L'Utica n'acceptera pas de taxes supplémentaires pour les entreprises, les professions libérales exigent un code fiscal sur mesure, l'Ugtt réserve sa position officielle. La réunion de jeudi risque d'être très chaude Le projet de loi de finances 2018 semble avoir réussi à rassembler tout le monde ou presque contre les nouvelles dispositions qui y sont prévues. Partis politiques au pouvoir et dans l'opposition, organisations syndicales ouvrières et patronales et experts tous azimuts, dont plusieurs signent pour la première fois leur accession au club des détenteurs de la science infuse, se sont donné le mot pour s'entendre sur une idée commune : la copie préparée par Youssef Chahed et ses conseillers n'est pas celle que les Tunisiens attendent et ils ne sont pas prêts à voir leurs impôts augmenter, à accepter que les entreprises qui travaillent et font travailler leurs enfants soient pénalisées par de nouvelles taxes, alors que ceux qui ne payent rien à l'Etat depuis Bourguiba et Ben Ali et sucent, en prime, l'argent de l'Etat en refusant de restituer à la trésorerie publique les crédits qui leur ont été accordés ne seront pas inquiétés ou même visités par les membres de la police fiscale. Ces derniers attendent, en effet, les suites de la réconciliation administrative dans la mesure où il est pratiquement acquis que la réconciliation économique, c'est-à-dire l'amnistie en faveur des opérateurs ayant pioché à volonté dans les caisses de l'Etat, est sur les rails. On attend une initiative. En attendant aussi bien les partenaires du gouvernement d'union nationale que ceux qui s'y opposent se mobilisent quotidiennement, à travers les médias, pour dire à Youssef Chahed ce qu'ils pensent du draft de sa loi de finances 2018 (la copie définitive n'est pas encore prête) et de son programme économique et social ou de sa feuille de route 2018-2019 dont les grandes lignes ont été exposées lors de la séance plénière d'obtention par le nouveau gouvernement de la confiance du Parlement. Hier, était prévue une réunion groupant le chef du gouvernement avec les représentants des partis et organisations signataires du Document de Carthage en vue d'examiner les grandes orientations de la loi de finances 2018 et de transmettre à la présidence du gouvernement leurs observations et leurs propositions à propos de la feuille de route gouvernementale comme l'a annoncé Youssef Chahed lui-même devant les députés en affirmant qu'elle reste ouverte à toutes les suggestions. Malheureusement, la réunion en question a été reportée à jeudi prochain et c'est Issam Chebbi, secrétaire général, qui a passé l'information sur Radio Mosaïque en précisant qu'il ne sait pas pourquoi la réunion a été renvoyée à plus tard. L'Ugtt poursuit ses réunions Le report de la réunion-concertation d'hier n'a pas empêché l'Ugtt de poursuivre ses consultations internes en vue d'arrêter une position définitive sur le contenu de la loi de finances 2018 et sur la feuille de route du gouvernement. Jusqu'ici, les syndicalistes se sont contentés de déclarations faites par Noureddine Taboubi et Bouali M'barki répétant les positions initiales de l'Ugtt comme la préservation du pouvoir d'achat du citoyen, l'opposition ferme à l'augmentation de la contribution individuelle de l'affilié au système de décompte de la retraite, l'appel à une lutte efficace contre l'évasion fiscale, la récupération des dettes de l'Etat auprès des entreprises privées qui ont pris l'habitude de ne pas payer leurs impôts. Des sources syndicales confient à La Presse : «La réunion d'hier a consisté en une première approche des dispositions que contiendra la loi de finances 2018. Notre approche s'est fondée sur les révélations publiées par les médias. L'Ugtt ne dispose pas de la copie de la loi qui sera soumise aux députés. C'est la raison pour laquelle nous n'avons pas arrêté une position définitive». Et dans l'attente que les syndicalistes de l'Ugtt publient officiellement leur position, ce sont les professions libérales qui s'expriment sur la loi de finances qu'elles considèrent comme «un pas dans la mauvaise direction visant à obéir aux directives du FMI». Dans un communiqué publié hier, les architectes, les médecins dentistes de libre pratique, les experts-comptables, les médecins de libre pratique, les ingénieurs et les avocats appellent «le gouvernement à des négociations en vue de l'élaboration d'un code fiscal dédié aux professions libérales». De son côté, l'Utica prône un plan de sauvetage de l'économie nationale. Hier, Wided Bouchamaoui, présidente de l'Utica, a rencontré les représentants des chambres économiques mixtes tuniso-étrangères, de l'Institut arabe des chefs d'entreprise et de la Fédération de l'hôtellerie pour plancher sur les orientations de la loi de finances 2018 et sur les propositions adressées par l'Utica à la présidence du gouvernement. On a parlé de tout : la contrebande, le commerce parallèle, les entreprises publiques, les dépenses publiques avec pour toile de fond une revendication fondamentale. Il n'est pas question que les entreprises soient obligées de supporter des taxes supplémentaires. Youssef Chahed et ses collaborateurs savent maintenant ce que les partenaires du gouvernement d'union nationale attendent de la réunion-concertation de jeudi prochain.