La voix d'or de Naâma a chanté les paroles du grand poète Tahar Kassar, dans une musique de Abdelhamid Selaïti El bir wessafsaf wel naoûra. Un hymne dédié au Saf-Saf, un lieu mythique de la banlieue de La Marsa. Et c'est dans ce lieu même qu'est célébré chaque année «Le cercle de la vigne». Un des galas les plus intéressants organisé chaque mois de septembre à La Marsa. En ces termes-là, les vallées entourant cette ville, aussi bien du côté de Jebel El Manar que de celui de Gammarth, étaient plantées de vigne, d'arbres fruitiers ou encore de fleurs dégageant des senteurs enivrantes. Les mieux nantis y tenaient à l'époque des assemblées artistiques ou des cercles littéraires à leurs heures perdues, pendant les vacances d'été. A partir du sommet de Jebel El Manar ou de Forn Echafak à Gammarth, de luxuriantes végétations s'offrent à perte de vue. La majorité des vignes sont du genre errazgui importé du Hijaz par les conquérants arabes, beldi hérité des Carthaginois, ou meski andalou. Les palais hafsides Le café Saf-Saf puise ses racines dans l'époque des Hafsides lorsqu'ils transformèrent le coin d'un petit village de pêcheurs en un splendide repère de villégiature où ils ont établi leurs palais à l'architecture hautement distinguée : palais El Afsi, le grand palais El Abdellya (Borj esselassel), le petit palais El Abdellya… Ce petit village se transforma vite en une importante cité offrant de nombreux parcs, jardins et monuments, dont «Kobbet El Hwa». La position de La Marsa, nichée entre Jebel Gammarth et Jebel El Manar, mais également les nombreux mausolées qu'elle abritait, le plus important étant celui de Sidi Salah El Janah, dont le nom s'identifia à celui de la ville, baptisée Marsa El Janah, lui donnèrent une nouvelle dimension. Le café Saf-Saf devint ainsi le lieu privilégié des estivants. Il sera le second café construit dans notre pays, après Maqha essebt» (café du samedi). Les Mouradites, à partir de 1007 de l'Hégire, installèrent leurs habitations à La Marsa. La fête de la vigne sera célébrée à Jebel El Manar et à la Marsa, au café Saf-Saf, à partir de l'exode des Andalous de l'Espagne vers la Tunisie, en 1017 de l'Hégire. On orne le dromadaire du Saf-Saf et on l'habille comme une jeune mariée. Puis on lui fit faire une tournée dans les environs. Une troupe musicale le suit dans ses visites aux maisons de La Marsa dont les propriétaires offrent de l'argent ou une pièce d'or au chamelier. Une troupe jouait du malouf au Saf-Saf, alors qu'au jardin El Hafsi, on vendait toutes sortes de vignes. Car, n'oublions pas qu'on est en pleine fête de ce fruit qui fait tourner la tête de l'humanité entière. Fêtes et traditions La fête de Achoura représente un vrai régal pour les enfants qui se rassemblent pour allumer un grand foyer de feu. Chacun d'eux se transforme en petit pyromane capable de provoquer une lohliba. On juge lequel des quartiers a pu allumer le feu le plus important. Lors de la fête incontournable au foyer des musulmans, la circoncision (etthour), on rassemblait les enfants du kouteb pour fêter le jeune circoncis. On leur offrait un sachet de mahkouka, des friandises préparées à l'occasion. Raoul Journo a chanté Taalilet el mtahar (l'hymne au circoncis) mais également Taalilet laaroussa (de la mariée). On chante également les travaux agricoles, les métiers artisanaux, les fruits aussi : «Ibarek fi trabek ya Tounès» écrit par Ali Douagi et composé et chanté par Salah Khémissi. hymne aux villes et aux régions Tahar Kassar, un des fondateurs de la Rachidia, a été un grand poète aussi bien en arabe littéraire qu'en arabe dialectal. Il a ainsi chanté la gloire de nombreuses régions et villes du pays. Outre El bir wessafssaf wénâoura, dédié à La Marsa, il a écrit Sidi Bou Saïd ya ghali, un hymne à la splendeur de Sidi Bou Saïd composé et chanté par Ali Riahi, Ya Nabeul ya blad ezzhar, une déclaration d'amour pour la coquette capitale du Cap Bon, chantée et composée aussi par Ali Riahi. Aïcha a chanté du Tahar Kassar Ya Tozeur composée par Ali Riahi, alors que Fethia Khairi a repris son poème sur l'Ariana. Saliha a également chanté des paroles sublimes de Tahar Kassar. Un homme de lettres raffiné et très inspiré.