Tennis challenger Saint Tropez: Moez Chargui en finale    L'Italie adopte une loi pionnière sur l'intelligence artificielle    Un ancien ministre allemand des Affaires étrangères : L'Europe contrainte de négocier avec la Tunisie sur la question migratoire    Un Tunisien victime d'un AVC toutes les demi-heures... conseils pour sauver votre vie !    Foot -Coupe de la CAF : L'Etoile du Sahel chute au Soudan    Etats-Unis - Le Pentagone veut verrouiller l'information, la presse s'insurge    Le procès de l'homme d'affaires Ridha Charfeddine reporté au 10 octobre prochain    Fatma Mseddi appelle à la création d'un front citoyen pour sauver le processus du 25-Juillet    Le courant ne passe plus monsieur le président !    Tunisie : Moins d'accidents, mais plus de morts sur les routes en 2025    Rome : Un Tunisien expulsé pour mariage fictif afin d'obtenir un titre de séjour !    Coupe de la CAF – Entrée en lice de l'ESS face à Ahli Wad Madani à l'Azam Complex Stadium (14h00) : Se rassurer dès l'aller    Le ciel en spectacle : éclipse solaire partielle ce 21 septembre    Plus de vingt grossistes et intermédiaires arrêtés lors d'une campagne contre la spéculation    Alerte météo : un puissant changement attendu en Tunisie dès la semaine prochaine    Cinéma : Dorra Zarrouk et Mokhtar Ladjimi sous les projecteurs du Festival de Port-Saïd    Le Portugal reconnaîtra officiellement la Palestine ce dimanche    Les Etats-Unis pourraient percevoir des milliards de dollars dans le cadre d'un accord sur TikTok    Pourquoi le dinar tunisien continue de se déprécier face à l'euro, malgré la croissance ?    Commentaire : Le pouvoir au peuple, non aux marionnettistes de coulisses    Mustapha Mnif: Vivre pour autrui    Tunisie-Chine : inauguration d'un Centre de Formation en Médecine Traditionnelle Chinoise    Ahmed Ounaies : la décision marocaine sur les visas est «naturelle» et liée à la sécurité    Mise à niveau industrielle : 110 MD investis dans quatre secteurs    Météo : Pluies isolées au Sud-Est et températures stables ce samedi !    Plus de 400 000 élèves bénéficient d'une aide financière    Tunis accueille la 3e conférence internationale sur la pharmacie en oncologie    Washington impose 100 000 dollars de frais pour le visa de travail H-1B    Boubaker Bethabet reçoit les félicitations d'Anas Hmaïdi pour son élection au bâtonnat    La pièce de théâtre tunisienne « Faux » triomphe en Jordanie et remporte 3 prix majeurs    Hôpital Mongi Slim : inauguration d'un centre de formation en médecine traditionnelle chinoise et 7 unités de soin    L'huile d'olive tunisienne : les prix s'effondrent malgré la hausse des exportations    Liste des collèges et des lycées secondaires privés autorisés en Tunisie pour l'année scolaire 2025-2026    Youssef Belaïli absent : La raison dévoilée !    Travaux dans le sud de la capitale : prolongation de la déviation nocturne à Ben Arous    Coupe du monde 2026 : l'Afrique du Sud menacée d'une lourde sanction !    USMO : fin de l'aventure pour Victor Musa    Kais Saied dénonce les coupures intentionnelles d'eau et d'électricité et critique la gestion administrative    La Société ''El Fouladh'' lance un concours externe pour embaucher 60 agents    Kaïs Saïed dénonce une « guerre acharnée » contre l'Etat tunisien    Open de Saint-Tropez : Moez Echargui qualifié pour les quarts de finale    La Tunisie gagne des places dans le classement de la FIFA    Sfax célèbre l'humour à l'hôtel ibis avec ibis Comedy Club    La Bibliothèque nationale de Tunisie accueille des fonds de personnalités Tunisiennes marquantes    Fadhel Jaziri: L'audace et la norme    "The Voice Of Hind Rajab » film d'ouverture du Festival du film de Doha    Mois du cinéma documentaire en Tunisie : une vitrine sur le cinéma indépendant et alternatif    Fadhel Jaziri - Abdelwahab Meddeb: Disparition de deux amis qui nous ont tant appris    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Chemins de doute
L'écritoire philosophique
Publié dans La Presse de Tunisie le 08 - 07 - 2016


Par Raouf Seddik
Suffit-il de se déprendre des certitudes qui nous gouvernent pour retrouver le sens perdu, souvent perdu, de l'étonnement ? Ou faut-il, en plus de cet effort intellectuel, une part de passion pour le monde et son mystère, que nous ne saurions atteindre sans le puiser au fond de notre mémoire, dans l'émerveillement de l'enfant que nous avons été ?.
Se déprendre des certitudes, c'est pratiquer le doute. Dans l'Antiquité, un courant de pensée a fait du doute son mot d'ordre: c'est le scepticisme, dont le fondateur est Pyrrhon. Face aux détenteurs de vérités, fussent-ils affublés du statut de savants, les adeptes du scepticisme se repliaient dans une attitude prudemment critique, soumettant toute affirmation à la ténacité reconstituée de son contraire, de telle sorte qu'aucune vérité ne pouvait s'imposer.
Mais, avant d'être un courant particulier dans l'histoire de la philosophie, le scepticisme est un mouvement interne de la pensée. Il correspond à cette dimension critique face à laquelle toute vérité établie se trouve vouée à la destruction, à la ruine, dès lors qu'elle n'est pas en mesure d'opposer des raisons solides à ses prétentions. Socrate incarne cette sagacité à détruire les vérités de ses concitoyens : contre la fausse opinion de ses juges, il est celui qui veut doter la vie de la cité d'une immunité contre la domination impérieuse des savoirs acquis. Son savoir à lui consiste essentiellement à déjouer habilement, et en toute civilité, les arguments captieux par lesquels ses interlocuteurs trompent autant leurs admirateurs qu'eux-mêmes, faisant des uns et des autres les idolâtres des savoirs humains et les serviteurs dévoués d'une science tyrannique.
Contre le doute solitaire et méthodique d'un Descartes, celui de Socrate attire l'assistance des curieux et des oisifs pour démonter, de façon ludique et distrayante, la science fabriquée des savants, tout en épargnant la sagesse héritée de la tradition, dans la mesure en tout cas où celle-ci demeure dans son cadre naturel et ne se laisse pas réquisitionner par la tyrannie des savants et des pédants. Son doute n'est pas radical, il est jovial et convivial.
Les dialogues de Platon qu'on appelle «socratiques», et qui sont très probablement les premiers à avoir été rédigés, sont les dialogues qui se terminent par une impasse : une «aporie». Dans la suite, Platon s'attellera davantage à dégager les éléments de sa propre pensée, et en particulier de sa métaphysique des Idées. Mais dans ces premiers dialogues, l'échange conduit l'interlocuteur de Socrate, ainsi que ses partisans présents, à se rendre compte que le savoir dont il se prévalait et dont il faisait grand cas n'est pas un vrai savoir : il s'effondre sur ses fondations branlantes. Et, bien que rien n'ait été touché des croyances de la communauté, de tout ce que racontent les récits des anciens, de la «tradition», le désastre que Socrate fait vivre aux experts de la science débouche, au moment critique, sur une expérience qui est à la fois d'humilité dans le non savoir et de vérité dans la contemplation de l'être dans sa nudité... C'est en tout cas l'horizon possible de ce retour à la simplicité.
Bref, Socrate pratique un doute par lequel il montre aux citoyens d'Athènes comment faire preuve de vigilance face aux faux savoirs des sophistes et comment préserver, finalement, la sagesse héritée des anciens, qui n'est le propre de personne, qui est un savoir en partage. Mais le péril de cette volonté de domination des sophistes sert aussi comme d'une occasion en vue de dégager l'expérience d'une nouvelle rencontre, d'une nouvelle naissance commune à la lumière jaillissante de l'être. C'est en cela qu'il innove.
L'impasse du dialogue socratique fait qu'on ne débouche sur aucune position qui pourrait se prévaloir du titre de vérité. Mais, paradoxalement, elle débouche bien sur une expérience de savoir, qui est partage d'une vérité, si insaisissable et fugace soit-elle. Cette expérience réaffirme le lien social autour de l'attachement au vrai et au refus du faux et de l'illusoire. Elle renouvelle le contrat citoyen en reconduisant tacitement la sagesse venue des ancêtres, mais aussi en ouvrant ce partage à quelque chose de plus intime et de plus originaire qui relève bien d'une connaissance... qui est, selon l'étymologie du mot, «co-naissance» !
On voit donc que le doute peut garder le sens de la mesure tout en permettant à chacun de se déprendre de l'emprise de toute idée fausse, malgré le prestige dont elle peut se parer, et tout en ouvrant aussi l'échange sur une expérience de vérité qui est précisément une expérience d'étonnement partagé.
Le doute que l'on retrouve chez Descartes, et avant lui chez Ghazali, ouvre-t-il la voie à une autre forme d'étonnement du fait qu'il prend une tournure plus radicale ? C'est ce que nous essaierons de voir prochainement.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.