Vue de l'intérieur, la situation de certains édifices du centre-ville est inquiétante "Les immeubles menaçant ruine" de Tunis sont nombreux, au point de les trouver dans chaque coin de la capitale. Entre autorités, société civile, habitants et propriétaires, les problèmes sont interminables. Les solutions peinent à voir le jour alors que le gouvernement actuel s'est saisi de l'affaire. Pour ce faire, un projet de loi, portant sur ce sujet, est en cours d'examen sous le dôme de l'Assemblée des Représentants du Peuple. Menaçant la sécurité de leurs occupants, des piétons et des voisins, le nombre de ces bâtiments qui datent de l'ère de la colonisation française, est estimé à 200 à travers tout le pays, dont la majorité est située dans les rues du centre-ville de la capitale. Dans une rue du vieux Tunis, en face d'une pâtisserie, un pan d'immeuble vient de tomber. Pas d'inquiétudes pour Mohamed, commerçant en électroménager, c'est habituel : "Ces immeubles ont été restaurés à la fin des années 1980 et les autorités n'interviennent qu'en cas d'accident. Ici c'est une zone commerciale, donc c'est assez bien entretenu. Mais allez voir du côté résidentiel, c'est une catastrophe." Risque d'effondrement A deux pas de là, un immeuble est en pleine restauration. Rachetée par un promoteur immobilier, la bâtisse peut s'effondrer à tout moment. Ahmed, un travailleur du chantier, explique: "Il y a encore une femme qui vit à l'intérieur de l'immeuble que nous restaurons, mais elle ne veut pas quitter les lieux. Nous allons faire appel à la justice pour pouvoir continuer les travaux". Des locataires qui refusent de quitter les lieux, cela semble être une situation récurrente dans les vieux immeubles du centre-ville. Vue de l'intérieur, la situation de ces édifices est inquiétante. Aucune norme de sécurité, des escaliers en ruine, des fissures apparaissent pratiquement sur tous les murs, un état sanitaire insalubre, ce qui complique davantage les conditions de ces familles qui refusent de quitter les lieux. Seulement, certains ne peuvent plus tenir. En effet, Najwa, qui habite un vieil immeuble de la capitale depuis son enfance, voit les locataires fuir au fil des années:"Le propriétaire démolit les appartements pour forcer les gens à partir, ils ne sont jamais prévenus,'' assure-t-elle. Les canalisations et la cage d'escalier sont dans un état lamentable. Le promoteur aurait pour habitude de détruire tous les dispositifs sanitaires indispensables à l'habitation. Une locataire raconte:"J'avais un trou dans le plafond de ma salle de bain. L'eau coulait tous les jours. J'entrais aux toilettes avec un parapluie. J'ai dû quitter mon appartement par la suite." Selon les locataires, certains vieux immeubles de l'époque coloniale auraient été cédés à des promoteurs immobiliers peu scrupuleux qui useraient de la force pour déloger les habitants. L'ambiguïté plane autour de ces affaires qui remontent à l'ère Ben Ali. La faute à qui ? Le flou est total. Les locataires continuent de dénoncer des "pratiques frauduleuses'' et les propriétaires à convoquer devant le tribunal des habitants qui refusent de quitter leurs appartements.