Un concert de métal ? Nous ? Jamais ! Et pourtant... Et pourtant le groupe «Myrath» a réussi à nous transporter dans son univers exceptionnel, nous enivrer même, pendant un show exclusif qui a duré deux heures. Un concert qui vient marquer, enfin et sans doute aucun, la consécration tunisienne de ce groupe de pointure internationale. Comme prévu, jeudi dernier, les artistes de «Myrath» se sont produits au Théâtre romain de Carthage, une scène qui leur revient, en réalité, de droit. Car «Myrath», c'est quinze ans d'existence, cinq albums, plus de 400 concerts présentés sur les plus grandes scènes du monde : aux Etats-Unis, en Europe, au Japon, en Inde, à Dubaï, en Algérie, au Maroc et nous en passons. Un parcours qui lui a valu une grande notoriété internationale et des fans qui se comptent par milliers. Après une représentation passée quasi inaperçue lors de la dernière édition des Journées musicales de Carthage, en avril dernier, avec un manque de reconnaissance inexpliqué de la part des autorités et des médias nationaux, les artistes de «Myrath» sont venus avant-hier, avec une verve endiablée, pour présenter un spectacle unique et grandiose. Ils ont mis le paquet et le défi d'offrir le «meilleur show de Carthage cette année» a été relevé haut la main ! Défi relevé ! Elyès Bouchoucha (claviériste), Morgan Berthet (batteur), Anis Jouini (bassiste), Malek Ben Arbia (guitariste) et Zaher Zorgati (chanteur) ont interprété dix-huit titres dont trois, en exclusivité mondiale, de leur prochain album qui sera dans les bacs fin décembre prochain. Du pur métal oriental, un mix entre le heavy metal, des sonorités des registres andalous et bedwi tunisiens et des maqâms orientaux (égyptiens, libanais et kurdes). Un style musical quasi inédit et une musique très technique où se mélangent instruments occidentaux et orientaux, paroles en anglais et en arabe, le tout magnifié de variations chorégraphiques (danse orientale) et d'une mise en scène bien travaillée, c'est le moins que nous puissions dire. En réalité, quand bien même le quatuor de «Myrath» a pris le soin de bien broder sa musique, il n'a pas moins festonné son image. «Nous voulons offrir une image cent pour cent tunisienne et l'exporter. Une sorte de carte visite. Nous avons beaucoup misé sur le show pour ce concert. Nous avons investi 15.000 euros de notre cachet (25.000 euros) pour la mise en scène, avec les grands écrans led et toute la décoration. Et nous allons réaliser une captation vidéo qui sortira en DVD/Blue-RAY afin d'immortaliser cet événement et le véhiculer au plus large public», nous explique Zaher Zorgati lors d'une interview qu'il nous a accordée juste avant le spectacle. Un grand show ! Incontestablement, «Myrath» (produit par Kevin Cadefert) a présenté un grand show aux standards internationaux qui n'a rien à envier à ceux des grands groupes occidentaux. Les artistes, véritables bêtes de scène, ont enflammé les jeunes metalleux venus nombreux. Un public de fans (et de parents aussi, sans oublier l'ambassadeur de France Olivier Poivre d'Arvor !) déjà conquis et étonnamment discipliné ! Les artistes de «Myrath», premier groupe de métal à participer au Festival international de Carthage, ont donné le meilleur d'eux-mêmes. Ils ont réussi à s'imposer, à redonner ses lettres de noblesse à un style musical empreint de préjugés souvent négatifs, à son public aussi. Ils sont parvenus à instaurer leurs propres codes musicaux et visuels et leur identité si particulière. Ils se sont forgé une notoriété à l'échelle internationale, jouent désormais dans la cour des grands, tout en puisant dans les racines de la musique et de la culture tunisienne et arabe. Ce qui est fort louable. Un groupe dont les artistes sont porteurs d'un projet non seulement musical, mais également culturel, à savoir la promotion de la Tunisie au-delà de ses frontières. Les autorités locales gagneront vraiment à les encourager et à les soutenir à travers les subventions et les autorisations de tournage des clips... Sans conteste, le concert de «Myrath», dans cette 54e édition du Festival international de Carthage, est une réussite à toutes les échelles. Toutefois, ce que nous pouvons reprocher à ce groupe leader du métal oriental, c'est sa démarche on ne peut plus orientalisante, son imagerie et sa fantasmagorie orientaliste (danse du ventre, mergoums, chandelier, arabesques...). Un choix délibéré et par ailleurs parfaitement assumé qui n'entame en rien la qualité du travail dans sa globalité. Un choix qui dit aussi combien les artistes et leur producteur ont bien assimilé les lois du business et du marketing culturels ! Scoops ! Concernant le prochain opus de «Myrath», Zaher Zorgati nous a livré quelques scoops : le prochain album sera reproduit en entier de la niche métal à la niche rock —sans pour autant toucher aux arrangements— par Bob Ezring, le meilleur producteur rock. Pour la distribution, c'est la grande boîte de disques et d'édition allemande Ears Music qui s'en chargera, exigeant l'exclusivité mondiale. Elle a débloqué 500 mille euros pour la promotion de l'album pour une durée de quatre mois. Mais ce n'est pas tout. Lotfi Bouchnaq signera l'une des chansons dans ce nouvel album. «Myrath», une véritable success story à suivre.