L'Office national de la famille et de la population (ONFP) a organisé récemment une table ronde sur le thème de la femme ménopausée. La ménopause chez la femme reste aujourd'hui un sujet tabou dans la société tunisienne. Lors d'une table ronde qui a été organisée récemment, en marge du 13 août, journée nationale de la femme, Mme Sonia Ben Cheikh, présidente-directrice-générale de l'Onfp, a affirmé que le traitement médiatique de cette question reste insuffisant. Aujourd'hui, après l'adoption de la loi organique contre les violences faites aux femmes, «il est plus que jamais impérieux de briser le silence autour de cette question», a-t-elle ajouté. L'intervenante a, en outre, indiqué que «le choix de ce thème s'inscrit également dans la volonté d'améliorer la qualité de la vie des femmes et jeunes filles tunisiennes. Il s'agit d'investir davantage dans la prévention et la prise en charge psychologique et médicale. L'objectif étant de leur garantir, pendant la période qui succède à la ménopause,une bonne qualité de la vie grâce à l'information et la sensibilisation», renchérit-elle. La sociologue Dorra Mahfoudh Draoui a présenté dans son rapport les résultats d'une étude menée en 2008. Il existe trois types de femmes ménopausées: les ménopausées résignées. Elles ont une tendance à associer la sexualité à la reproduction et la vivre comme un devoir et une obligation. La deuxième catégorie concerne les femmes ménopausées qui vivent l'arrêt du cycle menstruel comme un soulagement et la troisième typologie concerne, quant à elle, les ménopausées, épanouies qui vivent leur sexualité comme un droit légitime et refusent d'associer la ménopause à la vieillesse. La ménopause vécue comme une libération La ménopause a des dimensions multiples liées à l'arrêt du cylce. L'arrêt des règles agit sur l'arrêt de la fécondité. Elle s'accompagne sur le plan biologique d'un bouleversement du corps humain féminin qui se manifeste, entre autres, par le changement de la libido. Le vécu de la ménopause varie selon qu'on vive en milieu rural ou urbain. En effet, le sentiment de libération ressenti après l'arrêt du cycle reste fortement influencé par le milieu sociodémographique. Les femmes rurales se sentent plus épanouies à la ménopause que les urbaines, ajoutant que ce sentiment augmente avec l'âge, a souligné la sociologue. Beaucoup d'entre elles voient cette période non comme une perte ou privation mais plutôt comme une libération vis-à-vis de la procréation, du pouvoir masculin et du contrôle social de leur vie. D'une manière générale qu'elles soient actives ou non. Ménopause : femme clairvoyante, avertie... Des études ont montré que la ménopause peut être vécue comme une période valorisante, qui offre des possibilités d'améliorer la position sociale de la femme (plus de respect, plus de pouvoir). L'expression «mra bi akalha» en arabe dialectal signifie que l'âge de la ménopause correspond à une période où la femme fait montre de davantage de sagesse et de clairvoyance selon le dicton populaire. C'est surtout en milieu rural que le respect comme indicateur de valeur sociale est associé au statut de la femme ménopausée. Mais l'importance de je ne sais pas' laisse entendre que cette norme n'est pas consensuelle, selon l'étude présentée par Mme Dorra Mahfoudh. Les urbaines pensent, par ailleurs, que la ménopause ne leur fait pas perdre forcément la capacité de plaire et qu'elles restent tout aussi désirables. La plupart des femmes questionnées dans le cadre de l'étude ont reconnu, toutefois, craindre de perdre, avec la ménopause, leur capital séduction. Généralement, elles n'informent pas leur entourage de leur ménopause afin de ne pas se plier aux règles imposées par la société qui veut, qu'auprès 50 ans, la femme renonce au désir de plaire (cacher son corps, se voiler...). Ménopause et chamboulement du corps humain Selon Dr Selma Hajri du Groupe Tawhida Ben Cheikh, les symptômes de la ménopause se traduisent essentiellement par des suées nocturnes, des bouffées de chaleur et l'arrêt du cycle menstruel. Précisant, toutefois, que certaines femmes peuvent souffrir pendant cette phase de transition qui se traduit par plusieurs désagréments : sécheresse intime, infections urinaires et douleurs articulaires. Violences à l'égard des femmes après la ménopause Les femmes âgées présentent un ‘cumul de vulnérabilités'. Elles sont à la fois victimes des stéréotypes liés à leur sexe et de ceux liés à la vieillesse. Si on parle désormais plus facilement des violences faites aux femmes, d'une part, et des violences aux personnes âgées, d'autre part, celles qui sont perpétrées à l'égard des ‘vieilles dames' constituent un sujet récurrent des campagnes de sensibilisation. Il est difficile de quantifier de façon très précise ce type de la violences, faute de données statistiques spécifiques. La vulnérabilité affective constitue un des aspects primordiaux de la dynamique de violence. Il est donc possible d'affirmer que la violence à l'égard des personnes âgées peut être la continuité d'une dynamique de violence conjugale. Les recommandations sur la prévention de la violence doivent, par conséquent, s'appliquer également aux femmes au-delà de 50 ans afin d'évaluer le vécu et l'impact socioéconomique et psychologique des femmes ayant subi diverses formes de violences dans leur passé, perpétrées par des membres de leur entourage. La femme ménopausée doit également consulter un nutritionniste pour protéger sa santé. Ménopausée, épanouie... pour une meilleure qualité de la vie. C'est notre objectif principal», a conclu Mme Sonia Ben Cheikh.