Ceux qui ne sont pas satisfaits de l'équipe ministérielle révélée samedi dernier ont eu gain de cause. Youssef Chahed a accepté de revoir certains de ses choix On croyait que Youssef Chahed avait fait l'essentiel en annonçant, samedi après-midi, la composition du gouvernement d'union nationale qu'il est censé présider jusqu'à l'expiration du mandat électoral issu des législatives du 26 octobre 2014, c'est-à-dire jusqu'à fin 2019. Et avec l'ouverture de Youssef Chahed sur tous les signataires du Pacte de Carthage qui se sont vu offrir, chacun, au moins un poste ministériel ou un secrétariat d'Etat, on croyait également que le passage du gouvernement devant le parlement pour obtenir sa confiance était une affaire de quelques heures, ni plus ni moins. Sauf que les mécontents de la copie présentée par Youssef Chahed ne sont pas restés les bras croisés refusant d'accepter que les dés soient jetés et que ceux qui n'ont pas été choisis en tant que ministres peuvent attendre le prochain remaniement. Dimanche 21 août et hier, lundi 22, les mécontents, qu'ils appartiennent à Ennahdha, à Nida Tounès ou aux partis de l'opposition qui ont été écartés dès le départ du processus ayant abouti à la naissance du gouvernement Youssef Chahed, se sont mobilisés pour dire aux Tunisiens : «Oui, Youssef Chahed a fait ce qu'il pouvait mais il a commis des erreurs et il est urgent qu'il les répare s'il tient à ce que son gouvernement obtienne la confiance des députés avec une marge aussi large que possible». En d'autres termes, Youssef Chahed est appelé à revoir sa copie, d'ici vendredi prochain, date de la séance plénière au parlement au cours de laquelle il sollicitera la confiance des députés. Revoir sa copie signifie clairement : il y a des ministres qui doivent partir (Abid Briki et Samir Taïeb, Majdouline Cherni, Mohamed Zine El Abidine en premier lieu) et d'autres doivent impérativement retourner au gouvernement (Saïd Aïdi qui bénéficie du soutien de 40 députés nidaïstes) ou y être intégrés tout en répondant à ses désirs, voire caprices (Marwane Abassi qui exige à lui seul un pôle ministériel, en l'occurrence le pôle économique ou au moins un droit de regard sur les ministères à caractère économique). Les arguments des uns et des autres Et les révélations ayant accompagné l'annonce par Youssef Chahed de son équipe de se multiplier. Abdellatif Mekki, président du Conseil de la choura d'Ennahdha, précise : «Nous n'avons pas été consultés avant l'annonce de la liste ministérielle. Le Conseil de la choura s'est réuni pour un dialogue franc et profond sur la position à prendre. Nous allons soutenir la liste définitive». Mais que veut dire El Mekki en parlant de «liste définitive» ? Il ne faut pas être sorcier pour comprendre qu'Ennahdha veut que Youssef Chahed revoie sa copie, et même si les nahdhaouis sont globalement satisfaits des postes ministériels qui leur ont été octroyés, «ils exigeraient que certains noms disparaissent de l'équipe révélée, samedi dernier, par Youssef Chahed». Du côté de Nida Tounès, c'est toujours le règne de la division. Hafedh Caïd Essebsi, directeur exécutif du parti, assure que les députés nidaïstes donneront leur aval au gouvernement Youssef Chahed qui «a fait montre de son ouverture sur les jeunes et les femmes et de sa détermination à respecter le Pacte de Carthage», comme il l'a souligné, hier matin, sur les ondes d'une radio privée. Sur les ondes de la même radio, un député nidaïste parlant au nom de dix-neuf de ses collègues menace de démission «si Youssef Chahed ne revoit pas certains de ses choix». Et il semble que le chef du gouvernement désigné a bien compris le message aussi bien des nahdhaouis que des nidaïstes qui refusent d'être dirigés comme des enfants par Hafedh Caïd Essebsi. Hier après-midi, il a rencontré Yassine Brahim, le président d'Afek Tounès, qui a décidé de se consacrer exclusivement à la direction de son parti. Et Youssef Chahed lui aurait assuré qu'il était disposé à revoir ses choix, donnant, ainsi, le signal à un nouveau round de négociations qui ne devrait pas dépasser la journée de jeudi prochain. Faut-il rappeler que Youssef Chahed sollicitera officiellement l'aval des députés, vendredi prochain. Donc, les journées du mardi, mercredi et jeudi seront déterminantes pour voir Youssef Chahed apporter les corrections qu'il faut à son équipe et préparer la déclaration de son gouvernement qu'il soumettra aussi au vote des députés. Ceux qui ont, déjà, fêté leur désignation au gouvernement vivront trois jours d'attente très pénibles et très éprouvants.