Slim Chiboub choisit de se réconcilier avec l'Etat et de lui rendre ce qui lui revient. L'IVD s'en réjouit et, en contrepartie, se débarrasse définitivement de ses éléments perturbateurs avec la bénédiction de l'ARP «L'accord historique», comme l'a qualifié Khaled Krichi, vice-président de l'Instance vérité et dignité et président de sa commission d'arbitrage et de conciliation, entre Slim Chiboub et le chef du contentieux de l'Etat sous les auspices de l'IVD et dans son siège à Montplaisir consistant à ce que l'Etat recouvre les deniers publics que le gendre de l'ex-président Ben Ali aurait détournés à son profit constitue-t-il, en fin de compte, une opération de com dont les dividendes politiques n'auraient duré que l'espace de quelques jours ? La question est à poser sérieusement quand on revient aux déclarations de Riadh Boujah, président de la Commission nationale de confiscation des biens mal acquis (les biens de 114 personnalités proches de Ben Ali dont Slim Chiboub), d'une part, et à la précision diffusée, samedi par l'agence TAP, par la voix de Hatem El Euchi, ministre des Domaines de l'Etat et des Affaires foncières, d'autre part. En effet, le ministre tient à faire remarquer que rien n'est conclu entre Slim Chiboub et l'Etat. «La conciliation effective, ajoute-t-il, commande de longues et dures négociations entre le chargé général du contentieux de l'Etat et Slim Chiboub. Ces négociations comportent également des séances d'écoute publiques et la présentation par Slim Chiboub de ses excuses au peuple». Reste maintenant à savoir si les conditions formulées par El Euchi ne sont pas, en définitive, des formalités que Chiboub est disposé à respecter. Autrement dit, l'Etat peut-il refuser d'avaliser l'accord de conciliation signé entre Slim Chiboub et son chargé du contentieux? «Oui, répond le ministre des Domaines de l'Etat et des Affaires foncières, l'Etat peut rejeter l'accord au cas où les biens pillés ne seraient pas révélés dans leur intégralité et que la vérité ne serait pas dévoilée intégralement», ce qui revient à dire que l'on ne va pas se contenter uniquement des déclarations de Slim Chiboub ou des documents qu'il va présenter pour montrer que telle propriété ou telle somme d'argent qu'il possède n'ont pas été acquises illégalement. Seulement, Hatem El Euchi ne précise pas si son ministère ou la Commission de confiscation des biens mal acquis détiennent des preuves irrécusables juridiquement prouvant que les biens ou une partie des biens de Chiboub proviennent effectivement d'une source douteuse. Quant à Riadh Boujah, il a introduit une donnée que Khaled Krichi n'a pas jugé utile d'expliciter dans sa déclaration triomphale. En effet, Boujah souligne que Chiboub s'est engagé à révéler la réalité sur ses biens en Tunisie. Quant aux comptes bancaires ou biens dont il dispose à l'étranger, on n'en saura rien. Jusqu'ici, le gendre de Ben Ali a reconnu détenir un compte bancaire à l'étranger de près de 11 millions de dinars qu'il est disposé à rendre à l'Etat. La réconciliation globale sur les rails Et l'on se trouve dans l'obligation de relever que les déclarations de Hatem El Euchi et Riadh Boujah ne sont en réalité, comme le précisent plusieurs observateurs, que «les derniers actes de résistance à la grande marée suscitée par l'initiative de Rached Ghannouchi, président d'Ennahdha, relative à la réconciliation globale où tout le monde trouvera son compte, y compris Sihem Ben Sedrine, la présidente de l'Instance vérité et dignité, qui a, désormais, les coudées franches pour diriger son instance comme elle le désire. Les députés de Nida Tounès qui la menaçaient, il n'y a pas longtemps, de dévoiler au peuple sa mauvaise gestion de l'argent de l'IVD et lui reprochaient d'avoir acquis une voiture personnelle de plus de 100 mille dinars se taisent aujourd'hui et n'attendent plus les résultats de l'enquête financière qu'ils ont réclamée. Pour les quatre postes vacants au sein du Conseil de direction de l'IVD depuis des mois (dont Zouheir Makhlouf, chassé du siège de l'Instance bien qu'il soit en possession d'un jugement rendu par le Tribunal administratif lui donnant le droit de reprendre son poste de vice-président), au sein du Parlement et plus précisément du côté de la commission de tri des candidatures destinées à combler les vacations constatées, on se contente de demander à Ben Sedrine des clarifications sur l'affaire ni plus ni moins». Ainsi, on ne veut plus savoir pourquoi l'Instance refuse de réintégrer Zouheir Makhlouf ou pourquoi Noura Borsali a décidé de claquer la porte ou pour quelle raison Mohamed Ayadi a pris lui aussi la décision d'abandonner son poste au sein de la direction de l'IVD. Volet réconciliation globale à la manière de Rached Ghannouchi (la synthèse entre l'initiative du président Caïd Essebsi et celle du président du parti nahdhaoui), on met, au niveau de la coordination des partis de soutien à la coalition gouvernementale, les bouchées doubles pour que le plan Ghannouchi prenne forme. La commission parlementaire de législation générale se prépare à examiner au début de la semaine le projet de loi sur la réconciliation économique qui lui a été soumis par le président Béji Caïd Essebsi. En attendant, les responsables de la coordination quadripartite pressent Ennahdha de lui soumettre le projet de loi relatif à la réconciliation globale le plus tôt possible afin de l'avaliser et de le transférer aux membres de la commission de législation générale, l'objectif étant qu'ils parviennent à en tirer l'essentiel et l'insérer dans l'initiative présidentielle. On avance, déjà, que la loi sur la réconciliation globale pourrait être votée au cours du mois de juillet prochain, soit avant le 25 du même mois, date fixée par Mohamed Ennaceur, président du Parlement, pour la clôture de l'actuelle législature.