Par Bady BEN NACEUR La semaine dernière, alors que nos politiques se dévoraient entre eux, à propos des implications de certains dans la liste des Panama Papers, mais, aussi, les événements à Kerkennah, des phénomènes dramatiques naturels ceux-là, des tremblements de terre, des secousses telluriques se sont produits, tour à tour, dans l'archipel du Japon et en Equateur. Tuant et déstabilisant des populations. On peut s'interroger, aujourd'hui, sur ces deux types de phénomènes pour comprendre l'histoire de l'humanité et celle de notre planète terre qui a perdu la boussole. Sur les bancs du lycée, on nous avait toujours appris que l'histoire se répète selon les lieux et les périodes, à travers des phénomènes identiques, dont les guerres, causant des dégâts qui freinent ou appauvrissent l'essor des sociétés humaines. Et ce n'est pas de la science-fiction au vu même du chaos provoqué par Daech, entre autres... Il faut relire Jean-Paul Sartre et Albert Camus et ce qu'ils nous ont laissé comme legs et analyses à propos de ces notions d'existentialisme et d'absurde, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, alors que tout était à refaire, à reconstruire pour les générations montantes. Ces deux philosophes en France, et bien d'autres en Allemagne et dans toute l'Europe, auront eu une grande influence sur la vie intellectuelle, politique et artistique de leur époque. Ces notions d'existentialisme et d'absurde étaient devenues, d'ailleurs, des modèles de pensée et même un art de vivre dont s'étaient emparés les Parisiens, du côté de Saint-Germain-des-Prés : romanciers, poètes, hommes de théâtre, cinéastes, jusqu'en mai 1968. Ce mai 68 qui a, en quelque sorte, influencé notre révolution inattendue! — et que l'on s'est plu, d'ailleurs, pour le rapprochement des faits — à appeler «le Printemps tunisien» puis, par son extension à d'autres pays, le «Printemps arabe». Et c'est le thème de l'absurde qui a donné le la à cette révolution. Ce vocable qui veut dire «Contraire à la raison» au sens commun, ce quelque chose de «déraisonnable», d'«extravagant», d'«insensé», qui s'est produit à Sidi Bouzid, lorsqu'un jeune homme s'est auto-enflammé, enclenchant ainsi, par son geste, la révolution du 14-Janvier 2011. D'autres actes de ce genre, de véritables suicides, allaient se produire à leur tour à travers d'autres régions du pays. Et, cela, pour bien spécifier — durant cette ère dictatoriale —, à ceux qui voulaient bien l'entendre, toute l'absurdité de la condition et de l'existence humaines. Voici d'ailleurs, ce que déclare Albert Camus à ce sujet : «L'unique donnée est pour moi l'absurde. Le problème est de savoir comment en sortir et si le suicide doit se déduire de cet absurde». Oui, le charretier de Sidi Bouzid s'est suicidé parce qu'il ne savait pas «comment en sortir». Et depuis maintenant plus de cinq ans, on ne sait pas «comment en sortir», comment régler cette notion de l'absurdité de l'humaine condition où toute une jeunesse — pourtant diplômée — vit dans la précarité et le chômage ! Quant à la notion d'existentialisme de Jean-Paul Sartre, une doctrine philosophique (1945) selon laquelle «l'existence de l'homme précède son essence», lui laissant ainsi «La liberté et la responsabilité de se choisir», c'est bien ce que le peuple tunisien tente de vivre aujourd'hui. Essayant de s'habituer au mieux à ces deux notions de liberté et de responsabilité. Moins pour la seconde, peut-être ! Sartre déclare à ce propos : «La première démarche de l'existentialisme est de mettre tout homme en possession de ce qu'il est et de faire reposer sur lui la responsabilité totale de son existence». La question pour nous tous, maintenant, est de savoir si on y arrivera et comment...