Par Abdelhamid Gmati La société civile en Tunisie se manifeste dans tous les problèmes du pays. On a vu son action pour la réussite de la transition démocratique qui a été couronnée par l'attribution du prix Nobel de la paix. Et elle est présente dans d'autres secteurs tout aussi vitaux. Ainsi, l'association Tunisia for All a organisé récemment un séminaire où ont été débattus divers thèmes dont « Comment inculquer la culture de la vigilance au sein de la société civile ? ». Les sécuritaires se félicitent du fait que les citoyens se montrent de plus en plus vigilants en ce qui concerne le terrorisme. L'ancien colonel et expert en sécurité, Ali Zeramdini, estime que le citoyen est la pièce maîtresse du renforcement de la sécurité. « Quand on parle de sécurité, on parle aussi de la conscience du citoyen. Sans cette prise de conscience, on n'obtiendra aucun résultat, mais au contraire nous reculerons. Mais je pense que le citoyen tunisien commence à s'engager et à être plus vigilant, à avoir cette culture de la vigilance, et à collaborer avec les forces de sécurité ». Autre thème débattu : « La société civile, que peut-elle faire pour le développement régional et l'économie en général en Tunisie ? ». On y a développé l'importance de l'entrepreneuriat, de l'économie sociale et solidaire. Toujours dans le domaine économique, le Centre d'orientation et de reconversion professionnelle (Corp) a organisé, le 25 février, le premier Salon de l'emploi inversé en Tunisie (Corp City). Il s'agit d'une initiative née de l'idée que la reconversion professionnelle est une solution potentielle pour la lutte contre le chômage. Expliquant les raisons du recours à ce concept, le directeur du Centre déclare que cela est dû à un constat. Il s'agit d'un dysfonctionnement entre les besoins des entreprises, d'une part, et l'accès au marché de l'emploi pour les diplômés de l'enseignement supérieur, d'autre part. Ainsi, le Corp se positionne comme un intermédiaire entre les entreprises et les demandeurs d'emploi afin de créer une nouvelle dynamique entre les deux parties. Il existe, en Tunisie, une multitude d'associations. Plusieurs existent depuis des années. D'autres ont été autorisées après la Révolution. Certes, parmi les nouvelles venues, certaines disposent de ressources financières importantes dont on ignore la provenance. Des soupçons pèsent sur certaines concernant le financement de takfiristes et de recruteurs de jihadistes. Plusieurs ont, d'ailleurs, été interdites. Mais il y en a d'autres, formées par des bénévoles et dont les activités sont avérées. Elles agissent dans plusieurs domaines. Il y a des associations à caractère professionnel (comme l'Association des physiothérapeutes tunisiens ou l'Association des femmes de carrière médicale et sociale), des associations à caractère scientifique (comme la Société tunisienne des sciences médicales, ou la Société tunisienne de pédiatrie), et des associations à caractère social s'occupant des handicapés moteurs, des handicapés mentaux, des insuffisants rénaux, des aveugles, des sourds, de l'enfance, des personnes âgées. Récemment, le Bahut School a ouvert ses portes pour accueillir près de 60 élèves rencontrant des difficultés d'apprentissage nécessitant une prise en charge spécifique et un encadrement personnalisé. Différents dispositifs d'accompagnement et de suivi ont été proposés, commençant dans les salles de classe et se concluant avec des entretiens individuels menés par un psychologue, un orthophoniste et un ergothérapeute. La cofondatrice de l'école, Mme Farha Hanafi, affirme que « cette méthode, initiée et expérimentée durant une dizaine d'années, a déjà donné ses fruits. Des dizaines d'enfants ont pu aller jusqu'au bout de leur scolarité malgré des difficultés d'apprentissage diagnostiquées. Ce concept est le premier en Tunisie. Notre point de départ était de lutter contre le décrochage scolaire ». Ce sont ces dernières qui se trouvent menacées du fait du désengagement de l'Etat. Ces associations, initiées par des bénévoles, offraient leurs services et développaient des actions pour venir en aide et soutenir certains groupes démunis de la population, et ce, dans toutes les régions du pays. Elles pouvaient réaliser leurs programmes grâce à des subventions de l'Etat et aux contributions de certains sponsors. Mais depuis ces dernières années, l'Etat s'est désengagé et les sponsors rechignent à intervenir par crainte d'être taxés de malversation, de blanchiment d'argent, etc. Et ces associations, qui éprouvent des difficultés à payer les loyers de leur siège et à faire face aux dépenses administratives, ne peuvent plus développer leurs programmes. Et elles se trouvent en péril.