Les jeunes et la lecture, un thème pris et repris depuis quelques années, par les spécialistes et les responsables de l'instruction, de l'éducation et de la culture. Les jeunes ne lisent plus, cette phrase est martelée non seulement par les professeurs et les instituteurs, mais aussi, par bon nombre de médias. Le problème mérite, toutefois, plus qu'un jugement de valeur et qu'un slogan de presse. La lecture chez les jeunes par les temps qui courent, c'est bien connu, n'est pas très appréciée. L'expansion des loisirs a eu comme conséquence l'abandon de la lecture par les jeunes, surtout dans les grandes villes. En effet, Internet, musique et jeux vidéo, entre autres loisirs, l'emportent largement sur le livre. Cette relation, de plus en plus tendue entre les apprentis du savoir et cet objet de tous les désirs qu'est le livre, a sans doute ses raisons. Mahdi, récemment bachelier, avance, dans ce sens, qu'il se contente des livres du programme scolaire et qu'il ne trouve pas suffisamment de temps pour élargir ses lectures, étant donné, qu'il est souvent pris par son monde virtuel. «Je surfe souvent sur Internet. Une passion qui me prend énormément de temps, j'en suis devenu, à vrai dire, accroc. Feuilleter mes manuels de classe, cela m'est largement suffisant», souligne-t-il. Ce faisant, la scolarité joue un rôle décisif, mais ambigu. Sans l'école, de nombreux jeunes défavorisés n'auraient qu'un contact épisodique avec les livres. L'obligation de lire des œuvres intégrales peut stimuler des découvertes littéraires autonomes, imprévues. Mais on constate l'inverse : cette obligation éloigne aussi des livres. De plus, par sa logique pédagogique, la scolarité encourage la lecture utilitaire, comme le fait de consulter des encyclopédies et des dictionnaires, mais elle peut détourner le plaisir du texte, justement. Il va sans dire que l'acte de lire tire son essence aussi bien du plaisir que du travail, de la famille que de l'école, de la découverte personnelle que du bouche-à-oreille, acte qui, jusqu'au bout, même chez les lecteurs les plus fervents, reste fragile et menacé par la concurrence de l'image et du visuel généralement. «Avec l'avènement du numérique et des technologies de la communication, le livre n'est plus prisé comme auparavant. Il s'agit d'un phénomène mondial affectant, surtout, les jeunes et moins jeunes. De ce point de vue, il est temps de tirer toutes les sonnettes d'alarme, étant donné que la lecture nourrit l'âme. En d'autres termes, elle est cruciale pour le développement d'un enfant et pour sa capacité de faire un lien avec le monde qui l'entoure. Il est temps de remettre les pendules à l'heure. A partir de là, les parents seraient amplement, et avant quiconque, de la partie», observe M.Mohamed Ali S., enseignant de langue arabe. Tout est question d'initiation On ne sera pas étonné de constater une fois encore combien la culture familiale est déterminante dans l'initiation de l'enfant au livre. En effet, quels que soient leurs résultats scolaires et leurs origines familiales, les jeunes à qui leur mère a raconté des contes et des histoires quand ils étaient enfants, ainsi que ceux qui ont eu très tôt une bibliothèque dans leur chambre, sont les plus prédisposés à la lecture. Ces détails qualitatifs sont importants. D'ailleurs, selon une étude récente à ce sujet, à la différence du cinéma ou des émissions télévisées, les livres sont un sujet dont on parle peu au sein et en dehors de l'intimité, familiale ou amicale. La lecture commande une intimité qui n'est pas partageable par tous et partout. «Pour de jeunes lecteurs, confier leurs lectures, c'est ouvrir leur imaginaire. Aussi faut-il savoir les initier, puis, les accompagner», poursuit notre interlocuteur. Il y a lieu de noter, de surcroît, que la lecture est bien une activité fragile, et ses germes doivent être, en quelque sorte, ensemencés dès le plus jeune âge. D'autres éléments interviennent, comme la proximité d'une bibliothèque de prêt qui a un rôle positif de maintien et d'accompagnement de la lecture. Car les enfants, comme les jeunes, aiment en général ces bibliothèques où ils trouvent les documents et le calme pour leur détente ou pour le besoin de leurs études. Les magazines aussi, qui concurrencent le livre quelquefois plus que la télévision, alors même qu'ils s'inscrivent dans les activités de lecture. La lecture est, au demeurant, un acte, auquel concourent tant d'institutions : l'école, la famille, le ministère de la Culture et qui rencontre des adversités. Cet acte est fondamentalement indécidable. «Aucune volonté, ou désir externes, ne peut prescrire à un jeune d'entrer spontanément dans la lecture des livres, comme si cela allait de soi. Celui qui sème récolte, comme on dit. Cela dit, les parents sont appelés à servir de bons exemples pour leurs enfants, même en se contentant de la présence de ce livre chez eux. C'est une question psychique, avant tout. Il faut savoir inculquer à son enfant la place et l'importance du livre dans la vie humaine», relève, Mme Amna R., professeur d'anglais. A méditer…