Le 30 avril, le rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition, Pablo de Greiff, publiait ses « Observations et recommandations sur les événements récents concernant l'Instance vérité et dignité ». Dans ce texte, le rapporteur spécial alerte les autorités contre un arrêt prématuré des travaux de l'IVD. Avec 65 voix contre, 2 abstentions et 0 oui, l'Assemblée des représentants du peuple (ARP) a voté, dans la nuit du 26 au 27 mars, contre la prorogation du mandat de l'Instance vérité et dignité (IVD). Le Conseil de l'Instance avait pourtant annoncé le 28 février son intention d'allonger le temps de ses activités, censées s'achever le 31 mai, jusqu'au mois de décembre 2018 en se basant sur l'article 18 de la loi relative à la justice transitionnelle. L'IVD avait argumenté sa décision en présentant les obstacles et obstructions à son travail par les structures de l'Etat au cours de ces quatre dernières années de fonctionnement. Les entraves rencontrées et décrites par la présidente de l'Instance, Sihem Bensedrine, à plusieurs occasions, dont son audition par l'ARP, sont multiformes. Elles vont de l'accès aux archives publiques de l'Etat aux dossiers judiciaires, notamment ceux du Tribunal militaire concernant les procès des martyrs et des blessés de la Révolution, à l'absence de collaboration de l'Etat dans le cadre du mécanisme de réconciliation et d'arbitrage. Autre raison ayant nécessité la prolongation des travaux de l'IVD, selon cette dernière : le nombre important de dossiers parvenus à l'Instance dépassant la barre des 63.000 plaintes. Les victimes risquent d'être doublement accablées Plus l'échéance du 31 mai se rapproche et plus des initiatives visant à dénoncer une interruption prématurée des travaux de la commission vérité se multiplient de la part de la société civile tunisienne et d'ONG internationales des droits humains. Une trentaine de ces associations nationales et étrangères ont organisé la semaine passée une conférence publique à Tunis pour contester le projet des autorités d'arrêter, selon la décision du 26 mars de l'ARP, le processus de justice transitionnelle en suspendant le mandat de l'IVD. La publication le 30 avril par le rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition, Pablo de Greiff, de ses « Observations et recommandations sur les événements récents concernant l'Instance vérité et dignité » vient renforcer le positionnement des ONG Pablo de Greiff y prévient contre une seconde victimisation de ceux dont les droits ont été auparavant occultés : « Si à ce stade, le processus de recherche de la vérité venait à être avorté, les victimes qui ont déjà subi de terribles violations seraient encore une fois accablées ». Lui-même, alerté par des associations de victimes, insiste : « Interrompre le travail de l'Instance vérité et dignité avant d'avoir achevé une évaluation complète des violations et des schémas pertinents y afférents (en particulier lorsque l'interruption résulte d'une décision parlementaire qui ne peut être considérée comme exprimant un consensus parmi les partis au Parlement) risque de provoquer de nouvelles fragmentations sociales ». Le gouvernement tunisien dispose de 60 jours pour répondre aux observations et questions du rapporteur spécial.