Le président de la commission des affaires sociales à l'Utica, Khalil Ghariani, n'a pas mâché ses mots à propos de la possibilité de voir les menaces de grève se concrétiser. « Dans ce cas, on va tous en subir les conséquences et après on reprendra le travail !», a-t-il déclaré Hier, au siège de l'Utica, la tension s'est fait sentir au sein de l'équipe des négociateurs de la centrale patronale dans le dossier des augmentations salariales avec la centrale syndicale, et ce, en dépit des efforts de ses membres à maîtriser leurs déclarations lors d'une conférence de presse matinale. Une conférence qui a servi de réponse aux menaces de grèves lancées par les membres du bureau exécutif de l'Ugtt entre autres et à partir de Sfax, première grève prévue pour le 19 courant. Des menaces qui ont été entérinées par le bureau directeur de la centrale syndicale dans un planning de grèves régionales annoncé au cours de la journée d'hier. Khalil Ghariani, membre du bureau exécutif de l'Utica et président de la commission des affaires sociales, est revenu sur le long processus des négociations dans un temps caractérisé par les crises qui ont eu des incidences directes sur le rendement de l'économie tunisienne. Il n'a pas pris en considération les intervalles de différends entre l'Utica et l'Ugtt pour aller insister sur la situation de crise dont souffrent les entreprises tunisiennes, notamment dans le secteur industriel, ce qui a affecté leur productivité et leur rendement. Et d'expliquer : « La productivité est une vraie et profonde problématique qui doit être examinée avec sagesse loin de ce cadre des négociations salariales éphémère mais actuellement très important pour la pérennité des entreprises qui peinent à trouver leurs repères. La dégradation de la productivité revient principalement à des facteurs externes à la chaîne de production. Le système de production est en régression de rendement depuis plus de 25 ans! Cette situation nécessite une réflexion profonde sur le modèle économique, et ce, dans le cadre d'un dialogue avec le gouvernement et tous les acteurs économiques, dont les syndicats». Cependant, faisant allusion aux prochaines échéances électorales au sein de la centrale syndicale, Ghariani a indiqué que les menaces de grèves sont dictées par des conditions conjoncturelles. Des secteurs sinistrés Pour revenir sur l'augmentation salariale dans le secteur privé, il a souligné que plusieurs facteurs et indices entrent en jeu pour pouvoir calculer le pourcentage de cette augmentation. Selon lui, elle aurait dû être plusieurs augmentations; une pour chaque secteur, puisque la situation diffère d'un secteur à l'autre et il a insisté sur les secteurs sinistrés qui ne sont pas capables d'effectuer une augmentation salariale actuellement. «Le pourcentage d'augmentation doit obéir à des indices et une base de calcul objective selon la situation des secteurs pour avoir leur adhésion, alors que certains, comme celui du cuir et de la chaussure, sont encore en difficulté et ne peuvent pas adhérer à cette augmentation. Partant de notre conscience, nous et les responsables de l'Ugtt, de cette situation critique, nous nous sommes mis d'accord sur un calcul qui se réfère à l'indice de consommation dans une approche qui tend à réaliser la paix sociale. Mais la philosophie et la logique syndicale n'est pas la nôtre puisqu'ils se réfèrent à la démarche entreprise avec le secteur public. Sachant que ce dernier a promis des augmentations en se basant sur des ressources financières dont il ne dispose pas actuellement!», a-t-il enchaîné. Relevant le taux d'augmentation à négocier avec la centrale syndicale, le président de la commission des affaires sociales a indiqué que l'Utica proposera un taux «aux alentours des 4,3%» en se référant au taux d'inflation dégagé par l'Institut national de la statistique (INS), référence en termes de statistiques. L'augmentation salariale, d'après lui, doit être soutenue par plusieurs politiques d'accompagnement, notamment dans les secteurs de la santé et du transport pour favoriser les bonnes conditions de relance de la productivité et de production. Aussi, il a soutenu l'idée de compression de la grille des salaires. Productivité et grèves... Reprenant l'analyse de Ghariani, Abdelaziz Bouhalleb, président de la fédération nationale des industries électriques et électroniques relevant de l'Utica, a défendu la pérennité des entreprises, de quoi découlent les intérêts et des patrons et des employés. Et d'ajouter : « La valeur de productivité du travail est en régression continue depuis 2011, alors que les dépenses en salaires est en croissance continue. La charge salariale pour le secteur de l'habillement, par exemple, a atteint en 2014 les 73% pour des bénéfices aux alentours de 7% seulement!», s'est-il étonné. Une situation qui a poussé les investisseurs à retrousser leurs manches et opter pour la délocalisation vers le Maroc ou encore l'Egypte. La solution, d'après lui, réside en l'augmentation de la valeur ajoutée, ce qui implique une migration vers les secteurs à haute valeur ajoutée, « Cela, a-t-il relancé, nécessite des décisions courageuses pour encourager cette option en l'économie tunisienne pour sortir du gouffre de la crise économique qui persiste depuis quelques années. C'est un plan qui va nécessiter de cinq à dix ans au moins!». Hbib Tastouri, membre du bureau exécutif, lui aussi, président de la fédération nationale des professions et des métiers, a insisté sur le souci de sauver les secteurs sinistrés et de trouver les solutions adéquates pour qu'ils dépassent le cap de la crise dans laquelle ils se trouvent depuis des années. Par ailleurs, le président de la commission des affaires sociales, Khalil Ghariani, a affirmé, en conclusion, que les négociations comprendront le taux de l'augmentation salariale ainsi que les délais de la mise en application.