L'attaquant le plus doué de sa génération, c'est ainsi que l'on peut décrire et cataloguer «JO» Limam, l'avant furtif, pur produit du Stade Tunisien. L'on se rappelle tous cette mère de toutes les volées exécutée avec finesse, hargne et précision. Un but qui a fait trembler le stade olympique d'El Menzah avec un Limam intenable qui a porté la Tunisie à bout de bras. Limam est le prototype du joueur qui, en trois touches de génie, fait la différence. Ses buts d'anthologie tantôt, décisifs et historiques de temps à autre, sont toujours vivaces dans l'esprit des passionnés et adeptes du beau jeu. Buteur, détonateur, mais aussi passeur émérite, il a toujours su trouver le moyen d'illuminer ces belles et ardentes après-midi dominicales que ce soit sous la casaque stadiste ou clubiste. Transversales chirurgicales, diagonales déroutantes, puissance, coups de rein et accélération fulgurante, «JO» est un virtuose d'une impeccable précision. Tantôt il tente la reprise de volée, sur le coup d'après, il veut contrôler le ballon, avant ou après le rebond. Limam est un esthète qui enchaîne pour l'amorti aérien, quand il ne décoche pas une lourde frappe en première intention. C'est un hyper-stable balle au pied. Car le football est aussi question d'équilibre. Calme, mais aussi mobile que possible, comme s'il tenait debout sans bouger, il donne toujours l'impression de caresser un cuir qui lui colle au pied. La coordination et la grâce sont stupéfiantes chez ce joueur. Tout en finesse, tout en contrôle. Car le ballon retombe à l'endroit idéal, et parce que sa vitesse est réajustée pour permettre la suite de l'enchaînement. La maîtrise technique de «JO» est divine, autant que sa conception du football est brillante. Sa philosophie du jeu est claire: derrière chaque action, il doit y avoir une pensée. Dans sa perception et sa lecture du jeu, le toucher du ballon est un moment suspendu. Car Limam choisit toujours l'irréalisable, l'angle fermé, la position difficile, le choix improbable et risqué. Personne ne prévoit le geste, sauf lui ! Une frappe puissante qui part un peu en cloche, juste ce qu'il faut, et à la fois sa vitesse et sa trajectoire qui témoignent de la maîtrise du geste. Du Limam tout craché ! Le public tunisien, particulièrement celui qui a la chance de prendre d'assaut les travées d'El Menzah pour admirer la classe de « Jo », a toujours semblé aussi stupéfait qu'ému par tant de force et d'élégance. Pour la postérité, il y a du «poetic lover » chez ce joueur, du génie incarné par tant de grâce, balle au pied. Des doublés, il en a claqué à volonté, relançant plus d'une fois un team Tunisie qui en avait bien besoin. Enchaînement supersonique, reprise de volée ou tir en finesse. Avec, en plus, la mélodie du tempo chez un joueur prodigue tout en donnant l'impression de doser ses affaires. «Des offres de Charleroi, Torino et Nice» Sans transition, laissons la parole à cet illustre champion, un exemple de droiture pour les jeunes et un modèle de dévouement sur le terrain: «J'ai cumulé à mes débuts les postes d'attaquant et de milieu de terrain offensif. Le haut niveau, pour moi, a débuté en 1986 et s'est achevé en 2003. Par la suite, j'ai embrassé une carrière d'agent de joueurs Fifa (l'appellation a changé en intermédiaire Fifa) et de dirigeant au CA et au ST. Je compte à mon actif quelque 50 sélections. Outre le ST et le CA où j'ai évolué, j'ai aussi embrassé une carrière pro en Allemagne et en Belgique, respectivement à l'Eintracht Braunschweig et au Standard de Liège. Enfin, j'ai aussi évolué en Arabie Saoudite du côté d'Al Ittihad Djeddah. Chapitre palmarès, j'ai gagné la Ligue des champions arabes en 1997, la Coupe arabe des vainqueurs de coupe en 2001, la Coupe de Tunisie en 1998 et en 2000. Et, enfin, la Coupe de la Ligue tunisienne de football en 2002. Volet techniciens qui m'ont impressionné, je garde le souvenir d'un Jean Vincent perfectionniste et protecteur. Les bons moments sont nombreux pour moi. Je me rappelle le Soulier d'or tunisien de 88. Je vais maintenant faire un saut vers l'expérience professionnelle en Belgique. Ça m'a marqué car j'ai découvert le très haut niveau du football par rapport à notre championnat local. Sauf que je n'étais pas assez armé et pas assez expérimenté pour y réussir pleinement. Je crois que j'aurais eu une carrière nettement plus brillante si je n'avais quitté la Tunisie qu'à 25 ans. J'ai même attiré au Standard quelque peu par hasard après que le portier Bardolais où j'évoluais , avait passé un test à Sclessin. Il n'a pas été enrôlé mais il a cité mon nom aux tenants de l'équipe de Liège. Et on finit par me transférer. Au Standard, j'étais sous les ordres de d'Urbain Braems. J'ai marqué 12 buts et j'ai côtoyé les Rosenthal, Czerniatynski, Sclessin Hellers, Tikva, Bodart et Marc Wilmots. La seconde saison, j'ai joué de malchance. George Kessler a débarqué d'Antwerp et il a ramené avec lui Van Rooij pour occuper mon poste. Je voulais partir mais le manager du club, Roger Henrotay, a refusé de m'accorder mon bon de sortie car j'étais encore sous contrat. J'ai eu des offres de Charleroi, le Torino et Nice. Mais ça ne s'est pas fait. Puis, le Standard m'a prêté à l'Eintracht Braunschweig, en D2 allemande. Dans la foulée, on m'a cédé à Ittihad Djeddah. J'avais 25 ans et j'ai décidé de revenir en Tunisie au Club Africain, puis j'ai fini ma carrière dans mon club de cœur, le Stade Tunisien. Volet international, ma carrière fut jalonnée de succès. Du but en or qui a donné le titre arabe au CA face à Al Ahly en 1997, à la Coupe de Tunisie glanée en 2008, en passant par l'éclatante qualification au Mondial 98 au Caire même, j'ai vécu des moments forts. J'ai aussi côtoyé des joueurs valeureux qui sont maintenant des amis à l'instar de Kouki, Hadj Ali, Faouzi Rouissi, Ncibi, Rakbaoui, Hergal, Saber Ghoul, Bouzaiene, Lahnini, Jelassi, Amrouche, Mokrani, Khaled Fadhel, Sabri Jaballah et j'en passe. Sauf que, même pour un international capé à 74 reprises, il y avait toujours ce goût d'inachevé car j'en voulais encore plus, toujours plus haut, toujours plus fort ! »