Les experts ont rendu leur copie en attendant que les politiciens avalisent, dans les prochains jours, leurs propositions. Reste à savoir si Youssef Chahed sera maintenu pour piloter les nouvelles priorités Finalement, les experts représentant les partis signataires du Document de Carthage ont rendu leur copie au terme d'une série de réunions qui ont démarré début mars dernier. La copie dont l'élaboration a été finalisée mercredi dernier, et dont le contenu devrait être adopté, lundi prochain, par les chefs des partis politiques et des organisations professionnelles signataires du Document de Carthage au cours d'une réunion qui sera présidée par le chef de l'Etat, Béji Caïd Essebsi, dégage plusieurs observations à la lumière des décisions-recommandations qui marqueront le paysage politique national au cours des 20 mois qui nous séparent encore des législatives et de la présidentielle de fin 2019. Les experts conviennent de la nécessité «d'un profond remaniement ministériel qui va au-delà des exigences de l'Ugtt relatives à l'injection d'un sang- neuf au sein du gouvernement pour toucher le chef du gouvernement Youssef Chahed même si Ennahdha, lui, maintient sa confiance, prétextant que le contexte ne permet pas son remplacement». Les experts se contentent d'enregistrer la position d'Ennahdha tout en laissant le dernier mot à Nida Tounès, le parti du chef du gouvernement qu'on dit «favorable à un remaniement profond et global». Sauf que les experts ont pris la décision de transférer «le dossier Youssef Chahed» à la réunion au cours de laquelle les chefs des partis et des organisations nationales (Unft, Ugtt, Utica et Utap) décideront du maintien ou du remerciement du chef du gouvernement». «Transférer le dossier Youssef Chahed à la réunion de lundi prochain, soit une journée après les élections municipales, est une décision qui montre que le sort personnel du chef du gouvernement sera décidé à la lumière des résultats auxquels aboutira la consultation électorale de dimanche prochain», estiment plusieurs observateurs. Certains vont jusqu'à trouver un certain rapprochement entre «le très probable remerciement de Youssef Chahed et les déclarations très optimistes livrées par Noureddine Taboubi, secrétaire général de l'Ugtt, le lundi 30 avril dernier à l'issue de son entretien avec le président de la République, Béji Caïd Essebsi». Le secrétaire général de la Centrale syndicale ouvrière a, en effet, souligné qu'il a trouvé auprès du chef de l'Etat «une volonté déterminée d'opérer une réelle réforme politique». Les termes choisis par Taboubi ont valeur de codes à déchiffrer par les spécialistes qui n'ont pas besoin de détails pour saisir les messages que comportent de telles petites phrases. Mais quand on recourt aux recoupements des indiscrétions qui accompagnent les réunions des experts du Document de Carthage, on peut comprendre que Noureddine Taboubi ne parlait pas en l'air en évoquant la volonté du président Caïd Essebsi d'opérer une réforme politique profonde. Plus encore, on a le sentiment que la voix de l'Ugtt a été hautement entendue lors des réunions de la commission des experts. Ainsi, sa proposition relative au transfert du dossier des entreprises publiques à privatiser à des bureaux d'audit internationaux a-t-elle été avalisée par la commission. Ces bureaux, faut-il le souligner, auront à trancher le différend qui oppose le gouvernement à l'Ugtt à propos des entreprises qui doivent être privatisées parce que leur faillite est incontournable, celles qui peuvent être sauvées et celles que le gouvernement «veut brader», comme l'assurent les syndicalistes. Et l'on se demande quelle sera la position du gouvernement Youssef Chahed au cas où les bureaux internationaux d'audit donneraient raison à l'Ugtt dont les experts assurent que certaines parmi ces entreprises sont plutôt florissantes. Au-delà des ministres qui perdront leurs postes ou des ministères qui peuvent être supprimés pour raisons d'austérité, on est en mesure de souligner que la feuille de route qui sera adoptée lundi prochain sous l'appellation «Cartaghe II» déterminera les nouvelles priorités de l'action gouvernementale au cours des prochains mois précédant les futures élections législatives et présidentielle.