Ils avaient, ensemble, demandé aux Tunisiens de voter pour Nida Tounès, pour un projet commun, celui porté par le président actuel de la République, Béji Caïd Essebsi. Depuis, le vent a tourné. Presque une année après, jour pour jour, les deux députés Abdelaziz Kotti et Mustapha Ben Ahmed s'affrontent dans deux camps différents. Le premier défendant la légitimité du comité constitutif du parti, et le second, qui a préféré démissionner, soutenant le bureau politique comme seule instance légitime du mouvement Nida Tounès. Nous avons choisi de les interviewer tous les deux, en vue de comprendre l'ampleur de la division. Abdelaziz Kotti (député de Nida Tounès) : «Nida Tounès restera le premier parti au parlement» Dans quelques jours vous allez devenir le deuxième parti au parlement, quel sentiment avez-vous par rapport à cela? Ce n'est pas correct, avant la fin des cinq jours, les députés démissionnaires ou dans leur majorité vont revenir au groupe Nida Tounès qui restera le premier parti au parlement. Les démissions n'étaient qu'une carte pour faire pression et améliorer les conditions de négociation. Maintenant, il y a des pourparlers et des rencontres. Beaucoup de députés ont exprimé leur volonté de revenir au sein du groupe de Nida Tounès. Ils se dirigent vers la reconnaissance du comité constitutif comme instance légitime... Le comité constitutif est le représentant officiel de Nida Tounès, elle n'a pas besoin de reconnaissance supplémentaire. De par la loi et le procès-verbal 37, il est clairement énoncé que le comité constitutif reste la seule instance légitime à même de décider de la tenue du congrès et de le préparer. Jeudi, le comité constitutif va prendre des décisions avec ou sans le consentement des députés frondeurs et tout le monde devra s'y conformer. Le congrès se déroulera en décembre. Un comité d'organisation va être mis sur pied. Cela résoudra-t-il les problèmes de Nida Tounès ? Nida Tounès reviendra plus fort, uni, avec tous ses membres. Après le congrès de décembre, les choses vont s'éclaircir et vous verrez le nouveau visage de Nida Tounès. On dit que de nouvelles personnalités politiques vont rejoindre Nida Tounès. Qu'en est-il? Il n'en est rien, c'est faux. Si on arrive à rassembler les nôtre, c'est déjà un exploit Mustapha Ben Ahmed (député démissionnaire de Nida Tounès) : «Le problème, c'est le fonctionnement antidémocratique du parti» Avec votre démission, Nida Tounès passera à la deuxième place, cela ne vous pose aucun problème de conscience? De conscience ? Vous pensez que nous avons pris cette décision de gaieté de cœur ? Nous avons été poussés à le faire, nous ne sommes pas dans une situation confortable. Nous n'avons pas trouvé d'autres moyens pour tirer le signal d'alarme sur ce qui se passe à l'intérieur du mouvement. On dit que les 32 ne sont pas unis, et qu'il y a des risques d'effritement. Il faut quelqu'un qui lit au fond des personnes pour l'affirmer. Bien sûr, il n'y a aucune entité humaine homogène au point de former un groupe de clones, ça n'existe pas. Mais ce groupe est bien soudé autour du refus de ce qui se passe à l'intérieur du parti. Le groupe a pris la décision de remettre sa démission en attendant ce qui va se passer dans les jours qui viennent. Mais les informations sur l'effritement du groupe sont des intox qui visent à démanteler la solidarité du groupe. Y a–t-il des pourparlers en cours? On dit que le président de la République demandera aux protagonistes de se retirer, à savoir Mohsen Marzouk et Hafedh Caïd Essebsi. Je voudrais dire que même s'ils parviennent à pousser certains éléments à se désister, ils n'ont pas résolu le problème. Le problème, c'est le fonctionnement antidémocratique du parti, c'est l'exclusion. En poussant quelques membres vers la sortie, cela ne va pas changer la donne car la situation peut dégénérer dans quelque temps. Ce n'est pas un problème de personnes, la question c'est la visibilité politique et le fonctionnement du parti. Autour de Hafedh Caïd Essebsi et Mohsen Marzouk, il y a d'autres personnes. Il faut s'attaquer au problème réel et arrêter le processus de renversement des structures consensuelles, c'est là que réside le début de solution. Nous étions rassemblés autour d'une identité, maintenant il y a des doutes même sur l'identité, il y a des doutes sur les objectifs du parti et des doutes sur la conception des alliances politiques.