La clé de voûte de la réussite du PPP en Tunisie réside dans la volonté politique. Ce forum en témoigne fortement La Tunisie doit réussir ces projets pilotes pour que le processus du PPP connaisse un véritable essor Alors que M. Youssef Chahed se voulait rassurant tout en mettant en exergue les prouesses du gouvernement durant les deux dernières années, malgré un contexte socioéconomique morose, inhérent à la phase transitoire par laquelle passe le pays, le chef de mission de la Berd, principal partenaire du forum PPP, était plutôt satisfait des avancées de la Tunisie en matière de PPP. Voire optimiste. « Il est vrai qu'aujourd'hui, ce n'est que le coup d'envoi du forum mais je pense qu'on a déjà un grand succès auprès des investisseurs. Quand on voit déjà plus de 1.000 personnes réunies, dont 200 invités internationaux, venues assister au forum d'aujourd'hui, pour découvrir les perspectives du PPP en Tunisie, je pense que cela dénote, d'un côté, l'intérêt du partenariat public-privé en Tunisie et, de l'autre, l'attractivité du pays ainsi que de son pipeline», a affirmé M. Antoine de Chou, dans une déclaration à La Presse. Il a précisé que les ateliers sectoriels et les workshops feront office de lieux de discussion approfondies et pragmatiques des projets, notamment le volet technique. « Toutes les chances sont du côté de la Tunisie», a-t-il asséné. Les études techniques achevées Interrogé sur les critères de choix des projets qui constituent le pipeline de la Tunisie, le chef de la mission de la Berd en Tunisie a expliqué que les projets qui ont été choisis sont à des stades de maturité très variés. Mais globalement, les études techniques sont désormais achevées. En contrepartie, il y a du pain sur la planche, notamment en ce qui concerne la structuration financière. Il a affirmé que bon nombre de ces projets seront lancés très prochainement, dans les 12 mois à venir. Pour les projets qui sont encore en phase d'exploration, M. De Chou a souligné que ce forum fera office d'un lieu de discussion et d'appréciation des besoins des investisseurs, et si nécessaire, une révision du périmètre de ce pipeline en fonction du feedback sera de mise. Interpellé sur la fiabilité de la loi 2015 relative au PPP critiquée par certains experts, le chef de la mission de la Berd en Tunisie a affirmé que la clé de voûte de la réussite du PPP en Tunisie réside dans la volonté politique de s'y lancer et ce forum en témoigne fortement. Néanmoins, le chef de la mission de la Berd en Tunisie a expliqué que l'organisation internationale travaille avec l'Instance générale du PPP (Igppp), créée en 2017, sur la loi de 2015 relative au PPP, pour améliorer le cadre réglementaire en Tunisie. « Aujourd'hui, on voit clairement un symbole fort de la volonté politique. » a-t-il conclu. Continuel soutien financier de la BAD De son côté, la représentante de la Banque africaine de développement BAD, Yacine Fall, a salué les préparatifs menés jusque-là pour faire aboutir le forum. Elle a affirmé que la Banque continuera à fournir l'appui technique et financier à la Tunisie en matière de PPP. Elle a ajouté que, de par sa forte expérience avec les compétences tunisiennes dans le domaine des projets d'infrastructures, la BAD compte va accompagner le gouvernement tunisien dans cette phase active de sa nouvelle approche dans la réalisation des projets structurants en fournissant toutes les ressources nécessaires. « Le tiers des réseaux routiers en Tunisie a été financé par la BAD. Nous comptons maintenir notre appui à la Tunisie», a-t-elle souligné. Mme Fall a également fait savoir que les projecteurs seront braqués sur les investissements PPP en Tunisie durant le forum africain d'investissement qui aura lieu en Afrique du Sud au mois de novembre prochain. De son côté, la directrice générale de la la Caisse des dépôts et consignations (CDC), Mme Boutheina Ben Yaghlane, a affirmé que la signature de la convention entre les ministères des Finances et de l'Investissement avec la CDC et l'Igppp, qui a eu lieu le jour même du forum, représente un message d'encouragement aux participants du forum. Elle a précisé que le rôle de la CDC, dans cette phase critique du processus du PPP en Tunisie, est de financer les études des projets et fournir une ligne d'amorçage. Infrastructure : stratégie jusqu'en 2030 Le port en eaux profondes d'Enfidha est l'un des projets phares du forum sur lequel les autorités tunisiennes misent. Le ministre de l'Equipement, de l'Habitat et de l'Aménagement du territoire, Mohamed Salah Arfaoui, a expliqué que le port est « le projet du siècle » et qu'il est prêt pour le lancement. Quant à la question relative à la réduction des inégalités régionales moyennant des projets structurants d'envergure, M. Arfaoui a souligné le rôle que jouera le projet de l'autoroute reliant le gouvernorat de Kasserine à Sfax dans le désenclavement des gouvernorats du centre-ouest de la Tunisie. À cet égard, il a expliqué que le ministère a déjà élaboré une stratégie à l'horizon 2030 qui trace les grandes lignes en matière d'infrastructure par région. Et c'est à partir de cette stratégie qu'une trentaine de projets structurants ont été sélectionnés. Ce sont des projets dont la faisabilité, dans le cadre d'un PPP, a été étudiée et validée. « Ces projets feront tache d'huile en termes de PPP. La réussite du partenariat public privé dans ces projets entraînera une série de réussites et suscitera l'engouement des investisseurs étrangers en Tunisie», a fait savoir M. Arfaoui. Quant aux propos de Mme Sue Barett, directrice infrastructure au sein de la Berd, ils sont très rassurants. Tout en étant « optimiste » pour l'approche PPP en Tunisie, Mme Barett a souligné la nécessité de moderniser l'infrastructure en Tunisie, qui demeure jusque-là peu développée. « Le gouvernement fait de son mieux pour développer l'infrastructure en Tunisie, mais il ne peut pas tout faire. Ce genre d'événement est important dans la mesure où il permettra de familiariser le concept du PPP en Tunisie et impliquer toutes les parties prenantes, notamment le secteur privé, dans la mise en œuvre des projets structurants d'envergure. Si le gouvernement tunisien prend en compte les recommandations issues de ce forum, notamment dans l'élaboration des contrats PPP, il parviendra à faire du PPP un tremplin de croissance.» Engouement affiché des investisseurs De son côté, le ministre de l'Industrie, des PME, de l'Energie, des mines et des énergies renouvelables, Slim Feriani, a affirmé que la dissolution du ministère de l'Energie et les rebondissements de l'affaire « Halk El Menzel », ne représenteront en aucun cas une barrière à l'investissement dans le secteur des énergies et des mines en Tunisie. « Au contraire, les décisions qui ont été prises par le chef du gouvernement étaient engagées dans l'optique d'une meilleure gouvernance. L'objectif est de réviser le modèle de gestion du secteur énergétique en Tunisie, et justement ce type de forum permet de rassurer les investisseurs. Le nombre de participants dénote la confiance que font les investisseurs dans la Tunisie», explique Mr Feriani. Mr. Tarek Chérif, président de la Conect, s'est attardé sur les gages et les garantis pour un PPP réussi. Il a insisté sur la nécessité de protéger, notamment sur le plan juridique, les investisseurs tunisiens et étrangers. « Il faut que la diabolisation des PPP cesse ! C'est un projet de long terme, tout-bénéfice pour le citoyen et pour l'Etat. Les PPP permettront d'alléger les pressions sur les finances publiques et de réduire les déséquilibres budgétaires de l'Etat. Il faut impliquer tout le monde pour que ce processus réussisse. Il est d'usage dans les pays de l'Occident et c'est une expérience réussie dans la mesure où les infrastructures seront toujours les propriétés de l'Etat. La Tunisie doit réussir ces projets pilotes. Le processus du PPP connaîtra alors un véritable essor», conclut-il.