«La réforme devrait avoir une destination et une carte éducative bien déterminée, avec trois idées-clés : qualité, équité et intégration», déclare M. Tijani Gmati, directeur général des programmes et de la formation continue au ministère de l'Education Lancé, il y a deux ans, le grand chantier de la réforme éducative semble révéler tous ses secrets. Bon gré mal gré, le marathon du dialogue et des concertations a, enfin, abouti à des recommandations en cascade. Cette expérience qui a fait appel à des organisations civiles et des partenaires sociaux, dont notamment l'Ugtt et l'Institut arabe des droits de l'Homme (Iadh), a été exposée, hier, lors d'une journée d'études tenue au Centre culturel scolaire Mahmoud-Messadi à Tunis, lequel a été tout récemment inauguré par M. Neji Jalloul, ministre de l'Education. Ce dernier, pourtant attendu à ce rendez-vous, a brillé par son absence, justifiée par son accompagnement du chef du gouvernement à l'ouverture officielle de la Foire du livre au parc du Kram, dans la banlieue nord. Trop tard, par rapport à l'heure initialement prévue, M. Adel Hadad, inspecteur général d'éducation, a été pris de court pour assurer l'ouverture des travaux, en lieu et place du ministre. Le processus de réforme, avance-t-il, s'inscrit dans un contexte révolutionnaire en perpétuelle mutation, ce qui fait que la mission n'est guère une sinécure. D'autant plus que l'on a placé haut la barre des attentes et ambitions des Tunisiens à une école publique véritablement gratuite, inclusive, juste et de qualité. C'est, d'ailleurs, l'ultime but de la réforme, à même de faire de l'élève la finalité de tout acte de révision. Ainsi, l'épilogue du dialogue national sur le projet de réforme éducative demeure au cœur de cette démarche. A terme, les 15 commissions ayant longuement travaillé sur ce projet ont fini par rendre leur copie. Ce dont avait trop parlé M. Tijani Gmati, directeur général des programmes et de la formation continue au ministère de l'Education. Loquace, il a bien détaillé son intervention sur les nouvelles recommandations, fruit de moult réunions d'échanges et des concertations entre le ministère et ses partenaires sociaux (Ugtt, Iadg), mais aussi avec la participation de la société civile concernée. Le premier acte a eu lieu, depuis avril 2015, date à laquelle ce dialogue inter-acteurs fut engagé, en grande pompe, mais non sans difficultés de parcours. L'école de demain, quel profil ? L'essentiel, pour lui, est de savoir tracer les contours de l'école de demain. « Sa réforme devrait avoir une destination et une carte éducative bien déterminée, avec trois idées-clés : qualité, équité et intégration», résume-t-il. Et d'expliquer que ce trio conceptuel consacre l'essence de la réforme, voire sa philosophie. Cela ne peut se faire, à ses dires, que dans une logique mondialisée, particulièrement dictée par des considérations nationales à la fois identitaires, démocratiques et constitutionnelles. Un contexte universel à laquelle se joint l'élève tunisien. Cette nouvelle vision commande, poursuit-il, l'adoption d'une approche participative et systémique qui tient, d'une manière progressive, à mettre en œuvre ce projet de réforme d'ici 2020. « L'on a déjà commencé à poser les premiers jalons de l'édifice, en introduisant, à partir de cette année, une licence appliquée et un master professionnel en matière de sciences de l'éducation», indique-t-il. Il y aura, a-t-il encore ajouté, d'autres défis à relever, s'agissant de la pédagogie, des compétences, de l'insertion économique et sociale et de la bonne gouvernance. Constitution, conventions internationales, code des droits de l'enfant sont autant de références déjà prises en considération. Selon lui, la boussole de la réforme s'est orientée vers les principes généraux de l'éducation, en tant que priorité nationale. Il est, aussi, question de revoir la situation : droit à l'enseignement préscolaire, l'obligation de scolarisation jusqu'à l'âge de 16 ans et l'intégrité de l'école. Le message de l'école ? Il y a, plutôt, des messages dont l'égalité des chances entre tous, le respect des droits de l'enfant et la culture de citoyenneté et de conciliation entre l'élève et son école. «Le profil du diplômé doit être enraciné dans son identité arabo-musulmane, et encore plus ouvert aux autres valeurs du monde», prévoit-il. Un projet de loi en gestation Par ailleurs, l'orateur a énuméré, au total, neuf objectifs à atteindre. Il s'agit, entre autres, de l'équité, de la révision de la carte scolaire, du développement des compétences d'apprentissage, de la modernisation de la vie scolaire, de la restructuration de l'enseignement et les pistes d'orientation, la lutte contre l'abandon scolaire, la gouvernance et la numérisation de l'école. Et les projets à réaliser rentrent dans le même cadre : une école pour tous, amie de l'enfant, infrastructure de bonne facture, Internet à haut débit, accompagnement des élèves en détresse, récupération des élèves ayant interrompu leurs études, révision du temps scolaire et du système disciplinaire, la séance unique, l'introduction des langues vivantes. L'ensemble de ces points ont été intégrés dans le contenu du projet de loi relatif aux principes généraux de l'éducation et d'apprentissage. M. Fethi Zaremdine, directeur général des affaires juridiques au ministère, en avait bien parlé, soulignant que ce projet sera prochainement soumis à la présidence du gouvernement. « En gestation, il est encore à l'étude, dont tous les intervenants sont invités à y donner leur avis. Ce projet constitue le couronnement d'un parcours participatif qui rompt avec toute décision d'en haut», conclut-il.