L'analyse des postes d'emploi demandés laisse montrer que le marché a besoin de plus en plus de main-d'œuvre qualifiée ou peu qualifiée opérant dans des activités classiques L'Institut arabe des chefs d'entreprises (Iace) vient de publier son rapport national sur l'emploi au terme de l'année 2015, où il dresse le bilan du marché du travail, l'offre et la demande et dévoile l'état des lieux des problèmes structurels et conjoncturels du secteur. De prime abord, le rapport montre que la Tunisie compte jusqu'à fin 2015, environ 4 millions de personnes actives dont 28,1% de femmes et 80 mille ayant un niveau d'instruction supérieur. La répartition de la population active fait ressortir environ 600 mille chômeurs, sachant que le rapport 2016 de l'Iace sur la compétitivité de l'économie tunisienne, a démontré que «comparativement à un ensemble de pays, la Tunisie enregistre les taux les plus élevés en matière de chômage et d'inégalités des chances entre les citoyens. La baisse du taux de chômage, de 16,1% en 1996 à 12,8% en 2005, n'était pas suffisant pour rattraper les faibles taux de chômage enregistrés par d'autres pays». Aujourd'hui, le taux de chômage est passé de 13% en 2010 à 15,2% en 2015, touchant essentiellement les femmes et les jeunes âgés entre 15 et 34 ans. A l'échelle régionale, les 3/4 de l'ensemble des chômeurs sont concentrés dans le sud et l'ouest du pays, le Nord-Est et le Centre-Est accaparent 25% des chômeurs. Pour examiner le dossier de l'emploi, l'Iace l'a abordé sous ses deux angles: l'offre et la demande. En effet, deux enquêtes ont été élaborées, l'une auprès de 400 entreprises et la seconde auprès de 10.000 diplômés du supérieur. Les résultats de ces deux enquêtes sont affichés dans le rapport national sur l'emploi de l'Iace, résultats argumentés par des données publiées par l'Agence nationale de l'emploi et du travail indépendant (Aneti) et le ministère de l'Enseignement supérieur. Le rapport montre que pour ce qui est des difficultés de combler les postes vacants, «les entreprises ont été appelées à se prononcer sur un problème de carence des profils demandés ou de qualité des profils disponibles. Une répartition par secteur, par métier et par région permettra de donner une lecture des problèmes de l'emploi en Tunisie, et ce, en se basant sur la demande des entreprises existantes». Le rapport dénombre par ailleurs les difficultés rencontrées lors du recrutement et les critères des compétences sollicitées et des demandeurs d'emplois, présente les stratégies de recrutement des entreprises, analyse l'interaction des postes vacants avec les postes occupés... Selon la même source, l'enquête auprès des entreprises «révèle que le nombre total de recrutements potentiels pour les deux prochaines années est de l'ordre de 270.000 emplois, avec une suppression globale de 50.000 postes d'emploi, ce qui revient à une création nette de poste d'emploi de 75.000 sur les deux ans avec 68,5% de ces postes qui sont sollicités par les grandes entreprises». La tendance baissière des perspectives de l'emploi reflète «la méfiance et l'inquiétude des chefs d'entreprise quant aux perspectives d'amélioration de l'environnement d'affaire. Ainsi, l'aversion aux risques semble augmenter chez les entrepreneurs tunisiens et étrangers», indique t-on dans ce rapport. Par ailleurs, l'analyse des postes d'emploi demandés «montre que le marché a besoin de plus en plus de main-d'œuvre qualifiée ou peu qualifiée dans des activités classiques (commerce, textile, bâtiment...)». Ces secteurs ne requièrent pas un taux d'encadrement élevé capable d'absorber le chômage des diplômés. «Le marché a donc besoin d'une main-d'œuvre que les universités sont capables de fournir, surtout avec les carences de notre système de formation professionnelle», précise-t-on. Concernant l'offre, le rapport précise que la Tunisie s'attarde sur l'offre issue de la formation universitaire. En effet, «par rapport à un taux de chômage national de 15% , le taux de diplômés du supérieur est de 35%. Ce constat explique l'intérêt accordé à cette catégorie de demandeurs d'emploi, il a été démontré à maintes occasions que la Tunisie n'a pas de problèmes dans l'emploi de la main-d'œuvre ordinaire (non qualifiée), mais on enregistre plutôt une pénurie et il a même été question de faire appel à la main-d'œuvre étrangère». Par ailleurs, pour faire face à l'inadaptation de l'université tunisienne aux tendances du marché de l'emploi et répondre par là même aux besoins des entreprises, l'on propose des solutions dont la plus importante vise à obliger l'université à être à l'écoute de son environnement local et international et attentive à ses besoins. «Cela pourrait être réalisé grâce à une ouverture à l'environnement socioéconomique en permettant à ses représentants de prendre part dans la gouvernance des universités et en assurant le passage des découvertes scientifiques vers la société et l'économie».