chef du cabinet au ministère de la Santé, M. Sofiène Bouraoui, a mis l'accent, dans son intervention, sur le retour à la table des négociations réunissant, de nouveau, le ministère et le syndicat des agents de la santé relevant de l'Ugtt. Cela signifie que la grève sectorielle prévue, aujourd'hui et demain, a été, finalement, annulée. Cette reprise est venue suite à une série de rencontres et de séances de travail mixtes tenues au siège du ministère des Affaires sociales dont la dernière en date a eu lieu lundi dernier. Et M. Bouraoui d'ajouter que ce rapprochement des points de vue a abouti à un accord bilatéral sur les revendications dont la satisfaction relève de la compétence du ministère de tutelle, en l'occurrence la prime de transport des malades et l'application de l'article 2 de la fonction publique. Alors que les autres revendications (rémunération des jours fériés et bien d'autres) ont été reportées pour davantage d'examen entre les deux parties.