Il a fallu la force des parents et de l'opinion publique pour ramener les deux protagonistes autour de la table des discussions. Demain lundi, 28 janvier, une réunion regroupera une délégation ministérielle et une autre syndicale pour essayer de trouver une solution à la gravissime crise de l'enseignement secondaire. Malgré les déclarations «hors contexte» de quelques membres du bureau de la Fges, l'on s'attend à une issue favorable. Si et seulement si l'on consent à faire des concessions. C'est grâce à la mobilisation sans précédent des parents et des organisations de la société civile que le syndicat de l'enseignement secondaire et le ministère retourneront à la table des négociations. Les manifestants ont voulu signifier, jeudi dernier, lors de leurs mouvements de protestation contre le blocage des examens du premier et du deuxième trimestre dans les collèges et les lycées, leur ras-le-bol de cette querelle interminable. Cette démonstration de force se voulait dissuasive et rappelait à qui de droit que la société civile a son mot à dire dans ce combat qui ne la concerne en rien. Désormais, il ne sera plus permis de toucher aux enfants du peuple sans en payer le prix. La jeunesse tunisienne n'est pas une monnaie d'échange ni un objet de chantage. A ceux qui ne veulent pas le savoir, nos enfants doivent rester à l'écart des tiraillements et des combines quels qu'en soient les enjeux. Plus de 30 heures de cours perdues par semaine ! Le travail de sape entrepris contre l'école tunisienne depuis plusieurs années ne doit pas se poursuivre impunément. Ceux qui en sont les auteurs ont intérêt à prendre en considération le degré d'exaspération de tout un peuple. L'indifférence des uns ajoutée à l'arrogance des autres n'a fait qu'empoisonner la vie de millions d'élèves et d'étudiants. A l'heure actuelle, tous les droits ont été bafoués au nom de la défense des «droits» d'autres catégories sociales. Le droit des élèves à l'enseignement que garantissent toutes les juridictions a été foulé aux pieds. C'est pourquoi il serait temps que cela s'arrête et ne se reproduise plus. Tous nos élèves subissent les humeurs de ces protagonistes qui s'invectivent et menacent sans arrêt. L'angoisse étreint nos élèves et les fait vivre depuis quelques années dans un climat de stress permanent. Rien que pour la dernière année, les examens et toute la saison ont été «sauvés» de justesse au prix de pressions et de sacrifices. Le même scénario est en train de se répéter cette année par un énorme chantage. Personne ne peut nier que les conséquences sur les acquis et le niveau de nos élèves seront irréversibles. Il faut se rappeler que, pour cette période de scolarité, les heures de cours perdues sont incalculables. Durant le premier trimestre, tous les élèves n'ont pas eu cours pendant les deux semaines, normalement, consacrées aux devoirs de synthèse ! Ce sont les enseignants qui en ont voulu ainsi en conformité avec les ordres de leur syndicat. Ce sont, alors, les élèves qui ont boycotté les cours car ils voulaient passer leurs devoirs comme le stipulait le calendrier élaboré par le Ministère et le syndicat. C'est, exactement, ce qui est en train de se passer ces jours-ci. En effet, les élèves boycottent les cours en attendant que les enseignants leur fassent passer les devoirs. Si on suppose que nos élèves suivent, en moyenne, 30 heures de cours par semaine (la majorité des élèves ont des emplois de plus de 30 heures), on peut considérer qu'ils ont perdu deux fois 30 heures au cours du premier trimestre. Il faut leur ajouter plus de 30 heures ces derniers jours sans qu'on sache jusqu'où se prolongera l'hémorragie. Une centaine d'heures, au moins, n'est pas à exclure d'ici les petites vacances (du 4 au 10 février). Ceci sans parler de l'absentéisme récurrent dont souffre notre système. A cet effet, le ministère de l'Education devrait publier des statistiques dans ce sens pour montrer à l'opinion publique ce que ces actes inconsidérés ont coûté à nos élèves. Plus jamais ça ! D'autre part, il serait important de tenir compte de ces considérations si, un jour, on parvient à conclure un accord avec le syndicat. Ce dernier ne donne aucune garantie concernant les après-accords. Auparavant, le ministère avait réussi à conclure des conventions pour résoudre des crises similaires mais chaque année, il y a de nouvelles revendications qui ramènent la situation à la case départ. Et c'est, alors, des grèves, des boycotts, etc. Les parents qui sont sortis crier leur colère contre les blocages de la vie scolaire, ne sont pas prêts à cautionner un éventuel accord qui réglerait les questions matérielles des enseignants et ne préserverait pas les années prochaines contre la répétition des mêmes scénarios. Car il semble que les risques de banalisation de ces pratiques font partie des traditions de ces organisations et que les revendications n'ont pas de fin. Il n'est pas question d'apporter quelques réponses à des demandes conjoncturelles en attendant qu'une nouvelle crise se déclenche l'année suivante et les années d'après. La Fges et, à travers elle, l'Ugtt doit s'engager à ne plus porter atteinte aux intérêts des élèves sous quelque forme que ce soit ni sous quelque prétexte que ce soit. Le champ des revendications syndicales ne doit plus déborder et mêler les enfants du peuple aux intérêts strictement corporatistes. Ce qui se passe chez nous n'a son pareil dans aucun pays du monde. Aucun syndicat ne peut engager une bataille aussi dévastatrice contre des innocents. Pire, les auteurs bénéficieront d'une impunité absolue et n'auront de compte à rendre à personne. On a vu que, pour la première fois (sûrement sous la pression de la rue et de l'opinion publique), le SG de la Fges a accepté de se faire auditionner par une commission de l'ARP. Sans toutefois parler du vif du sujet. L'intéressé s'est, plutôt, attardé à créer le buzz en portant des accusations de «corruption» contre le ministère. Dossier hors sujet, faut-il le souligner, car il pouvait le présenter devant un autre auditoire. Le vrai sujet de l'heure était comment rétablir le rythme normal des cours dans nos établissements et non de détourner le débat de ses objectifs. Forcément, les autorités et les parents sont tenus de se prémunir contre le recommencement d'une telle catastrophe pour les années à venir. Un simple accord (si d'aventure il venait à voir le jour) ne devrait pas concerner cette crise, uniquement. Tout le monde veut que nos enfants et notre école publique soient épargnés et ne subissent pas la furie dévastatrice de ceux qui prétendent défendre les droits des uns tout en bafouant ceux des autres. Cette épreuve doit être la dernière !