Internet, musique et jeux vidéo, entre autres loisirs, l'emportent largement sur le livre. Les petits libraires subissent aujourd'hui l'effet boomerang de ce changement de comportement chez les petits, les jeunes et les moins jeunes Aujourd'hui, les enfants lisent peu, très peu et consacrent tout leur temps aux réseaux sociaux à tel point que des librairies ont carrément supprimé de leur vitrine les livres et n'ont gardé que les manuels scolaires et parascolaires. A la "librairie el Kiteb", qui est menacée de faillite, les clients qui s'intéressent aux livres se font de plus en plus rares et les enfants notamment ne semblent plus s'intéresser à la lecture, d'après le responsable. «C'est vrai que le secteur est en crise mais on doit prendre soin de l'enfant pour bien l'éduquer et assurer son équilibre psychologique tout en étant ouvert sur les cultures du monde. L'enfant doit être capable de critiquer, d'analyser et de réfléchir». L'enfant est roi Un peu plus loin, la librairie de la rue de Russie accueille à bras ouverts tous les passionnés de lecture. Wahiba, enseignante à la retraite, est parmi les rares personnes à aimer la lecture. Aujourd'hui grand-mère, elle a transmis le virus à ses enfants et ses petits-enfants. «Je ne peux dormir le soir qu'après avoir lu quelques pages d'un roman ou d'un magazine. C'est à l'école que j'ai eu le goût de la lecture des livres. Nos professeurs nous obligeaient non seulement à lire un livre, mais à le résumer en classe», précise-t-elle. «La tendance générale est maintenant est à la paresse», souligne un libraire qui a vu ses recettes chuter ces dernières années. Pourtant, les ouvrages de tout acabit se vendent au prix d'un dinar et demi sur les trottoirs de Tunis. «Rares sont les gens qui achètent. Il reste encore quelques mordus sur lesquels nous comptons», déplore un vendeur ambulant. Tous ces facteurs rassemblés n'incitent pas à la lecture. Les parents ne trouvent pas le temps d'acheter les bouquins car ils sont toute la journée au travail et leurs enfants s'intéressent à jouer plutôt qu'à lire .L'enfant tunisien en particulier, et l'enfant arabe en général, ne lisent presque plus. La cause : l'expansion des moyens de loisirs qui a eu pour conséquence l'abandon de la lecture. En effet, Internet, musique et jeux vidéo, entre autres loisirs, l'emportent largement sur le livre. Cette relation entre le jeune et le livre s'est dépréciée au fil du temps. Bouquiniste: un métier en voie de disparition Mahdi, un enfant âgé de 9 ans, se contente des livres du programme scolaire et il ne trouve pas suffisamment de temps pour élargir ses lectures. Il est souvent absorbé par son monde virtuel. «Je surfe souvent sur Internet. Une passion qui me prend énormément de temps, j'en suis devenu, à vrai dire, accro. Feuilleter mes manuels de classe est pour moi largement suffisant», souligne-t-il. Pourtant, lire des œuvres intégrales peut stimuler des découvertes littéraires autonomes, imprévues. «Avec l'avènement du numérique et des technologies de la communication, le livre n'est plus prisé comme auparavant. Il s'agit d'un phénomène mondial ne se limitant pas uniquement à la Tunisie. Il est temps de tirer la sonnette d'alarme, étant donné que la lecture nourrit l'âme. En d'autres termes, le livre occupait une place de choix dans le développement psychologique d'un enfant et améliorait sa capacité de s'intégrer dans le monde qui l'entoure. Il est temps de remettre les pendules à l'heure en impliquant davantage les parents dans un travail de sensibilisation», observe M. Fathi, enseignant de langue arabe. Le métier de bouquiniste ou de libraire n'est plus exercé que par une poignée de courageuses personnes mues beaucoup plus par la conviction et l'amour du livre que par le gain. Elles sont mal payées en retour. Elles souffrent et voient leur métier péricliter au fil des ans. A la rentrée, le chiffre d'affaires plonge effroyablement : tout le monde vend des cahiers et des livres. Les grandes surfaces dont les prix n'ont rien d'avantageux ne prêtent pas attention aux livres. Certains revendeurs commercialisent, quant à eux, des livres importés dont le contenu peut être dangereux pour les enfants comme c'est le cas des livres qui parlent du jihad et d'actes de violence. Des livres sont vendus sous le manteau car leur diffusion à large échelle est interdite. Le contrôle de ces livres vendus clandestinement doit être renforcé pour éviter de changer le comportement de nos enfants dans le mauvais sens. Honorer les bons lecteurs M. Ali Marzouk, responsable travaillant au ministère de la Culture, estime que «les futurs projets prévus par le ministère de tutelle consistent notamment en la modernisation des bibliothèques qui seront informatisées. Ce projet coûte 5 milliards de millimes. Un plan national sera institué en vue d'encourager toutes les générations à la lecture. Une coopération avec la Fédération nationale du livre est prévue pour atteindre cet objectif. Le plan en question impliquera 31 associations pour réaliser des compétitions artistiques au profit des enfants». Les lecteurs jeunes ou enfants qui lisent beaucoup plus de livres seront honorés, selon notre interlocuteur qui ajoute : «Parmi les problèmes soulevés par les enfants celui de l'absence de la technologie numérique, ce qui ne permet pas d'accéder à la lecture en ligne. La mise en place d'une stratégie pour sensibiliser tous les parents à l'importance de la lecture pourrait redonner au livre son aura d'antan». On doit aussi instituer les bibliothèques à l'école, encourager la lecture. Ni les circulaires ni les décisions administratives ne peuvent inciter les enfants à la lecture, c'est une question de conviction.