Recurrent sujet que celui des accidents, mais on ne peut s'empêcher d'y revenir, car il y a des choses intolérables qui se passent sur nos routes. La mort de l'étudiante sur la route de Nabeul est un exemple frappant de cette délinquance criminelle qui sévit aussi bien en milieu urbain que sur les routes intérieures. La responsabilité des conducteurs, des piétons, des cyclistes n'est pas à démontrer, mais encore faut-il qu'on réagisse et à la mesure de la gravité de ce phénomène, en étant sévère avec les hors-la-loi, et ce, en donnant à cette loi sa pleine dimension. Les accidents de la route dans notre pays sont depuis longtemps un sujet récurrent. On en parle tous les jours et surtout pendant la période estivale dont un mois a coïncidé avec le mois du jeûne. Ce mois est, lui aussi, connu pour être des plus mortels sur nos routes. L'été est donc la période au cours de laquelle le nombre d'accidents augmente et connaît son pic par rapport au reste de l'année. Mais le plus grave dans tout cela, c'est surtout le nombre de morts consécutifs à ces accidents, qui deviennent de plus en plus mortels. Les campagnes menées chaque saison de vacance auprès des usagers de la route (piétons, cyclistes, conducteurs) n'ont rien changé. L'Observatoire national de la circulation dont l'activité n'est plus ce qu'elle était depuis des années (faute peut-être de moyens) publie régulièrement des statistiques sur les accidents, les dégâts qui en découlent en vies humaines ou en matériels. Les chiffres donnés sont alarmants et ne présagent aucune amélioration de la situation. Au contraire, celle-ci ne fait que s'aggraver pour devenir intolérable. Mais pourquoi en est-on arrivé là? Qui est responsable de cet état? Et n'y a-t-il aucun moyen pour y remédier? Moi qui faisais partie de l'Observatoire national de la circulation du temps du très dynamique colonel Ben Aïssa, j'ai toujours entendu dire que les premiers responsables sont les usagers de la route — tous sans exception —. On ne respecte pas le Code de la route et on fait tout pour enfreindre la loi. C'est un état d'esprit qu'on vérifie chaque jour à ses dépens. La vitesse qui demeure la cause principale des accidents mortels n'est respectée dans sa limitation que par une minorité de conducteurs. La majorité écrasante s'en moque, surtout ces grosses cylindrées, berlines aux quatre roues motrices. Sur la route, elles vous attaquent carrément de derrière avec cet esprit bien commun aux Tunisiens «Otez-vous de là que je m'y mette»! Les chauffards des poids-lourds ne sont pas eux en reste, notamment les plus jeunes d'entre eux qui font de leurs camions une sorte de jouets ! Ils sont la cause de tant de malheurs, d'autant qu'aucun respect des normes de leur chargement n'est observé. Il arrive souvent qu'un transporteur de briques surchargé perde le contrôle de son engin au rendez-vous d'un petit virage pour que tout le chargement soit déversé sur la chaussée et malheur au véhicule se trouvant derrière ou à côté. Les mesures de sécurité pour ce genre de transport sont rarement respectées et on les laisse pourtant circuler! Vitesse et non-respect des mesures de sécurité On les laisse circuler? En effet, ces engins qui peuvent à tout moment être la cause d'une catastrophe sont tolérés dans l'état où ils sont. Allez savoir la raison? Il y a sans doute du côté de l'application de la loi un grain qui grippe la machine. Cela nous amène à parler de cette loi bafouée et même piétinée au vu et au su de l'autorité qui semble être quelque peu dépassée par l'ampleur de ce phénomène, dont il faut chercher les origines dans cet incivisme qui est le trait commun de mes chers compatriotes, qui font malheureusement tout dans l'excès, tout en se sachant dans le tort ! Et c'est là où réside tout le mal car on persiste et on signe. Le conducteur, le piéton, le cycliste, tout le monde se moque de la loi en toute conscience. C'est le règne de l'anarchie totale dans le milieu urbain comme sur les grands axes routiers où les accidents mortels sont encore plus nombreux. Il y a plus au cours de la dernière semaine du mois de juillet entre Hammamet et Nabeul, un jeune conducteur a été la cause de la mort d'une étudiante qui conduisait sa voiture et de la blessure de deux autres qui l'accompagnaient. Selon des témoins, le jeune homme cherchait à les intéresser par une certaine manœuvre, ce qui avait fait perdre à la victime son équilibre et celui de sa voiture qui avait fait plusieurs tonneaux. Voilà où nous en sommes aujourd'hui parce qu'on croit pouvoir tout faire, sur la route ou ailleurs, d'ailleurs ! Ce jeune est un vrai criminel qu'on devra juger sévèrement, mais on ne sait si quelqu'un avait eu la présence d'esprit et la rapidité de relever le numéro de la plaque minéralogique de son véhicule. J'ai pris cet exemple de conducteur criminel pour que l'on sache le degré d'incivisme atteint par certains Tunisiens, qui se permettent les comportements les plus répréhensibles en conduisant, tels ceux qu'on voit terminer leur beuverie en rentrant chez eux et jeter par la fenêtre ensuite les cannettes de bière sans se soucier le moins du monde du danger que pourrait constituer un tel geste si par malheur un véhicule se trouvait à côté ou juste derrière. Ce que je déplore c'est l'absence de contrôle ou presque sur nos routes. Il m'arrive souvent de faire des centaines de kilomètres dans le pays sans constater cette rigueur exigible des agents de la circulation qui implique qu'on doit se faire moins tolérant et plus sévère pour arrêter bien des scènes qui ont pour théâtre nos routes. Il y a sans doute ces brigades spéciales qu'on retrouve dans quelques rond-points et carrefours, mais c'est aux agents de la circulation — police et garde nationale — de se faire remarquer le plus afin de donner à l'autorité sa pleine signification en faisant appliquer la loi, loin de tout sentiment. La loi est faite pour être appliquée, elle est faite pour dissuader la délinquance quelle qu'elle soit, et celle des routes est l'une des plus graves. La loi est faite pour nous protéger nous tous des abus de nous-mêmes et des autres. Ainsi, une des causes de la recrudescence du nombre d'accidents, surtout mortels, est le peu de cas qu'on se fait d'un code qui, d'après le constat, est dans le frigo, ou peut-être qu'on oublie qu'il n'y a jamais eu un code de la route dans ce pays. Le citoyen, le vrai, a des droits et exige qu'ils lui soient garantis et assurés. Entre autres droits de sévir contre ces bandits qui sèment la mort sur nos routes et dans nos villes. Si on ne le fait pas, on est complice et on doit ainsi répondre de cette insouciance et de ce peu de cas qu'on se fait de l'importance de la loi dans la vie d'un peuple. L'Etat devra assumer ses responsabilités envers ces citoyens, ceux-ci lui ont accordé leur confiance pour gérer leurs affaires et les protéger de toute forme de délinquance. Pour en finir, je ne peux me retenir de dire qu'à la question à qui incombe la responsabilité de cet état ? Je ne peux me retenir de répondre qu'elle est partagée entre les contrevenants, les hors-la-loi, et l'autorité chargée de veiller sur la sécurité des citoyens, qui n'est pas dans l'obligation de faire des compromis ou des concessions à ceux qui méritent d'être sanctionnés.