Après avoir constitué avec Khemaïs Laâbidi et Moncef Ouada un trio talentueux en attaque, Kacem Jabbès contribue à l'accession de la JSK en division nationale puis à son unique titre de championnat en 1976-1977. Avec sa finesse habituelle, il a révélé ce qui a marqué sa carrière malgré ses déceptions comme joueur ou entraîneur. La clairvoyance des dirigeants C'est feu Moncef Troudi, mon professeur de sport au lycée, qui m'a encouragé à rejoindre les jeunes de la JSK. Encore jeune de 17 ans j'ai accaparé l'attention de l'entraîneur de l'équipe seniors, le Yougoslave Stephanovic. J'ai rejoint les seniors malgré mon jeune âge en présence des chevronnés Tijani Gueddah, Mohamed Regaïeg et Azaïez Mokni. Ma première apparition officielle fut une réussite, puisque j'ai inscrit un but à El Menzah face à l'équipe d'El Ittihad El Magharebi. Malgré la relégation en 1972, les responsables ont assisté le groupe. Le travail des techniciens yougoslaves Stéphanovic puis Dragan nous a donné plus de confiance et nous avons acquis l'expérience nécessaire. Nous avons retrouvé la division nationale avant de remporter le championnat de Tunisie en 1977. C'est le projet de toute une génération grâce à la présence de dirigeants ambitieux tels Hamda Laâouani, Aziz Miled, Salah Essid, Omar Aouina et d'autres. Ils étaient des responsables compétents. Nous avons créé un groupe rassemblant ambition et expérience. Hélas, certains proches du club ont mis fin à ce projet. Un attaquant talentueux A l'époque, on jouait sans soucis en défense. On cherchait à plaire à notre public. J'ai été en attaque avec Ouada et servi par Laâbidi. Nous ne faisions pas de calcul. Un buteur doit avoir le métier d'inscrire des buts sans tenir compte de la défense de l'adversaire. Plusieurs supporters gardent en mémoire mon but en 77 face à l'EST à Kairouan ou celui face à l'ESS à Sousse. Toutefois, j'ai inscrit d'autres buts remarquables comme celui de la victoire face au SAMB à Menzel Bourguiba. Une retraite anticipée Après dix ans avec la JSK, j'ai été écarté du groupe notamment après l'arrivée du jeune entraîneur Omar Dhib. J'ai compris que je ne faisais plus partie des choix du nouvel entraîneur. J'ai décidé de prendre ma retraite à l'âge de 27 ans seulement. Ce fut une déception pour moi, j'ai senti l'ingratitude de la part de mon équipe, ce qui m'a beaucoup touché. Quelques mois plus tard j'ai été convoité par Mohsen Hebacha pour rejoindre la STIA. En 1982, j'ai passé une saison remarquable et j'ai participé à l'ascension de l'équipe en D1. Mais je n'ai pas continué à cause des séquelles de mes anciennes blessures au genou. Mon médecin m'a interdit de continuer à jouer. Une autre déception avec la JSK Après des années de travail avec le club Al Wakra au Qatar, j'ai cherché à améliorer mon expérience et j'ai réussi l'ascension avec des équipes divisionnaires comme Enfidha, Kalaâ Sport, Jammel, Chebba, Métlaoui et Sidi Bouzid. En 2003, j'ai repris avec la Chabiba comme entraîneur mais j'ai remarqué que les joueurs sont indisciplinés. Pour leur part, les dirigeants n'ont pas tenu leurs promesses, faute de moyens, m'ont-ils dit. J'ai senti un relâchement de la part de mes protégés. La JSK est incapable de s'imposer face à ses adversaires. A la fin de la phase aller, placés en sixième place de D2, j'ai préféré partir pour le bien de la Chabiba. J'ai été touché moralement par cette sortie par la petite porte alors que les mêmes dirigeants ont satisfait les demandes financières de mon successeur et ont renforcé le groupe par de nouvelles recrues. La Chabiba : besoin de changement Depuis les années 80, la Chabiba enfante des joueurs de qualité ;en revanche, il y a un manque d'assistance et de travail orienté pour améliorer leurs talents. Certains dirigeants du club ignorent les conditions de travail des techniciens, ils ont désorienté le travail technique et l'équipe est obligée de vendre ses joueurs pour financer ses engagements. Toutefois, la JSK est capable de se tirer de cette situation, grâce à la richesse de son effectif, à la bienveillance de son staff technique, aux encouragements de ses fans et sympathisants et à la solidarité de ses joueurs. La stratégie du club doit être remaniée sur de bonnes bases. Plusieurs enfants du club, qui étaient des joueurs brillants, sont capables de diriger le club de la meilleure manière. Dans les prochaines élections, j'espère voir de nouveaux dirigeants capables de défendre l'intérêt du club pour retrouver l'éclat de l'équipe comme au passé. Kacem Jabbès est une figure nostalgique pour le public kairouanais. Son expérience et ses qualités techniques seront un atout pour la formation des jeunes talents de l'équipe.