Par Mohamed Kouka Mahmoud Sehili est mort dans l'indifférence générale. Qui est Mahmoud Sehili ? Mis à part ceux qui ne le savent pas, ceux du commun, qu'on ne blâme pas car ils ignorent, que penser de l'ignorance de ceux qui font partie de l'élite, ceux du sérail dirigeant, cependant coupés de l'histoire et de la réalité culturelle du pays. Mahmoud Sehili est né à Tunis le 27 juillet 1931. Il étudia à l'école des Beaux-arts de Tunis, diplômé de l'Ecole nationale de Paris, grand prix de la ville de Tunis en 1965. Il aimait peindre les hommes du Sud, des faubourgs, de la campagne, les humbles ouvriers. Il fut cependant un peintre semi figuratif et abstrait, inventif et audacieux. Grand prix de la Ville de Tunis, il participa en 1961, 1963 et 1965 à la Biennale de Paris; tint dans cette période plusieurs expositions à New York, Stockholm, Milan, Paris, Londres et Bonn. L'apport de Sehili aux arts plastiques et à la peinture tunisienne, donc à la culture, est absolument remarquable, il n'était pas de moindre envergure ni de moindre profondeur authentique, au-delà des styles et des formes singulières et spécifiques à chacun, que celui de ses aînés lointains ou proches tels que Hatem Elmekki, Amar Farhat, Zoubeir Turki, Abdelaziz Gorgi, Brahim Dahak, Néjib Belkodja, etc. Il pouvait prétendre à la même universalité esthétique que ses devanciers et contemporains, authentiques artistes, créateurs de forme et de style La mort, dans le quasi anonymat, de Mahmoud Sehili est métaphorique de l'idée culturelle dans notre pays, et en ce moment précisément. Il a fallu un soulèvement, que d'autres appellent «révolution», pour en arriver là où nous en sommes. Encore une fois, la culture ne se limite, aucunement, à l'inauguration et à l'ouverture des festivals durant l'été. La tâche d'un ministère de la culture ne s'arrête pas à une simple animation estivale. On n'aurait pas besoin d'un ministère pour cela, un simple comité proposé aux «réjouissances» y suffirait. Rappelons, et pour aller vite, que quand on parle de culture, c'est de culture vivante qu'il s'agit, celle qui permet aux hommes de se vouloir hommes, de se faire hommes et citoyens en entreprenant de s'en donner les moyens, en dépit et à l'encontre de tout ce qui objectivement les en empêche. Nous avons besoin d'un véritable projet culturel, une vision, une stratégie, bref d'un chemin balisé... Nous sommes tels les personnages de «En attendant Godot, la pièce emblématique de Samuel Beckett, immobilisés dans un espace indéterminé, attendant un personnage qui ne viendra pas, à nous demander comment transformer l'idée culturelle en action culturelle...Mais au fait, quelle idée?