Sous l'égide de la chaire Sicile Vincenzo Consolo et Beit Al Hikma, le colloque «Identités fluides transnationales», organisé par Alfonso Campisi et Meriem Douib, a été d'une forte teneur scientifique dans son approche des relations historiques entre la Sicile et la Tunisie. Le Colloque international d'études méditerranéennes est à sa cinquième édition. Son objectif est de promouvoir le dialogue interculturel entre le Nord et le Sud de la Méditerranée, «Mais cette année, le colloque s'est intéressé aussi à la rive est et ouest qu'on oublie souvent», dit Alfonso Campisi. Beaucoup de thèmes ont été étudiés durant ces deux jours (18 -19 février), notamment sur l'identité, la langue et surtout sur l'histoire commune entre la Sicile et la Tunisie, dans la mesure où l'île italienne joue aussi le rôle de trait d'union entre le continent africain et celui européen. D'autres interventions ont porté sur la langue et le rapprochement entre le tunisien et le sicilien parlés à l'époque. Durant ce colloque, un livre et un film ont été présentés, s'inscrivant directement dans la thématique de la mémoire des Siciliens de Tunisie. «Cela fait une quinzaine d'année que j'ai ouvert ce domaine d'études sur la mémoire des Siciliens de Tunisie, ajoute Alfonso Campisi, une communauté assez importante en Tunisie, près de 80% de la communauté italienne en Tunisie était des Siciliens». «Siciliens de Tunisie : la dernière génération» est le titre du livre écrit par Marcello Bivona qui est venu présenter son ouvrage. Un ouvrage qui contient un témoignage très émouvant de l'histoire et, précisément, lorsque les Siciliens, qui n'ont pas accepté la nationalité française après l'Indépendance en Tunisie, ont été ramenés vers l'Italie, placés dans des casernes dans des conditions déplorables et traités par les Italiens comme s'ils étaient des étrangers. Une page noire de l'histoire italienne que personne ne veut évoquer et qui reste méconnue dans le monde. Un livre autobiographique qui parle de l'histoire Bivona en Tunisie, mais aussi de toutes ces familles siciliennes qui vivaient ici très proches des familles tunisiennes. «Siciliens d'Afrique-Tunisie terre promise» est le titre du film documentaire que Alfonso Campisi a réalisé en interviewant des anciens siciliens de Tunisie. «Terre promise» parce qu'on est toujours convaincu que la Tunisie a été et est encore une terre d'accueil, dit-il, c'est un fait que le monde entier doit connaître et surtout l'Europe. Je travaille depuis des années sur le rapprochement entre les deux rives et je dis toujours qu'on est comme deux personnes qui habitent le même palier, mais qui ne se connaissent pas suffisamment». Un film qui parle des Siciliens qui n'ont jamais quitté la Tunisie et qui se sentent fiers et heureux de ne pas l'avoir quittée. Le film parle aussi de la langue des Siciliens de Tunisie, car il existe une langue sicilienne propre à la Tunisie avec des influences arabes et tunisiennes ou françaises. C'est une langue qui a évolué avec des prêts linguistiques qui viennent de l'arabe et qui n'existe pas en Sicile.