La semaine qui s'ouvre aujourd'hui sera-t-elle déterminante quant au sort qui sera réservé au gouvernement d'union nationale et à son chef, Youssef Chahed ? La nouvelle initiative très attendue du président Caïd Essebsi, qui devrait être annoncée demain, mardi 20 mars, apportera-t-elle un changement profond au paysage politique ? Quand les signataires du Document de Carthage ont répondu, mardi dernier, à l'invitation du président de la République, Béji Caïd Essebsi, pour une rencontre de dialogue et de concertation (la troisième depuis la formation du gouvernement d'union nationale) sur «l'avenir du gouvernement Youssef Chahed», on attendait une réponse commune sur la question suivante : le chef du gouvernement va-t-il être acculé à accepter un remaniement de son équipe ministérielle comme l'exigeaient l'Ugtt et l'Utica ou les participants vont-ils réussir à s'entendre sur le maintien du gouvernement actuel jusqu'à la tenue des élections municipales prévues le 6 mai prochain comme le veulent Ennahdha et Nida Tounès ? Finalement, le président de la République a écouté les approches, les analyses et les évaluations de tous les participants et a réaffirmé, dans une brève allocution, «la poursuite du consensus Ennahdha-Nida Tounès qui a épargné plusieurs catastrophes quoi qu'en disent les détracteurs de tous bords, y compris au sein des deux partis en question». Le chef de l'Etat a également souligné qu'«il n'est pas question de changer le gouvernement ou de désigner un nouveau chef à sa tête en remplacement de Youssef Chahed. Le gouvernement d'union nationale reste en place avec ses deux composantes essentielles, l'Ugtt et l'Utica» même si les dernières déclarations de Noureddine Taboubi et Samir Majoul donnent l'impression, à première vue, que les centrales syndicale et patronale sont «en voie de retirer leur confiance à Youssef Chahed et à certains de ses ministres qui ont démontré qu'ils n'ont pas leur place au sein d'un gouvernement dont les Tunisiens attendent beaucoup». Et la rencontre du Palais de Carthage que plusieurs observateurs qualifiaient le jour même de sa tenue de «décisive» ou de «tournant dans l'histoire du pays» d'accoucher de la décision de constituer une commission commune (comprenant deux experts représentant chacun des partis ou organisations ayant participé à la réunion) qui a pour mission de «définir les priorités économiques de la nouvelle étape et de mettre au point une évaluation commune du rendement des membres du gouvernement sur la base de laquelle on décidera qui parmi les ministres sera maintenu dans ses fonctions et qui sera remercié». Au sortir de la réunion, on nous a informés que la commission en question se réunira la semaine prochaine et rendra sa copie aux signataires du Document de Carthage afin qu'ils prennent les décisions qui s'imposent. Autrement dit, c'est au courant de la semaine qui débute aujourd'hui, lundi 19 mars, que les Tunisiens sauront si Youssef Chahed sera maintenu à La Kasbah ou s'il sera remplacé par un autre candidat à la présidence du gouvernement. Et s'il y a une observation à émettre — ce que beaucoup de Tunisiens n'ont pas hésité à faire —, c'est que les déclarations des participants à la réunion du Palais de Carthage se sont distinguées par leur diversité dans la mesure où on a eu droit à plusieurs sons de cloche au point qu'on se demandait si les responsables de Nida Tounès, d'Ennahdha, de l'Ugtt ou de l'Utica étaient présents à la même réunion. Concertations parallèles Et au moment où l'on s'attendait à ce que les participants à la réunion du palais de Carthage dévoilent les noms des experts qui vont les représenter au sein de la commission commune ou informent sur les propositions qu'ils vont soumettre, on a été surpris par le démarrage d'une série de consultations sous la bannière de l'Ugtt au cours desquelles Noureddine Taboubi a rencontré les représentants des partis politiques aussi bien parmi les présents à la réunion de Carthage que ceux qui l'ont boycottée «pour examiner la situation générale dans le pays et sonder les moyens à même de surmonter la crise et dépasser les obstacles». Et ce sont Hamma Hammami, Issam Chebbi, Mustapha Ben Ahmed, Ghazi Chaouachi et aussi Rached Ghannouchi qui ont défilé tout au long de la semaine écoulée à la place Mohamed-Ali pour dire à Noureddine Taboubi comment ils voient la solution de la crise comme si c'était à l'Ugtt de conduire les négociations qui pourraient se conclure par la décision de démettre Youssef Chahed de ses fonctions de chef de gouvernement. Beaucoup d'observateurs se posent la question suivante : que cherche réellement l'Ugtt à travers ses consultations parallèles que sa direction mène avec les partis politiques, y compris ceux non signataires du Document de Carthage, à l'instar du Courant démocratique ou du Bloc parlementaire patriotique présidé par Mustapha Ben Ahmed ? D'autres analystes se demandent pourquoi le bureau exécutif de l'Ugtt a-t-il réagi avec une violence inouïe à la décision du juge d'instruction militaire à la convocation de son secrétaire général adjoint Bouali M'barki en tant que témoin dans l'affaire de corruption de l'homme d'affaires français. En tout état de cause, les Tunisiens vivront à partir d'aujourd'hui au rythme des développements que le feuilleton du remaniement ministériel connaîtra, à moins que le président Béji Caïd Essebsi ne prenne la décision de surprendre tout le monde et d'annoncer le 20 mars, jour de la célébration de la fête de l'Indépendance, une nouvelle initiative qui obligera tous les acteurs du paysage politique national à revoir leurs ambitions et à réviser leurs plans en prévision des échéances à venir.