Par Jawhar CHATTY La veille, le conseil d'administration du FMI publiait un communiqué pour le moins sévère. Il y était sommairement dit que le Fonds, jusque-là indulgent à l'égard du laxisme monétaire et surtout budgétaire de la Tunisie, va devoir revenir à ses propres fondamentaux et observer strictement sa mission de gendarme de la stabilité du système monétaire international. Le lendemain, la BCT relevait son taux d'intérêt directeur de... 100 points de base. Excusez du peu. La réaction de l'Utica ne s'est pas fait attendre. Les banquiers observent un silence prudent. L'Ugtt, on connaît son allergie chronique à ce genre de décision. Au sein des partis politiques sérieux, c'est le silence radio. Les autres versent comme toujours dans le populisme et la diabolisation du FMI. La voix de son maître ? Restons lucides. La décision de la BCT relève clairement de l'application des directives du FMI. Cela dit: 1. La BCT n'a pas d'alternative. Ses outils d'intervention sont limités. Politiquement, elle pourrait adopter une autre posture, celle adoptée par la Malaisie face à la crise asiatique de 1997. Mais ce n'est pas la BCT qui pourrait agir dans ce sens. C'est une décision politique du plus haut niveau, ce que la Tunisie ne peut pas faire aujourd'hui dans l'état de délabrement des institutions et de luttes fratricides au sommet de l'Etat 2. La médication du FMI est simpliste : renchérir le crédit pour en diminuer la demande et limiter la consommation. Ça paraît juste mais malheureusement, c'est faux : Si la demande est nourrie par le crédit, il faut savoir que celui-ci est contracté essentiellement par les ménages hors circuits bancaires! Chez l'épicier, le boucher, chez l'employeur, le collègue au travail, la famille, l'usurier du coin... le crédit bancaire, dans l'endettement des ménages, est l'équivalent de la partie émergée de l'iceberg. L'essentiel est ailleurs. Personne ne veut regarder cela. Tartuffe, où es-tu? 3. L'inflation n'est qu'accessoirement d'origine monétaire. Elle puise ses racines plus dans la faiblesse de l'offre (et de la production) par rapport à la demande (et la consommation). La vraie solution passe par une politique de l'offre, y compris l'inclusion, la lutte contre les rentes... Mais cela est un autre sujet bien plus compliqué à traiter que de décider dans un conseil d'administration le relèvement du taux directeur de 100 points de base. Sans compter les effets sur l'investissement, sur les entreprises.