Tous les représentants des syndicats présents lors de ce colloque étaient unanimes à refuser le renouvellement de la convention les liant avec la Cnam devant l'impasse des négociations et le silence des autorités de tutelle. «Tout pour la Cnam, rien pour le citoyen, rien pour les prestataires», «La Cnam une caisse qui encaisse», pouvait-on lire sur des affiches collées dans la salle du colloque organisé ce dimanche, 14 octobre, aux Berges du lac, par l'Intersyndicale des professions libérales de santé et qui fut consacré à l'avenir de la sécurité sociale sur fond d'une probable suspension de la convention sectorielle avec la Cnam en raison du blocage des négociations. La Cnam, accusée de tous les maux «On ne va pas renouveler la convention sectorielle avec la Cnam à cause de ses décisions unilatérales en violation avec les conventions-cadres et sectorielles, et devant le blocage des négociations, mais nous demeurons ouverts au dialogue en vue d'établir une nouvelle convention qui tiendrait compte des besoins et intérêts du citoyen et des prestataires de soins», nous confirme le Dr Mohamed Ayed. Présents lors de ce colloque, les représentants de l'Intersyndicale des professions libérales de santé se sont attaqués frontalement à la Cnam en raison du non-respect de la convention sectorielle et sa stratégie de fuite en avant qui a impacté tout le secteur de la santé. Evoquant la relation tendue avec la Cnam, Mustapha Laroussi, président du syndicat des officines, a souligné dans son intervention que c'est tout le système de la santé qui se trouve aujourd'hui menacé. Il a déploré le silence du ministère des Affaires sociales devant cette situation chaotique. La conjoncture financière difficile dans laquelle se trouvent les cliniques privées, l'augmentation des salaires des professionnels du métier, la dépréciation du dinar face à l'euro, le taux galopant d'inflation, ont été au centre du débat soulevé à cette occasion par Boubaker Zakhama, président de la chambre syndicale nationale des cliniques privées relevant de l'Utica. Il a ajouté que «la Cnam nous considère comme des ennemis et incite ses affiliés à engager des poursuites judiciaires à l'encontre des propriétaires des cliniques privées, dont environ six ont déjà mis la clé sous la porte en raison des difficultés financières ». Zakhama a rappelé dans ce même contexte les enquêtes lancées par le Conseil de la concurrence relevant du ministère du Commerce à l'encontre des cliniques privées suite à la décision de majorer de 30% les tarifs des opérations chirurgicales. La crise a impacté tout le secteur de la santé «En dépit des critiques formulées, plusieurs intervenants ont insisté sur l'importance de l'assurance maladie comme un acquis national qui a permis d'élargir l'accès au secteur privé de la santé et contribué à son développement. Elle a organisé la relation entre les prestataires de soins et l'organisme payeur, dans un cadre conventionnel», relève Tarek Ennaïfer, président de la Fédération nationale de la santé à l'Utica. Il a toutefois soulevé certaines problématiques dues à la mauvaise application des textes juridiques et conventionnels et la gestion du quotidien dont l'absence d'évaluation et de dialogue entre les partenaires dans le cadre du conseil national de l'assurance maladie avec seulement trois réunions en 13 ans ainsi que le mauvais fonctionnement des commissions paritaires sectorielles, l'absence de révision des conventions sectorielles dans les délais impartis. Tarifications inadaptées et sans rapport avec la réalité des coûts, retard des payements allant jusqu'à 90 jours et augmentation insupportable des dettes de la Cnam vis-à-vis des prestataires des soins, sont les autres maux qui ont impacté le secteur de la santé et provoqué les pénuries de médicaments, la mauvaise rentabilité, l'enlisement de tous les opérateurs du secteur dans la spirale infernale de la dette, la détérioration du capital confiance entre les différents intervenants, souligne encore Tarek Ennaïfer. Le secteur de la dialyse agonise en raison de la conjoncture économique actuelle, l'inflation, la dévaluation du dinar et les revendications sociales incessantes du personnel paramédical, ce qui nécessite l'intervention urgente de la Cnam pour éviter le pire à une population de plus de 10 mille personnes dialysées régulièrement, révèle à son tour la chambre syndicale nationale des cliniques de dialyse. La porte toujours ouverte au dialogue La Cnam ne peut, à elle seule, tout assumer. La situation est due au déficit du régime de la retraite et des caisses de sécurité, la difficulté de recouvrement des cotisations et des créances durant la période post-révolutionnaire, l'utilisation d'une partie des fonds impartis à l'assurance maladie pour payer les retraités. Mais rompre unilatéralement avec la Cnam n'est pas la solution adéquate et peut être comparé à un acte antipatriotique, ont fait savoir certains intervenants qui ont insisté sur la poursuite du dialogue. Le coût moyen de l'impayé de la Cnam pour une officine est estimé à 1.718,750 dinars par mois, et 8.593,750 dinars par an, alors que la dette des établissements publics envers les caisses sociales s'élève en mars 2018 à 600 MD. La dette des caisses sociales auprès de la Cnam est de 1.700MD (avril 2018), a expliqué Anis Wahabi, expert comptable. Il a ajouté que le déficit de la Cnrps est de 410 MD, (environ 0,5% du PNB), et le déficit des caisses est estimé à 11 milliards en 2030. Tous les représentants des syndicats présents lors de ce colloque étaient unanimes à refuser le renouvellement de la convention les liant avec la Cnam devant l'impasse des négociations et le silence des autorités de tutelle. D'ailleurs, l'absence de plusieurs invités à ce colloque, dont les représentants des ministères de la Santé, des Affaires sociales, de l'ARP, de la Cnam, de l'Ugtt, a été très mal accueilli aussi bien par les organisateurs que par les participants . Plusieurs recommandations avaient été adoptées à l'issue de ce colloque, dont l'appel à la mise en œuvre des grands projets en rapport avec la réforme des caisses sociales et la recherche des solutions en vue d'alimenter les ressources de ces caisses. L'Intersyndicale a réitéré aussi son total refus quant à une éventuelle révision des conventions sectorielles dans leur état actuel.