Hier après- midi, il faisait beau à Tunis quand une marée humaine envahit l'esplanade du théâtre municipal, scandant des slogans approuvant la laïcité en Tunisie. De l'autre côté, bon nombre d'opposants, dont quelques islamistes dénoncent ce dogme, en l'associant à une sorte d'athéisme qui ne peut être toléré dans un pays arabo-musulman. Querelles de dogmes par un samedi fertile en débats et en quiproquos. En si peu de temps, les partisans de la laïcité ont été sifflés par ceux qui la dénoncent. Ce qui les a obligés à quitter les lieux pour s'adonner à une marche pacifique le long du boulevard. Au-devant de la scène, une gent féminine accoutrée en blanc‑: des tee-shirts sur lesquels figure l'expression "La Tunisie est à toi et à moi". Tantôt entonnant l'hymne national, tantôt s'adressant aux journalistes présents, les partisans de la laïcité s'avèrent loin de lâcher prise, au grand dam de leurs rivaux. Des slogans dans le style "Je suis musulman et laïque", "La laïcité garantit l'égalité", "La religion est une affaire personnelle", "Une République laïque pour la dignité et la liberté" et "Ne touche pas à mes libertés individuelles" s'élèvent çà et là. Dans la mêlée des évènements, des débats se déclenchent entre les uns et les autres sur les racines et les principes de la laïcité et à propos de l'Islam et de l'histoire du pays. A chacun ses références, ses raisons, ses prétextes et ses justification. La divergence des avis est aussi manifeste que perceptible. Les tons s'aggravent et deviennent de plus en plus aigus. L'agitation gagne, ainsi, du terrain sur le calme. Et les choses auraient pu dégénérer n'eût été l'intervention de certains modérés pour calmer et apaiser les esprits. Les altercations verbales s'entendent de près comme de loin. Certains remontent aux anecdotes des années 90 pour justifier leur position en faveur d'une République laïque. Tandis que les autres évoquent une crise des valeurs qui n'a eu de cesse de se propager dans le pays, faute de sincère attachement aux préceptes de la religion islamique. Tout compte fait, force est de constater que bon nombre de Tunisiens confondent encore laïcité et athéisme. Il convient, dès lors, d'observer que la laïcité consiste à séparer le civil du religieux, le temporel du spirituel dans l'Etat. Autrement dit, la garantie d'une certaine indépendance par rapport à toute autorité religieuse. Cela dit, les institutions de l'Etat ne sont soumises à aucune contrainte ni même ne relèvent d'aucune justification de nature religieuse, spirituelle ou théologique. Ce qui n'est pas le cas en Tunisie, puisque l'article premier de la Constitution souligne que sa religion est l'Islam, sa langue est l'arabe et son régime est la République. Par les temps qui courent, la laïcité permet de prendre en compte la diversité des hommes et la nécessité de les unir pour assurer leur coexistence.