Près de 80 personnes, en majorité de nationalité tunisienne, ont trouvé la mort, dimanche dernier, suite au naufrage de leur embarcation au large de Kerkennah. Dans cette même tentative de migration illégale, on déplore plusieurs disparus. Une semaine plus tôt, trois Tunisiens ont connu le même sort, dans les mêmes conditions, mais dans les eaux territoriales libyennes. Et selon des chiffres officieux, on compte près de 62 de nos concitoyens disparus tragiquement au large des côtes italiennes depuis le mois de janvier écoulé. Mais, officiellement, ils sont plusieurs centaines de nos compatriotes à périr en mer depuis la révolution. Or, le problème, le vrai, est autrement plus complexe qu'on le pense faussement, car il va falloir, justement, compter avec un nouveau casse-tête, à savoir les revenants d'Italie. Jugez-en : - Primo : le retour des dépouilles. Et là, il ne faut pas être à la place des familles des victimes qui attendent souvent, dans l'anxiété et l'angoisse, des semaines entières pour récupérer les cercueils des leurs, à cause de la complexité des formalités administratives rendue inévitable par le manque de synchronisation des efforts entre les autorités tunisiennes et leurs homologues italiennes, sachant que 90% des embarcations de la mort n'ont qu'une seule destination «rêvée» : l'île de Lampedusa. -Secundo : «les revenants de l'Odyssée», c'est-à-dire les rescapés du naufrage qui, une fois les pieds sur le sol de la péninsule, sont embarqués, dare-dare, dans les innombrables centres de détention provisoire, avant leur extradition vers la Tunisie. La menace de l'extrême droite Et c'est bien ce problème qui torture, le plus, notre gouvernement. Car, une fois rentrés au bercail, ces «harragas», champions de l'aventure, vont automatiquement rejoindre, en vue de les renforcer, les rangs de nos centaines de milliers de chômeurs. Et quand on sait que ces revenants d'Italie sont, dans leur presque totalité, des délinquants et des repris de justice, il y a évidemment de quoi susciter les craintes de les voir «booster» l'insécurité dans nos murs. Dès lors, que fera-t-on pour les neutraliser? Les incarcérer est-il la façon la plus dissuasive ? L'histoire des faits divers ne démontre-t-elle pas qu'une fois sa peine de prison purgée, un voyou sur deux reste toujours tenté par la récidive ? Nul doute que ces interrogations sont d'autant plus sérieuses et alarmantes que l'inquiétude est devenue encore plus vive, à la suite de la déclaration récemment donnée par le nouveau ministre italien de l'Intérieur, Matteo Salvini (extrême droite), qui a menacé de renvoyer chez eux tous les étrangers se trouvant en situation irrégulière en Italie, tempêtant que «cet objectif sera l'une des priorités majeures du nouveau gouvernement Guiseppi Conti qui aura à refouler quelque 500 mille étrangers sans papiers». Et dire que, parmi ces derniers, on compte des centaines de Tunisiens. Dès lors, il n'est pas exagéré de dire, à notre corps défendant, que le pire est à venir, à coups de retours de... cercueils et de vagues d'expulsion. Est-on vraiment prêt à gérer ce redoutable retour de manivelle? Qu'a-t-on fait pour y remédier ? Des mesures préventives, ou, du moins, les précautions d'usage ont-elles été prises ? Politiquement parlant, la Tunisie réussira-t-elle à tempérer les ardeurs d'une extrême droite italienne dont les ultraconservateurs, désormais aux commandes du pays, ont toujours averti que, une fois au pouvoir, ils imposeraient une ligne très dure vis-à-vis des migrants clandestins et des étrangers en situation irrégulière sur la péninsule ? Psychose...