• La vocation de cette grande fête de la musique est qu'elle nous réserve parfois de petits trésors que nul ne soupçonne. Ce fut le cas avec Wajd 2 dans sa nouvelle version Après la soirée inaugurale, réservée à l'hommage à Naâma, la première édition des Journées musicales de Carthage a démarré en trombe, dimanche dernier, au Théâtre municipal, ainsi que d'autres structures d'accueil, avec une magnifique icône de la chanson en Tunisie, une «madone» qui sait exprimer toutes les nuances de la passion divine gardées secrètes par l'alchimie des spéculations mystiques. Présenté sous forme philosophique ou de recherche rationnelle qui a pour objet la connaissance de Dieu, l'Absolu, Wajd 2 est une sorte de métaphysique qui, s'abîmant dans le mystère divin, voit plus loin que la simple théologie. La sagesse et l'état de grâce revendiqués par Sonia M'barek, tout au long de son récital de chants soufis, ne sont pas le fruit d'un raisonnement simplet mais d'une vision contemplative que le fidèle acquiert au fur et à mesure de sa progression spirituelle. Dès l'instant où, démarrant son récital avec l'invocation du nom du divin, une longue litanie à vous faire frémir sous l'action d'une émotion partagée, Sonia M'barek a transporté son public hors du temps et du monde sensible par l'intensité du sentiment mystique que le seul nom d'Allah, le Dieu Tout-Puissant, est capable d'évoquer. Des invocations accompagnées de balancements du corps ainsi que de légères oscillations de la tête qui répondent à une transe musicale compatible avec les principes du soufisme. Wajd 2 a agi sur le public au point de l'amener à l'extase. Tout l'art de Sonia repose en fait sur la manière de créer un état de transe qui serait lié au rythme et à l'adéquation entre son discours mélodique, autrement dit la poésie, et le tempo toujours plus saccadé qu'elle impose elle-même aux mounched (récitants) d'une formation réduite à douze instrumentistes et choristes dirigée par Slim Jaziri. A pleines mains, elle a puisé dans le réservoir d'images, reflets sensibles de l'invisible, l'indicible qui n'est autre que Dieu. Avec Mohamed Iqbal, grand poète et philosophe indo-pakistanais s'exprimant en farsi, Sonia M'barek a atteint les cimes inaccessibles de la perfection. Elle a réussi à mettre en évidence le désir du poète d'approfondir sa foi en vivant la soumission à Dieu jusqu'à l'extinction totale en Lui. Cette intelligence spirituelle désintéressée et libérée des passions éphémères parce que terrestres élève le fidèle à une noblesse de l'âme délicatement restituée par l'extrême justesse du timbre de la voix de l'artiste qui a la particularité de transformer les mots en enchantement mélodique. Wajd 2 a saisi l'opportunité de revisiter le répertoire du Cheikh Laroussi Ben Khamis Turki, auteur d'authentiques perles du chant soufi. Dans le volet des nouvelles créations, le public s'est délecté avec Nour et anwar, paroles de Khaled Ouaghlani, musique de Fathi Zghonda, présent également avec une Issaouia(chants soufis). Chedly Anwar, Rachid Yeddes et Abou Saïd Al-Andaloussi ont été les fils de la trame de cette magnifique fresque musicale dont la forme sert d'écrin et le fond de diadème illuminant le front de cette belle musique d'inspiration soufie. Les JMC, aujourd'hui 15h00 : spectacle de Ridha Chmak (4e Art) 17h00 : orchestre d'harmonie de France (Ibn-Rachiq) 18h00 : troupe En Chordais de Grèce (Théâtre municipal) Compétition de chant et de composition 21h00: Bassekou Kouyate du Mali (Théâtre municipal)