Pendant une heure et demie on a voyagé dans univers mélodieux, sensible et intelligent. Cet événement pour le moins inhabituel, était une sorte d'audition de clôture, suite à une résidence musicale tuniso-néerlandaise programmée récemment dans la capitale, et délicatement prénommée Jazz-à-Main. Ce projet, de prime abord novateur et original, a suscité en nous l'irrésistible envie d'en savoir plus, quant aux tenants et aboutissants d'une telle démarche. De ce fait, nous sommes allés à la rencontre de l'instigateur du projet Jazz-à-Main 1ère Edition. Et comme pour rester dans l'harmonie des belles rencontres, le jeune homme s'est révélé à la hauteur de sa programmation musicale de qualité. Il s'agit du musicien Mohamed-Ali Kammoun, également assistant à l'I.S.M de Tunis, qui vient tout juste de soutenir brillamment sa thèse de doctorat au Centre des études catalanes à Paris, sous la direction du grand compositeur le Pr Jean-Marc Chouvel, lui-même ancien élève du maestro contemporain, Pierre Boulez, au Collège de France. Cette première édition de Jazz-à-Main a également été possible grâce au concours de l'ambassade du Royaume des Pays-Bas en Tunisie, et à la précieuse collaboration de son attaché culturel, Mme Cisca Yaakoubi. Un dossier ambitieux et éclairé que celui porté par Jazz-à-Main, et son concepteur Mohamed-Ali Kammoun. Ce dernier le définit comme «un projet institutionnel de coopération internationale autour du développement de la musique jazz en Tunisie». Animé par l'énergie de création qui sommeille en chaque activiste de son temps, il se bat aujourd'hui «pour permettre aux musiciens et mélomanes tunisiens de découvrir, d'apprécier et de connaître la musique contemporaine, avec ce qui s'y fait de plus pointu : le réseau swing». Il explique que son concept a d'abord été stimulé par ses recherches et ses études qui lui ont permis d'aiguiser son regard sur les nouvelles tendances instrumentales en Tunisie. Il se trouve que ces dernières sont en rapport avec le champ de l'improvisation musicale, directement assimilé au genre musical «jazz», circuit aujourd'hui exploité par quelques musiciens de la place. Les jazzmen se comptent sur les doigts de la main. Cependant, ces musiciens existent bel et bien, et parmi eux Mohamed-Ali dont la discipline élue est le piano, l'arrangement et la composition. Mais que pourrait nous apporter le jazz ? Et l'artiste de répondre : «Les enjeux culturels du jazz dépassent le simple divertissement, ils touchent directement nos patrimoines esthétiques et didactiques. Ils permettront certainement à la musique tunisienne et orientale de s'ouvrir vers un métissage encore plus enrichissant». Qui pourrait le contredire ? Depuis la mise en place du jazz dans les cités urbaines à partir d'environ 1920, les populations se sont réunies autour de ce son rythmé, chaleureux, transportant délicieusement vers un ailleurs plein de songeries éveillées. Tout en gardant leurs structures internes savantes et complexes, les arrangements jazzy associent toujours amoureux, amateurs et professionnels. De ce fait, Mohamed-Ali Kammoun, engagé corps et âme pour sa cause, pense qu' à travers des projets tels que Jazz-à-Main, baptisé ainsi pour évoquer une musique aussi élaborée et complexe que le jazz, est finalement à portée de mains, de ceux qui ont en besoin. C'est-à-dire, nos jeunes musiciens intéressés par la quête artistique. Jazz-à-Main aura lieu désormais plusieurs fois par an. Les participants seront encadrés par des interprètes tunisiens et internationaux. Le prochain rendez-vous est fixé pour fin janvier 2010. Dans Jazz-à-Main 2e édition, il y aura des musiciens italiens et néerlandais, ainsi que des masters classes d'instruments «jazz». Donc de la formation.