Par M'hamed JAIBI Rien ne dit que les nidaïstes pro-Hafedh prennent corps avec ce parachutage, que dire des mécontents et des récalcitrants? Hafedh Caïd Essebsi est resté discret sur cette promotion qui, incontestablement, lui porte ombrage. Même si l'on a veillé à le placer à la présidence d'un comité politique dont on ignore autant la composition que la fonction En recevant Slim Riahi en tant que secrétaire général de Nida Tounès et en le chargeant d'agir à rationaliser l'attitude et l'action des partis politiques face à la crise et au marasme qui accable les Tunisiens, Béji Caïd Essebsi semble vouloir marquer son entrée en campagne dans la perspective de l'échéance électorale de 2019. Ceux qui ignoraient qui donc a pu veiller à voir Riahi chargé de chapeauter le parti présidentiel sont ainsi rassurés quant à l'adhésion du président de la République à cette décision inattendue qui n'a pas manqué de remuer les rapports de force à l'Assemblée. Un lieutenant partisan Même si le leader de l'UPL n'avait pas vocation à prétendre se hisser au rang de lieutenant partisan de l'homme de l'Appel du 26 janvier 2012, voici que BCE en personne le sacre à cette délicate fonction. Délicate à plus d'un titre. Tout d'abord, parce que l'intéressé n'a nullement été préparé en vue d'un tel rôle et que ses options politiques n'ont pas vraiment été dévoilées, malgré ses prétentions à ce sujet et le parti qu'il a fondé. Ensuite, parce que rien ne dit que les nidaïstes pro-Hafedh prennent corps avec ce parachutage, que dire des mécontents et des recalcitrants? Enfin, parce que Hafedh Caïd Essebsi est resté discret sur cette promotion qui, incontestablement, lui porte ombrage. Même si l'on a veillé à le placer à la présidence d'un comité politique dont on ignore autant la composition que la fonction. Une chose est sûre cependant, c'est que le chef de l'Etat s'est officiellement débarrassé de cette suspicion de «légation» qui lui collait après dans certains milieux de l'opinion publique, depuis que certains de ses lieutenants au sein de la direction historique de Nida l'avaient véhiculée au moment de la confection des listes en vue des législatives de 2014. S'imposer aux yeux des partenaires Maintenant va cependant se poser à Slim Riahi la tâche de s'imposer à ce poste aux yeux des partenaires politiques des différents courants et tendances. D'abord au sein des désormais multiples sensibilités nidaïstes dont la plupart réclament l'arbitrage d'un congrès démocratique de réunification. Mais également et surtout auprès des autres partis, à l'heure où les alliances et les prises de positions fluctuent et se ré-agencent. C'est, semble-il, chose faite avec Ennahdha, suite à un tête-à-tête avec Rached Ghannouchi dont les conclusions n'ont pas été rendues publiques. Mais BCE ne semble pas avoir apprécié la démarche. Reste pour lui à déchiffrer l'enchevêtrement que connaît la scène politique et à comprendre les choix préconisés par le chef de l'Etat dans le bras de fer qui l'oppose à Ennahdha et à Youssef Chahed. Surtout qu'il vient de lorgner, publiquement, en sa qualité de secrétaire général de Nida, une éventuelle participation au gouvernement, à la condition qu'«Ennahdha n'en fasse pas partie». Va-t-on rééditer le Front du salut ? La carte politique est en mouvement et le nouveau lieutenant de BCE doit en saisir la finalité dans la perspective des prochaines élections. Les législatives, bien sûr, mais aussi la presidentielle à laquelle on ne sait toujours pas si le président se présentera. Déjà, Nida Tounès s'est aligné derrière le Front populaire dans sa «quête de la vérité» quant à l'éventuel groupe sécuritaire d'Ennahdha, donnant ainsi le ton aux inspirations de la future campagne électorale. Mais cette alliance de circonstance pourra-t-elle vraiment dépasser le niveau conjoncturel pour déboucher sur un rassemblement anti-Ennahdha du type du site-in du Bardo ? Peu probable. Car les enjeux en matière économique et financière placent Nida Tounès et son président d'honneur aux antipodes des options du Front et de l'opposition radicale qui sont farouchement opposés à toute libéralisation et à toute cession de parts dans les avoirs publics. Comme quoi le mystère reste entier et les stratégies possibles des uns et des autres peu déchiffrables. La seule certitude reste le remaniement qui va de report en report.