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L'obsession autodestructrice gagne du terrain
Suicides et tentatives de suicide en 2015
Publié dans La Presse de Tunisie le 27 - 02 - 2016

Le suicide et les tentatives de suicide suivent, en effet, une courbe ascendante dans une société postrévolutionnaire, marquée par une violence et une tension multidimensionnelles. Le traumatisme des événements du 14 janvier et ce qui s'en est suivi non seulement à l'échelle nationale mais aussi dans la région arabe, comme les guerres civiles, la lutte contre le terrorisme, le nombre interminable de victimes qui succombent chaque jour sous les bombes et les missiles constituent autant de chocs, perpétuellement renouvelés et véhiculés aussi bien dans les médias que sur les réseaux sociaux. En Tunisie, au spectre terroriste s'ajoutent d'autres sources de terreur, de pression et de dépression : l'inefficience du système politique, la dégringolade économique, l'appauvrissement frénétique de la classe moyenne, l'endurance de la population nécessiteuse, l'inconfortable inadéquation entre les besoins et les moyens disponibles, l'émoussement des perspectives d'avenir poussent certains Tunisiens à préférer —sereins ou en proie à la pression psychologique— la mort à la vie. Le suicide devient une « solution» pour certains afin de mettre un terme définitif à leur mal de vivre. Pour d'autres, il constitue un moyen d'expression de la douleur, de pression sur le système, de provocation, et même de revanche et de sublimité de soi à l'image du symbole emblématique de la révolution, Mohamed Bouazizi.
Et bien que nous observons une mutation qualitative au niveau du traitement du thème du suicide, lequel est resté des décennies durant un sujet tabou et objet de censure, les données relatives à ce fléau social continuent à être bien en deçà des exigences des experts et des spécialistes. Les sociologues ne cessent d'attirer l'attention aussi bien de l'opinion publique que des décideurs sur l'urgence de focaliser sérieusement sur le problème et de retrousser les manches pour atténuer les causes directes et indirectes incitant au suicide.
Les Kairouanais y succombent le plus
Le syndrome de Bouazizi s'amplifie, telle une boule de neige. En 2015, et selon les données puisées dans les faits divers, 549 cas de suicide et de tentatives de suicide ont été recensés. Le gouvernorat de Kairouan est en tête de la liste avec un taux alarmant : 16,21%. Ce gouvernorat continue à enterrer des enfants suicidés, pour la plupart d'entre eux, à cause de mauvaises conditions d'études, de la précarité, mais aussi de la vulgarisation du premier suicide d'une enfant qui s'était pendue chez elle. La capitale des Aghlabides compte parmi les régions les moins développées de Tunisie ; une injustice qui pèse lourd sur le bien-être psychologique et socioéconomique des Kairouanais. Elle est suivie de Bizerte avec un taux de suicide de 12,93%. Là encore, des filles continuent à sacrifier leur avenir en acceptant, à travailler comme aides-ménagères chez des familles aisées. Le gouvernorat de Gafsa contribue au taux général de suicide à raison de 11,11%. Cette région détient l'une des principales richesses naturelles en Tunisie. Le phosphate contribue au PIB et menace la santé des Gafsois. Ces derniers n'en gagnent rien, sinon des miettes tout au plus.
L'esprit conservateur : une sorte d'immunité ?
Pour mieux comprendre la répartition du suicide et des tentatives de suicide en Tunisie, M. Sahbani en a dressé une cartographie. Il en ressort cinq groupes référentiels: le premier groupe comprend les régions qui comptent entre quatre et sept cas de suicide par mois, à savoir Kairouan, Bizerte, Gafsa et Kasserine. Le deuxième groupe compte entre 2,3 et 3 cas par mois, notamment Nabeul, Sidi Bouzid, Sousse et Jendouba. Le troisième groupe compte les régions qui enregistrent mensuellement entre 1,4 et 1,75 cas de suicide et de tentatives de suicide, à savoir Monastir, Sfax, Tunis et Mahdia. Le quatrième groupe enregistre entre 0,66 et 1,08 cas par mois, à savoir La Manouba, Béja, le Kef et l'Ariana. Le dernier groupe comprend les régions qui enregistrent moins de cas de suicide et de tentatives de suicide, à savoir Gabès, Siliana, Ben Arous, Medenine, Kébili, Tozeur, Tatouine et Zaghouan. «La cartographie nous montre que les régions du sud sont moins concernées par le suicide que les autres. Ces régions sont à dominante conservatrice. De même pour Siliana et Zaghouan», indique le sociologue.
Des pics saisonniers !
Par ailleurs, et outre les causes à caractères socioéconomique et développemental, le suicide semble en corrélation avec le changement des saisons. En 2015, deux pics suicidaires ont été cernés, soit en mars ( 77 cas ) et en septembre ( 69 cas). Ces périodes charnières correspondent à des phases de tension dans le quotidien des Tunisiens, dont le compte à rebours annonçant la période des examens pour la classe estudiantine, les premiers effluves caniculaires pour les malades psychiatriques, notamment ceux souffrant de troubles bipolaires, mais aussi, de la rentrée scolaire, des interminables dépenses, etc. Ces deux pics méritent d'être mieux étudiés surtout qu'ils ont contribué à 146 cas de suicide et de tentatives de suicide en une année. Encore faut-il retenir qu'au bout d'une année, le taux d'évolution du suicide et des tentatives de suicide a atteint 170%. La sonnette d'alarme tirée devrait intriguer les décideurs, notamment les politiciens, les représentants du peuple, les partis influents, la société civile afin de mettre en place une stratégie nationale à même de freiner sinon atténuer le recours au suicide comme solution ou comme moyen de pression.
L'homme face à «l'enfer» social
S'agissant de la classification des suicidés selon le genre, l'on constate que la gent masculine est plus touchée par le suicide que les femmes. En effet, à 412 suicidés correspondent 137 suicidées ; soit un cas de suicide de femmes contre trois suicides d'hommes. Cela revient, selon M. Sahbani, à plusieurs facteurs de pression, convergeant à la sous-estimation de soi. L'homme se heurte quotidiennement à moult agressions. Il est constamment à l'épreuve, une épreuve d'ordre social et économique. Très présent dans l'espace public, il est amené, directement ou indirectement, à résister à une forte concurrence, susceptible de mettre en doute sa masculinité, voire sa virilité. L'espace public masculin est placé sous le signe de la violence : une violence physique et morale. Manifestement, le machisme est une lame à double tranchant : à défaut de gloire (physique charismatique, diplôme honorable, statut social respectable, etc.), l'homme succombe à la sous-estimation de soi, à la dépression.
Quand les petites princesses tirent leur révérence...
Si les femmes se suicident moins que les hommes, les fillettes, elles, passent plus à l'acte fatal que les garçons. Le suicide des enfants va crescendo, tout comme le suicide des seniors. Les chérubins et les personnes âgées ne recourent pas, contrairement aux jeunes et aux adultes, aux tentatives de suicide. Leurs actes sont dans la majorité des cas irrévocables. Le présent rapport nous montre que le nombre de suicides des filles âgées de moins de 15 ans est passé de 12 à 34 cas en une année. Celui des garçons, de six à 20 cas. Cette évolution alarmante incite les responsables et les décideurs à traiter du problème sans pour autant réfléchir sur une stratégie à même de dissuader les enfants à mettre fin à leurs jours. De même pour les seniors qui, en proie au désespoir, à la précarité, à la maladie ou encore à la solitude, se trouvent de plus en plus impatients de quitter ce monde. En 2014, l'Observatoire social tunisien avait noté 4 cas de suicides de personnes âgées de plus de 60 ans. Ce nombre a atteint les 27 en 2015 dont 23 hommes.
La jeunesse suicidaire
Toutefois, la tranche d'âge la plus touchée par le suicide reste celle comprise entre 26 et 35 ans. L'on compte 191 hommes et 33 femmes. L'évolution des jeunes suicidés se traduit par un taux effarant de 218%.
Cet état des lieux — quoique manquant des données qualitatives et quantitatives sur le suicide, en raison notamment des cas non déclarés et de l'absence de suivi des cas de tentative de suicide— dévoile une réalité amère, voire sinistre. Un appel d'urgence est lancé, via ce travail, aux parties concernées, à la société civile et à l'opinion publique, sur la nécessité d'œuvrer ensemble afin de résoudre les problèmes d'ordre socioéconomique et développemental, notamment dans les régions du Centre, d'encadrer et de protéger l'enfance contre la vague suicidaire en leur inculquant les valeurs sûres et en mettant à leur disposition les moyens à même de les aider à voir la vie —leurs vies— sous un angle positif. Il convient aussi de redonner aux jeunes des raisons pour vivre, et vivre dignement, en luttant contre le chômage et l'instabilité. Les seniors nécessitent la mise en place de structures d'accompagnement et de prises en charge adaptées pour les aider à surmonter les affres de la vieillesse.
D'un autre côté, un travail de remise en question du traitement du phénomène du suicide dans les médias s'impose afin d'éviter de tomber dans le piège de la banalisation ou encore de la glorification des actes de suicide.


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