Des candidatures sont en cours d'examen, d'autres sont encore attendues. Pourtant, l'Instance doit naître, s'il le faut au forceps, avant la fin de l'année en cours Faute d'un nombre suffisant de candidats aux deux postes à pourvoir, magistrats retraités et délégués de protection de l'enfance, l'Instance nationale de prévention de la torture n'a pas encore vu le jour, bien que la loi l'organisant ait déjà été promulguée depuis octobre 2013. Deux ans plus tôt, la Tunisie est parvenue, de bon gré, à signer le protocole facultatif relatif à la lutte antitorture et aux mauvais traitements dans les centres de détention et les établissements pénitentiaires. Au regard du Conseil de l'Europe et du Haut commissariat des droits de l'Homme relevant des Nations unies, son adhésion est un engagement officiel à tenir promesse. Et tout manquement à ce devoir humaniste risque d'exposer le pays post-révolution à des critiques sans fin. Voire à le reclasser en bas de l'échelle, ce qui pourrait affecter l'image d'une telle instance avant qu'elle ne soit née. Et partant, «l'accélération de sa mise en place demeure plus que nécessaire, surtout en ces temps où les droits les plus élémentaires des détenus semblent remis en cause et que leur protection pose encore problème...», évoque M. Badreddine Abdelkafi, à qui est confiée la présidence de la commission spéciale des élections au sein de l'ARP chargée d'examiner les candidatures déposées au titre de ladite instance qui devra comprendre 16 membres. Son bureau aussi hétérogène que possible se compose d'un éventail de corporations: avocats, médecins psychiatres, activistes de la société civile, universitaires, juges retraités et délégués de la protection de l'enfance. Ces deux dernières catégories professionnelles font, jusque-là, défaut, laissant traîner en longueur les procédures d'installation d'un mécanisme préventif de toute forme de torture digne de ce nom. L'ultime phase Au terme d'une série de réunions, les membres de ladite commission parlementaire ont fini par identifier les profils des 140 candidats en lice. Hier, c'était leur huitième et dernière réunion tenue dans les murs de l'ex-ministère des Droits de l'Homme et de la Justice transitionnelle, basé à quelques encablures du palais du Bardo. Aux dires de M. Abdelkafi, l'ultime étape se concentrera sur la réception du reste des demandes de candidature dont les délais impartis sont fixés au 30 de ce mois. «Souhaitons que de nouvelles demandes nous parviendront pour pouvoir sélectionner 48 candidats qui seront soumis en plénière pour en choisir seulement 16 membres», tranche-t-il, tout en insistant sur l'importance du rendez-vous d'hier qui a clos le dernier round des concertations et d'étude des dossiers des postulants, conformément aux critères exigés par la loi créant l'instance en question, avec l'aval du tribunal administratif au sujet du sort des candidatures déposées à l'Instance nationale de prévention de la torture depuis 2013 à l'époque de l'ANC. Cette commission ad hoc, sous tutelle de l'ARP, pourra ainsi travailler conformément au principe de continuité de l'Etat. Respecter les délais M. Abdelkafi a affirmé avoir gardé les 140 dossiers de candidature, auxquels s'ajouteront les demandes reçues entre le 1er août et le 30 septembre. L'essentiel sera, en fin de compte, de combler le déficit enregistré en magistrats retraités et délégués de protection de l'enfance et permettre ainsi à l'Instance de bénéficier d'une saine naissance constitutionnelle. «Il y a là de quoi être fier : honorer nos engagements envers les organismes onusiens et mettre sur pied un mécanisme sentinelle des droits de l'homme dans les différents milieux de détention», a-t-il conclu. Le staff de la commission chargée de la question s'est, pour cela, contraint de redoubler d'efforts et d'échanger des avis sur un nombre de dossiers jugés inachevés, mais pas inacceptables. D'autres candidats doivent être convoqués pour recueillir plus d'éclaircissements sur le diplôme obtenu, l'exercice professionnel ou sur l'ONG dont il relève. Sous la pression du temps qui passe, il y a eu consensus sur le fait d'être pratique et beaucoup plus souple dans le traitement des demandes au cas par cas. Car, ce qui importe le plus c'est de respecter les délais, dans le sens d'asseoir les premiers jalons de l'instance d'ici la fin de l'année en cours. Pari sur lequel l'on mise énormément, vu le rôle que l'instance est appelée à jouer dans la lutte anti-torture et la prévention de tous les comportements humiliants à l'encontre des détenus. D'autant que l'une de ses prérogatives consiste à effectuer, sans préavis, des visites aux différents centres de détention. Ces visites qui seront aussi régulières que périodiques seront couronnées par des rapports d'observation sur l'état des lieux dans nos prisons.