«De nos jours, le footballeur à travers le monde est en train de connaître une évolution sans égal à tous les niveaux, ce qui n'est pas le cas dans notre pays où le sport-roi ne cesse de régresser, ces dernières années, donnant ainsi une image terne, voire parfois agressive et violente de nos spectacles devenus ennuyeux et sans charme ni suspense. Pourtant, dans les années 70 et avant d'instaurer ce soi-disant professionnalisme, à mon avis un choix erroné parce qu'on n'aurait ni les moyens ni l'infrastructure adéquate, il y avait eu une volonté des responsables de notre football, pendant cette période, de mettre en place une stratégie prometteuse et bien cohérente au niveau de la formation des jeunes en lançant le projet de l'équipe nationale 71. Pendant cette époque, j'étais entraîneur de l'USM et on m'avait demandé de prendre en charge cette équipe pour bien la préparer pour des échéances bien importantes, à savoir les Jeux méditerranéens d'Izmir en Turquie et la coupe de Palestine en Libye. J'avais accepté ce challenge avec beaucoup de motivation et on avait effectué un travail colossal avec cette sélection à travers des stages bloqués et des matchs amicaux de grande envergure... Cette équipe où j'étais premier entraîneur s'était bien distinguée dans les deux tournois en remportant la médaille d'argent aux Jeux d'Izmir après avoir perdu en finale contre l'ex-Yougoslavie (0-1) et en s'adjugeant haut la main la coupe de Palestine. Cette génération très douée et qui avait été bien encadrée et épanouie ne s'était pas arrêtée là en offrant au peuple tunisien avide de succès sa première qualification historique à la Coupe du monde en Argentine 1978 avec un entraîneur tunisien en l'occurrence A.Chetali qui m'avait relevé en 1974... Ce qui dénote la bonne stratégie et surtout la continuité qui avait permis à Témim, Tarak, Ghommidh, Dhouib, Agrebi feu Akid, Gasmi, Attouga, Naïli, Ben Aziza, Kaâbi, Jebali, Chebli, Abidi et Limam d'avoir eu un rendez-vous avec l'histoire en offrant la première victoire dans un Mondial au monde arabe et au continent africain après avoir brillamment disposé du Mexique (3-1). J'étais vraiment comme tout Arabe et Africain ébloui par cet exploit jamais réalisé auparavant. Cette période euphorique que je considère comme la meilleure dans le football tunisien restera gravée à jamais dans ma mémoire puisqu'elle avait constitué le printemps du football tunisien. Ce constat s'applique même au niveau local dans la mesure où le championnat avait été d'un niveau technique très appréciable et toutes les équipes de la nationale A avaient défendu leurs chances avec beaucoup d'envie, d'enthousiasme et sans calculs. Et la preuve : le SRS une équipe dont les ressources étaient moyennes avait remporté haut la main le championnat en 1969 malgré la présence de ténors en l'occurrence le CA, l'ESS, l'EST et le CSS. Idem pour la JSK qui avait été sacrée champion de Tunisie en 1974. La concurrence était ouverte et toutes les équipes aspiraient à la consécration. Et puis, ce qui avait favorisé cette atmosphère saine c'était la stratégie mise en place par les responsables du football et la continuité dans son application sur le terrain. Or, maintenant et avec l'avènement du professionnalisme, la situation a complètement changé dans la mesure où l'argent, qui est devenu un moyen prépondérant dans la gestion des clubs,... a créé ce fossé entre équipes riches et autres pauvres, un phénomène qui s'est répercuté sur le niveau de notre compétition assez médiocre mais aussi agitée pour les scènes de violence devenues très fréquentes à cause du non-respect de l'adversaire et des règles du fair-play...».