Le secteur privé, par la force de ses entreprises, pourra actionner les synergies, propulser la croissance, promouvoir l'investissement, entreprendre et innover Les assises de la 30e édition des Journées de l'entreprise ont pris fin hier dans la ville de Sousse (Port El Kantaoui). Organisées par l'Institut arabe des chefs d'entreprises et tenues les 4 et 5 décembre, elles ont été placées sur le thème «L'Entreprise 2.0 et la Deuxième République : vision et dialogue». Le thème est d'une importance majeure. Il a été débattu par des personnalités politiques de renommée internationale, des experts économiques et des représentants des institutions financières mondiales. Il a donné lieu à une nouvelle vision économique. Une nouvelle vision identifiée et définie afin de converger vers une nouvelle approche économique qui surpasse les programmes économiques proposés lors des campagnes électorales. Cette nouvelle vision devrait permettre la restauration de la confiance et l'établissement d'un compromis sur les choix et les orientations économiques et sociales du pays. La vision résulte d'une nouvelle approche de construction des politiques publiques, basée sur un consensus et s'appuyant sur des choix nationaux partagés. Elle implique un processus de dialogue public-privé qui, lui-même, s'appuie sur un nouveau contrat social. Une telle vision économique a le mérite d'inspirer, de fédérer et d'engager les parties prenantes, particulièrement les entreprises, sur la voie d'un changement consensuel et de sa concrétisation progressive. «L'entreprise est le moteur incontestable de la croissance économique à travers sa stratégie, sa compétitivité, son capital humain, ses capacités de développement, d'internationalisation et d'innovation, de transformation et d'adaptation. Le chef d'entreprise est censé composer avec ces paramètres, parfois complexes et volatils, pour tracer le chemin de la réussite», affirme M. Ahmed Bouzguenda, président de l'Iace. Le débat a abordé aussi les stratégies de développement de l'entreprise, l'internalisation et le positionnement sur de nouveaux marchés, sur la définition des rôles pour la construction de politiques publiques, leur mise en place et leur évaluation. Ainsi, la mise en place, la définition du rôle des organes de gouvernance et de régulation, leurs propres modes de gouvernance, ainsi que la participation des parties prenantes ont été également analysées au cours de ce rassemblement. Pour un dialogue public-privé efficace Le secteur privé a également été au centre du débat, secteur appelé à formuler une vision économique stratégique et à participer pleinement à la construction des prochaines politiques. «Un secteur privé fort du dynamisme de ses entreprises, agissant dans un environnement d'affaires favorable et doté d'une bonne gouvernance ne peut être, rappelle M. Bouzguenda, que le partenaire et le catalyseur d'un environnement où les politiques œuvrent à générer une croissance inclusive, dans le cadre d'un dialogue public-privé au niveau national et local». Il nous appartient aujourd'hui de nous fixer un cadre, d'édifier une vision. «Cette vision, poursuit l'orateur, ne pourra se construire que par un dialogue tripartite, incluant la sphère publique, privée et la société civile. Ce dialogue ne doit pas s'éterniser, il doit déboucher sur de grands choix économiques en Tunisie, en termes de priorités et de secteurs porteurs, sur les objectifs et les grands symboles de la révolution, à savoir l'emploi et l'intégration régionale, qui doivent se transformer en priorités de la nouvelle vision économique de la IIe république». Le secteur privé, par la force de ses entreprises, pourra actionner les synergies, propulser la croissance, promouvoir l'investissement, entreprendre et innover afin de répondre à l'objectif primordial de la création d'emplois. «Syndicalistes, politiques, députés, tous, nous devons avoir une obsession qui est l'emploi. La performance économique ne peut être dissociée de la performance sociale. Dans ce contexte, je lance un appel aux chefs d'entreprise afin de reconsidérer leurs stratégies. L'accroissement de la valeur ajoutée à travers l'innovation technologique, managériale et commerciale représente notre seule issue pour cette crise. Car, en économie, il faut formuler une vision, agir en harmonie». De son côté, Naoufel Aïssa, coordinateur des Journées de l'entreprise tunisienne, n'a pas manqué de rappeler que l'entreprise tunisienne vit dans un contexte global et mondial caractérisé par des bouleversements et vit, depuis cinq ans, au diapason d'un environnement socioéconomique difficile et volatil. Certes, du chemin a été fait, particulièrement sur le plan politique, à travers l'amorçage d'une démocratie naissante, qui devrait être une aubaine pour l'entreprise et pour l'épanouissement de l'économie, mais, nuance l'orateur, «la réalité est tout autre. Le passage à la IIe république a eu des répercussions politiques plutôt qu'un impact économique et, justement, ce changement économique dont on a tellement besoin a plus ou moins inspiré la thématique de cette édition des journées de l'entreprise». Et d'ajouter qu'il est devenu primordial, important et nécessaire de provoquer des changements profonds à tous les niveaux, au niveau de l'environnement des affaires, des politiques publiques, mais aussi au niveau également de l'entreprise elle-même, de la façon dont elle est gérée, de la façon dont sa stratégie est conçue, voire au sens plus large au sein de la société. «Et c'est à travers la reconsidération de la vision économique qu'un tel changement pourra être initié. Il n'y a pas de recettes : ensemble nous traçons la voie, nous dessinons notre futur. C'est dans ce cadre que nous avons préparé le Traité de l'entreprise pour la IIe république. Je pense que l'important commence réellement après ces journées, parce que au-delà des réflexions et des bonnes intentions, il faut agir, faire... Il s'agit de mobiliser tous les acteurs économiques autour d'une vision fédératrice commune, qui donne une visibilité dans un environnement complexe, incertain, et dans un climat d'incertitude. Notre réussite en dépendra». Elle dépendra également de l'engagement individuel et collectif autour d'une vision commune. Le chemin est certes long, difficile, pénible, mais «demande une adhésion et une mobilisation générale. Il commence toujours comme tous les longs parcours par les premiers pas : il faut qu'on se mette en marche».