Les patrons ont pris leur courage à deux mains et proposent une feuille de route en huit points pour sauver l'économie du pays. Reste que leurs propositions tirent trop la couverture du côté des investisseurs et hommes d'affaires qui ont trop attendu pour réagir. Comme l'on s'y attendait, l'initiative annoncée, jeudi 9 juillet, par l'Utica, sous le titre : «L'initiative du secteur privé : une année pour sauver l'économie du pays» a suscité un grand débat entre ceux qui estiment que l'heure est à un sursaut national qui s'impose de jour en jour et à une mobilisation générale qui englobe tout le monde, d'une part, et ceux, d'autre part, qui sont convaincus que les patrons exploitent à leur profit la situation sociale prévalant à l'heure actuelle pour imposer une année sans grèves ni mouvements sociaux, «le but étant que la machine économique grippée il y a près de cinq ans reprenne mais aux conditions que posent les hommes d'affaires et les promoteur économiques». En attendant que la feuille de route de l'Utica comportant huit points essentiels soit clarifiée davantage et en attendant que le projet de loi concocté au palais de Carthage sur la réconciliation de la Tunisie avec ses promoteurs et investisseurs inopérants depuis la révolution soit révélé dans ses détails puis adopté au palais du Bardo, l'on se demande comment les syndicalistes de l'Ugtt ont réagi à l'initiative de leur ancienne alliée Wided Bouchamaoui et également comment certains acteurs du paysage politique national jugent l'appel de l'Utica à une année blanche en matière de grèves en échange d'une possible amélioration du pouvoir d'achat des travailleurs au cas où le taux de croissance attendu irait en grimplant. Parallèlement, le gouvernement engage des négociations avec l'Ugtt et l'Utica dans le but de majorer le Smig (salaire minimum industriel garanti) et le Smag (salaire minimum agricole garanti) en prévision de l'année 2015. Une action qui annonce une vérité que personne n'est en mesure de contester : les salaires dans la fonction et le secteur publics augmenteront pour le compte de l'année 2015 contrairement à ceux qui prédisent que le gouvernement cherche à convaincre les responsables de l'Ugtt d'accepter que 2015 soit une année blanche au vu des difficultés par lesquelles passe le pays. On revient aux vigiles Pour le Pr Mounir Kachchoukh, membre du conseil des secrétaires généraux du Front populaire, la question qui se pose est la suivante : «Pourquoi l'Utica a choisi ce moment précis pour annoncer son initiative ? Durant les dernières années, elle a suivi la méthode de la classe morte, se contentant de défendre ses adhérents empêchés de voyager. Elle n'a rien fait pour encourager ses adhérents à investir dans les régions déshéritées ou à s'installer dans les délégations dites prioritaires. En fait, son comportement est à considérer comme une grève non déclarée face à l'investissement. Ce qui a effrayé les investisseurs étrangers et les a empêchés de retourner en Tunisie en constatant que les investisseurs nationaux et leur organisation boudent leur propre pays». Il ajoute : «En réalité, l'initiative de l'Utica est motivée par les attentats terroristes du Bardo et de Sousse. Elle vise à extorquer à l'Etat plus de faveurs et d'acquis en appelant au secours d'un secteur (le tourisme) dont les responsables ne payaient ni la Sonede ni la Steg bien qu'ils bénéficient d'un soutien de la part des pouvoirs publics. Ces mêmes pouvoirs, faut-il le souligner, répondent aux instituteurs que les caisses de l'Etat sont vides et s'ingénient à répondre aux desiderata des hôteliers. Aujourd'hui, on demande les mêmes faveurs pour les autres secteurs et ces faveurs seront définies par des comités spécifiques à chaque secteur, ce qui veut dire que l'Etat va encore payer. D'autre part, l'initiative exige la sécurisation des entreprises face à ceux qui feront obstruction au travail, un terme gentil pour éviter la colère des syndicalistes. C'est le retour des vigiles qui seront armés et qui auront pour tâche essentielle de s'opposer aux revendications sociales».