Il s'agira en particulier pour le président du gouvernement espagnol, José Luis Rodriguez Zapatero, et son ministre des Affaires étrangères, Miguel Angel Moratinos, d'apprendre à travailler avec le président fixe du Conseil européen, le Belge Herman Van Rompuy, et le haut représentant pour la politique extérieure de l'UE, la Britannique Catherine Ashton, fraîchement nommés. Officiellement, comme l'a précisé le chef de la diplomatie de Madrid, mi-décembre, "il n'y a aucune concurrence entre les autorités espagnoles et les nouvelles institutions (...) La présidence espagnole ne sera pas nationaliste, elle sera européiste". Reste que, si Herman Van Rompuy présidera bien les sommets européens avec les pays tiers — ainsi que les conférences de presse — "s'il considère que José Luis Zapatero doit être présent, rien n'empêchera ce dernier de l'accompagner", a estimé Miguel Angel Moratinos, qui présidera quant à lui la réunion informelle des ministres des Affaires étrangères de l'UE, organisée dans sa ville de Cordoue. "Le ministère espagnol des Affaires étrangères est à la totale disposition de Catherine Ashton (...) Nous travaillerons ensemble et si, modestement, je peux apporter ma modeste expérience, je le ferai", a-t-il ajouté pour signaler que Madrid entendait bien jouer un rôle actif sur des dossiers tels que le processus de paix au Proche-Orient, la mise en œuvre de l'Union pour la Méditerranée (UPM) et la relation entre l'UE et l'Amérique latine. Tout en relevant que des rencontres entre les principaux intéressés ont permis d'arrondir les angles, des diplomates européens soulignent que chacun marque ses positions. José Luis "Zapatero a fait du sommet avec les Etats-Unis le point culminant du semestre et n'a aucune intention de laisser qui que ce soit lui prendre sa place avec (Barack) Obama sur la photo", dit l'un d'entre eux. Agenda Un ministre d'un pays du Bénélux explique quant à lui que la véritable inflexion par rapport à la pratique voulant que chaque capitale réécrive en grande partie l'agenda européen à chaque début de semestre ne viendra pas de l'Espagne, mais de la Belgique, qui lui succèdera le 1er juillet 2010. "Le gouvernement belge a bien l'intention d'installer des pratiques différentes en s'effaçant derrière Herman Van Rompuy et Catherine Ashton. Le véritable changement se fera à ce moment-là", indique ce ministre. En dépit du trio affiché Espagne-Belgique-Hongrie, qui veut développer un programme cohérent au cours des dix-huit prochains mois, la liste des priorités espagnoles est d'ailleurs largement inspirée des préoccupations du gouvernement Zapatero. Politiques sociales pour atténuer les effets de la crise économique, accent mis sur les droits civiques et sur lerenforcement de l'égalité hommes-femmes, développement de la coopération policière et judiciaire pour mieux combattre le terrorisme et l'immigration illégale figurent parmi les grands axes de cet agenda. La diplomatie européenne sera également marquée de ce sceau puisque, outre le sommet UE-Etats-Unis du mois de mai, les Espagnols hébergeront le sixième sommet UE-Amérique latine au niveau des chefs d'Etat, le premier sommet UE-Maroc de l'histoire ainsi que le premier sommet de l'UPM depuis sa création en 2008. Miguel Angel Moratinos a par ailleurs insisté sur sa volonté de favoriser l'ouverture des négociations d'adhésion de la Serbie à l'UE sans tarder et de parvenir à la création d'un Etat palestinien au cours des tout prochains mois, deux ambitions qui comptent parmi les principaux objectifs poursuivis par la diplomatie espagnole. Sur le plan économique et financier, enfin, Madrid ne sera pas en reste et souhaite achever durant sa présidence la refonte de la supervision financière européenne. Désireuse de renforcer la coordination des politiques économiques européennes, particulièrement dans la phase de sortie de crise, elle planchera aussi sur un mécanisme inspiré du pacte de stabilité pour encourager les Vingt-Sept à appliquer à la lettre la stratégie de croissance à l'horizon 2020, dont l'UE souhaite se doter au cours de l'année 2010.