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Lecture d'un palmarès controversé
La Presse Lettres, Arts et Pensée : Rétro sur la 23e édition des JCC
Publié dans La Presse de Tunisie le 05 - 11 - 2010

C'est sur un palmarès controversé que s'est achevée la 23e édition des JCC. C'est que Sherley Adams, long métrage du Sud-Africain Oliver Hermanus, en lice dans la compétition officielle de fiction, qui a été plébiscité à l'unanimité aussi bien par le public que par la critique, ainsi qu'un grand nombre de professionnel du cinéma arabe et africain, a été totalement ignoré par le jury de cette session, présidé par le cinéaste haïtien, Raoul Peck, qui lui a préféré Microphone de l'Egyptien Ahmed Abdallah.
N'ayant remporté aucun des tanits, Shirley Adams a dû se contenter du prix de l'interprétation féminine, raflé haut la main et avec brio par la superbe Denise Newman, qui n'a pu retenir des larmes d'émotion en recevant son prix des mains de notre acteur national Fathi Heddaoui.
Shirley Adams : le film du festival
Il est vrai que le rôle est marquant et que dans la peau de cette mère courage, nommée Sherley Adams, la belle actrice sud-africaine a excellé, portant tout le film sur ses épaules, affichant un jeu sobre et intériorisé pour camper un personnage si digne, pétri d'humanité, entre générosité, amour maternel, esprit de pardon et de tolérance. Des qualités et des valeurs devenues si rares de nos jours.
Justement, bien que le film dénonce la violence qui mine la société sud-africaine, sans jamais la montrer, parce qu'il se décline comme l'autre face, le revers de la guerre des gangs dans les ghettos, il n'en demeure pas moins qu'il laisse la porte ouverte à l'espoir d'horizons et d'un avenir meilleurs. Car, malgré le drame et les souffrances qu'elle vit, la mère ne se départit jamais de son humanité. Le film n'est point une leçon de cinéma, tant l'histoire transcende l'aspect technique (vidéo et caméra portée), mais une leçon de vie tout court.
Fort, touchant et émouvant, raconté avec une simplicité déconcertante, ce qui manque tant aux cinémas arabe et africain en général, Sherley Adams a marqué cette édition par son propos profond, sa forme dépouillée, sa délicatesse et sa subtilité.
Microphone : un cinéma de la marge
Le jury a, lui, contre toute attente (et contre la rumeur qui s'est répandue depuis les premiers jours) décerné le tanit d'or à Microphone, un film, disons-le d'emblée, largement inspiré du film iranien Les chats persans de Bahman Gobadi, programmé dans la sélection officielle Un certain regard de Cannes 2009 et qui se focalise, justement, sur la musique underground (Rock', Hip-Hop, etc.) interdite en Iran. L'enjeu étant la liberté d'expression et la lutte contre l'oppression. Le film iranien a été tourné en 17 jours sans autorisation dans les rues et les caves de Téhéran récoltant un grand succès à Cannes et ailleurs, dans d'autres festivals internationaux. Le réalisateur de Microphone a repris l'idée à sa manière, sans cette dimension dramaturgique de la clandestinité. Comme dans Les chats persans, il opte pour un traitement déjà vu, façon cinéma du réel, filmant avec une caméra portée (canon 7D) l'art urbain et les artistes de l'underground, entre musiciens, chanteurs, taggueurs, profitistes et autres.
Les images speedées et tremblantes, parfois floues, faute de point, nous promènent, deux heures durant, à travers Alexandrie, du front de mer jusqu'aux toits d'anciennes bâtisses, en passant par les ruelles et trottoirs «squattés» par de jeunes artistes. Cette balade, ponctuée par l'histoire d'une rupture, celle du couple (Khaled Abu Naga et Menna Chalabi), n'hésite pas, à plusieurs reprises, à sombrer dans des discussions bavardes sur la liberté d'expression et la quête identitaire, les rêves et les espoirs de la jeunesse.
Une jeunesse fougueuse en butte à la censure, désireuse d'arracher sa place dans la société, de porter sa voix, de (re) créer le monde, de le changer, de le faire évoluer à travers les «Arts» de la marge. Certes, c'est bien beau mais rien qu'à l'écoute de certaines de ces musiques et chants de l'underground, on n'a plus qu'une seule envie : se réfugier dans un bon vieux morceau du patrimoine arabe, expression du vrai art. Et au diable la musique underground !
Microphone pèche aussi par moments par des répétitions et des redondances. Les personnages n'évoluent plus et tournent en rond d'où les longueurs superflues et assommantes d'un cinéma plus proche de l'amateurisme que de l'art. Donc de la marge que du centre.
Voyage à Alger, tanit d'argent : démonstratif et direct
En raflant la statuette d'argent et le prix du public, Abdelkrim Bahloul auteur-réalisateur algérien de Voyage à Alger a déclaré, le soir de la clôture, du haut de la scène du Théâtre municipal, que ces deux prix sont «extrêmement importants» tant «ils marquent la continuité et la pérennité de la créativité du cinéma algérien».
Bref, dans ce film autobiographique, son 6e long métrage (dont Un thé à la menthe et Le soleil assassiné), le réalisateur explore l'histoire et la mémoire collective en mettant en scène le combat d'une veuve de martyr (Chahid), courageuse et vaillante, sa propre mère en fait, contre l'injustice au lendemain de l'indépendance.
Un Harki veut la chasser, avec ses six enfants, de la demeure que lui a offert l'ancien maire français de Saïda, avant de repartir à Alger pour rencontrer le Président Ben Bella afin qu'il répare cette injustice. Mais pardonnera-t-elle à ce Harki, haut fonctionnaire de l'Etat qui a voulu abuser de son pouvoir?
Justement, parmi les messages de ce film : la place de la femme algérienne qui a résisté et souffert, autant que l'homme, le pardon, la tolérance. Hélas tout est dit dans un discours didactique et direct, ce qui plombe l'atmosphère et rend le film par trop démonstratif. Deux mentions spéciales, cependant, pour l'actrice Samia Meziane dans le rôle de la veuve et Samy Ahedda dans le rôle de l'enfant Kadirou. Le public a adhéré au propos du film et s'est identifié à cette femme forte qui combat seule l'injustice, en votant en masse : 4.800 spectateurs ayant coché la case «Excellent».
La mosquée, Tanit de bronze : dans l'air du temps
Le film La mosquée, du Marocain Daoud Aoulad-syad, s'est vu décerner, lui, la statuette de bronze.
L'histoire est drôle et véridique : pour les besoins d'un autre film de Aoulad syad : En attendant Pasolini, Moha, un paysan du Sud marocain a loué sa terre en vue de la construction d'un décor de mosquée. Mais fait étrange et inattendu : à chaque appel à la prière, les habitants de la région se rendaient à cette mosquée-décor pour prier.
Créant un précédent et une habitude, Moha n'a pu se réapproprier son terrain, son unique gagne-pain. C'est de cette anecdote que le réalisateur a tiré la fable du film, où il dénonce, à partir du combat solitaire d'un homme modeste contre l'injustice qu'il subit, l'industrie du cinéma qui exploite ces petites gens, bons et généreux, puis les laisse livrés à eux-mêmes.
A travers la métaphore de la fausse mosquée, décor de cinéma en carton pâte, le réalisateur met à nu l'envers du décor, soit les mentalités de villageois crédules et naïfs, en dehors de la modernité, manipulés par de faux dévots (le figurant de cinéma devenu imam) et des gens du pouvoir qui utilisent la religion à des fins politiques.
Dans l'air du temps, ce long métrage est traité sans grande recherche cinématographique, l'œil du photographe transcendant celle du réalisateur (l'image donc), mais avec un humour léger et parfois grinçant. Le film agite, au fond, le problème du rapport cinéma-vie.
En prenant un décor de mosquée pour une vraie mosquée, les villageois assimilent le cinéma (la fiction) à la vie (la réalité). Le cinéma c'est en quelque sorte la vie, plus précisément son reflet, et Moha l'apprendra à ses dépens. Magnifique personnage interprété avec un naturel sidérant par Abdelhadi Touhrache qui aurait mérité le Prix d'interprétation masculine, échu à l'acteur égyptien Assar Yacine pour son rôle dans Messages de la mer de Daoud Abdelsayed. Un film sur la difficulté de communication, inabouti et sans surprise.
L'absence des longs métrages tunisiens : pourquoi?
Le cinéma tunisien est absent du palmarès malgré les trois longs métrages sélectionnés :Les palmiers blessés de Abdellatif Ben Ammar, Fin décembre de Moez Kamoun et Chronique d'une agonie de Aïda Ben Aleya. Notre cinéma va-t-il mal à ce point?
Si Chronique d'une agonie, un non-film, n'avait aucune chance de figurer au palmarès du jury de la compétition officielle, qu'en est-il de Les Palmiers blessés et de Fin décembre? Techniquement, il faut le dire, ces deux opus valent sinon dépassent le reste des films de la compétition. Mais cela suffit-il?
L'intensité et la portée de la fable, la profondeur des personnages, la force, la sincérité et la cohérence du propos, la subtilité du langage cinématographique, la qualité du jeu des acteurs, les sentiments suscités demeurent tout aussi importants.Et Shirley Adams, pour revenir à ce film poignant, émouvant et incitant à la réflexion, en est le parfait exemple.
Les Palmiers blessés, absent du jury de la compétition, a reçu le prix du jury enfants. Que les enfants apprécient le film n'est pas rien, «Le prix de l'innocence et de la transparence», selon l'acteur algérien Hassen Kechache. Qu'insinue-t-il au fait? Mystère et boule de gomme !
Au-delà des motivations du jury, l'absence des longs métrages tunisiens incite à la réflexion sur la production de ce genre de films dont la quantité devrait nécessairement augmenter afin de sécréter la qualité, comme c'est actuellement le cas pour les courts métrages. Le foisonnement de la production ayant sécrété une certaine qualité.
Tanit d'or du court métrage : Linge sale
Le cinéma tunisien n'est donc pas totalement absent du palmarès de cette 23e édition, puisque Linge sale de Malik Amara a remporté le trophée suprême et selon le jury «pour sa cohérence esthétique, son récit mené avec brillance et poésie, qui pousse à l'extrême absurdité le tableau d'une course effrénée à la consommation» (sic).
Or, à bien y regarder, cet opus est plutôt centré sur un mari maltraité par sa mégère de femme, tyrannique et dominatrice en diable.
Mais peut-être que la souscription à une assurance-vie par le mari et la scène finale le montrant menant la belle vie, après la disparition (vraie ou imaginaire) de sa femme,a induit le jury en erreur. Il est vrai que clore le film avec cette scène peut brouiller, dans l'esprit du public, les motivations du personnage : on peut croire qu'il s'est débarrassé de sa femme non point pour se venger de toutes les humiliations qu'elle lui a fait subir, mais pour rafler la mise de l'assurance-vie. Mentions spéciales pour Jamel Sassi au jeu sobre à souhait et à la musique du film.
Le Tanit d'argent est revenu à Pumzi de Wamuri Kahu (Kenya) et le Tanit de bronze à Lezare de Z.Woldmariam (Ethiopie). Deux petits films attachants, traitant de l'utopie d'un monde vert.
Le Prix de l'OFA a récompensé Red Pale de Mohamed Hammed (Egypte) pour son fin et subtil propos sur l'intégrisme rampant dans les mentalités, les esprits et la société égyptienne et/ou arabe jusqu'au point de gommer toute féminité chez les jeunes filles, autrement dit leur identité.
Enfin, le jury documentaire et de la compétition des courts métrages, présidé par le réalisateur marocain Nabil Ayouch, a décerné le Prix du documentaire à Fix me du Palestinien Raed Andoni qui traite de l'identité avec distance et un humour décalé façon Elia Suleïman.
Le premier prix du court métrage a été décerné à Vivre de Walid Tayaâ, tandis que le deuxième a échu à The last song de Houneïda Béhi (Nous y reviendrons), mais d'autres tels que Condamnation de Walid Mattar, Mouja de Mohamed Ben Attia, Obsession d'Amin Chiboub, Tiraillement de Najwa Slama Limam suscitent l'intérêt grâce à l'audace de leur propos, leur vision et méritaient pleinement d'être récompensés.


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