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Emeutes du pain du 3 janvier 1984 : Après 40 ans et 20 révisions, les procès encore devant la justice transitionnelle
Publié dans La Presse de Tunisie le 03 - 01 - 2024

Dans ce dossier, l'Instance vérité et dignité a enregistré 1.230 plaintes individuelles touchant 19 gouvernorats avec plus de 85 homicides, 213 blessés par balles et 932 arrestations et emprisonnements avec usage systématique de la torture et plusieurs viols sur mineurs.
Le 29 décembre 1983, la décision du gouvernement tunisien de doubler le prix du pain provoque un soulèvement populaire. Le 3 janvier 1983, les émeutes sont réprimées dans le sang et plusieurs victimes tombent sous des tirs à balles réelles. Bilan : plus de 150 morts, des centaines de blessés et plus d'un millier d'arrestations.
À la fin de 1983, la baisse des prix du pétrole fait chuter les recettes de l'Etat tunisien. Pour contrecarrer l'augmentation de la dette tunisienne, le Fonds monétaire international (FMI) exige un plan d'austérité qui exige de l'Etat tunisien de lever la subvention des produits alimentaires, un système de compensation qui représente 3,1% du Produit intérieur brut et 10% du budget de l'Etat. Annoncée le 29 décembre 1983, la décision gouvernementale entraîne une hausse immédiate du prix du pain et de la farine. Ainsi, du jour au lendemain, la semoule et les pâtes connurent une augmentation de 70% et le pain une hausse de l'ordre de 80 à 108%. La baguette passait de 50 à 90 millimes, le gros pain de 700 grammes de 80 à 170 millimes. Pourtant, c'était ce gros pain qui était le plus consommé par les Tunisiens et quasi uniquement par les masses déshéritées. La réaction fut un mélange de stupéfaction et de colère. Cette hausse, la première en 15 ans, frappe directement les pauvres (20% des Tunisiens vivent dans des bidonvilles). Le Sud du pays, Douz, Kébili, El Hamma et Kasserine, régions particulièrement pauvres, connaissent les premières émeutes qui s'étendent ensuite vers le Nord. Avec l'entrée en vigueur, le 1er janvier 1984, le mouvement de contestation s'est étendu dans les régions du nord et du centre-ouest du Kef, Kasserine, Thala, et le reste des régions du sud de Gafsa, Gabès et Médenine, ce qui a nécessité l'intervention de l'armée dans ces régions après que les forces de l'ordre n'ont pas pu circonscrire l'expansion du… soulèvement.
Alors que le ministère de l'Intérieur annonçait le 2 janvier des morts et des blessés dans les régions de Kébili, El Hamma, Kasserine et Gafsa, la zone industrielle de Gabès s'est lancée dans une grève générale et de grandes manifestations, organisées à la fois par les travailleurs et les étudiants.
Des lycéens des villes de Tunis et de Sfax sont également descendus dans la rue pour prendre part aux manifestations nationales.
Le soulèvement a atteint son paroxysme le 3 janvier et l'affrontement est devenu frontal entre les manifestants d'un côté et les forces de l'ordre public et l'armée de l'autre.
Les émeutiers sont essentiellement des jeunes et des paysans pauvres, des travailleurs saisonniers ou des chômeurs. Ils sont appuyés par les étudiants qui déclenchent une grève de solidarité. Bourguiba décrète l'état d'urgence. Pour disperser les manifestations, le gouvernement a donné l'ordre à l'armée et à la police de tirer sur la foule, faisant de nombreux morts et blessés parmi les manifestants. Cette répression a été suivie d'une vague d'arrestations arbitraires et de procès inéquitables. Bilan : plus de 100 morts et des centaines de blessés. Le lendemain, Bourguiba annonce l'annulation de la hausse du prix du pain et de la farine. Une semaine plus tard, il limoge le ministre de l'Intérieur, Driss Guiga, blâmé pour sa gestion des troubles.
La justice transitionnelle rouvre le dossier
Dans ce dossier, l'Instance vérité et dignité a enregistré 1.230 plaintes individuelles touchant 19 gouvernorats avec plus de 85 homicides, 213 blessés par balles et 932 arrestations et emprisonnements avec usage systématique de la torture et plusieurs viols sur mineurs. L'IVD a consacré une audition publique à ces événements au cours de laquelle plusieurs dizaines de victimes ont présenté leurs témoignages. Ces évènements ont été présentés dans le rapport final de l'IVD. Ils ont également fait l'objet de huit affaires en justice transférée par l'IVD aux chambres spécialisées en justice transitionnelle en décembre 2018.
La Une de La Presse de Tunisie du 7 janvier 1984
Récemment, la chambre pénale chargée d'examiner les affaires de justice transitionnelle au Tribunal de première instance de Tunis a examiné, pour la 20e fois, le dossier n° 34 relatif aux incidents du pain survenus en janvier 1984, au cours desquels des dizaines de personnes ont été tuées, et plusieurs autres blessées.
La chambre pénale avait précédemment entendu les témoignages des personnes concernées et des familles des victimes
Le cas de Fadhel Sassi
La chambre criminelle chargée d'examiner les affaires de justice transitionnelle près le Tribunal de première instance de Tunisie a entendu la sœur du syndicaliste et militant Fadhel Sassi, décédé dans les incidents du pain. Mounira Sassi raconte que son frère était professeur d'arabe et militant politique. Il était syndicaliste et membre du parti Al-Watad. Il avait 25 ans et vivait avec sa famille dans la médina de Tunis. Elle a expliqué que son frère avait décidé de sortir pour participer à ces manifestations, expliquant qu'elle l'avait rencontré le 3 janvier 1984 lors d'une des marches à l'avenue Charles-de-Gaulle, puis elle avait décidé de rentrer chez elle, mais que son frère Fadhel est resté sur place.
Mounira Sassi a expliqué que le 3 janvier, le couvre-feu a été décrété, expliquant que son frère n'était pas rentré chez lui depuis cette date, soulignant qu'il avait participé à une marche des étudiants et qu'il avait été abattu à l'avenue de Paris, et que le tir était intentionnel et ciblé.
La sœur du défunt a confirmé qu'elle n'avait reçu le corps que le 7 janvier 1984 et que la famille avait accepté les condoléances sans le corps de leur fils, expliquant que la dépouille avait été transportée directement de l'hôpital au cimetière sans la présence de la famille, notant que malgré cela, tous ses compagnons étaient présents et que ce furent des funérailles solennelles.
Interrogatoire de l'une des personnes accusées
Ahmed Bennour, ancien directeur général de la sécurité nationale, qui fait partie des accusés, a déclaré (avant son décès) plutôt qu'il avait été représentant à la Chambre des représentants jusqu'à la fin de 1979, date à laquelle il a été nommé secrétaire d'Etat en raison de son expérience au ministère de la Défense depuis 1974.
Il a mentionné qu'en 1980, il avait été nommé directeur général de la sécurité, après la tentative de coup d'Etat de Gafsa, et qu'il était chargé de superviser le département de la sécurité de l'Etat, l'information et la communication dans la sécurité extérieure. Il a expliqué que ses fonctions n'avaient rien à voir avec les émeutes et les manifestations internes qui relevaient de la police nationale.
Il a ajouté qu'au début des événements en décembre 1983, il était en mission en Arabie Saoudite et est retourné en Tunisie le 1er janvier 1984. Il a contacté le Président le 5 janvier et lui a demandé d'annuler l'augmentation du prix du pain. Le Premier ministre Mohamed Mzali était d'accord avec lui et a déclaré que le gouvernement n'avait aucune relation avec le Fonds monétaire international, comme indiqué dans l'acte d'accusation. Il a déclaré à l'Instance vérité et dignité que l'augmentation était due à un déficit du budget de l'Etat estimé à 176 millions de dinars, soit le montant alloué pour la compensation. Il a expliqué que le 7 janvier, le ministre de l'Intérieur de l'époque, tenu pour responsable des émeutes, avait été démis de ses fonctions.
Il a expliqué lors de son audition qu'il avait été limogé de son poste au cours du mois de mai 1984, suite à une conspiration de Mohamed Mzali. Il a confirmé qu'il était innocent de toutes les accusations qui pèsent contre lui.


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